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12 mars 2019 2 12 /03 /mars /2019 13:33

Le recours aux contrats à durée déterminée très courts fait couler beaucoup d'encre depuis que le gouvernement a évoqué un mécanisme de bonus-malus. Dès lors, après un billet sur le partage des revenus au sein de la zone euro qui se fait au détriment des salariés, un autre sur les causes économiques de la crise sociale en France, et dernièrement une analyse sur les conséquences du passage à une économie de services, il m'est apparu indispensable de fournir des éléments précis et chiffrés sur le recours aux CDD.

 

Le CDD

 

Rappelons d'emblée que le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) est la forme normale et générale de la relation de travail en France. L'article L1242-1 du Code du travail dispose : "un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise".

 

L'embauche en CDD doit obligatoirement faire l'objet d'un écrit précisant entre autres comment prend fin le contrat, c'est-à-dire soit à la date fixée soit lorsque se réalise l’objet pour lequel il a été conclu (retour du salarié remplacé, fin de la saison…). Bien qu'il existe dans certains cas une durée maximale au CDD, renouvellement inclus, la destruction libéralisation du Code du travail voulue par Emmanuel Macron en 2017, a très largement relâché les conditions d'embauches en contrat à durée déterminée. En effet, une convention ou un accord de branche étendu peut désormais fixer le nombre maximal de renouvellements possibles pour un contrat de travail à durée déterminée. Dans ces conditions, affirmer que le CDD est l'exception et le CDI la norme semble relever de l'incantation, d'autant que la recherche effrénée de flexibilité tend manifestement à inverser cette règle dans les faits comme nous allons le voir...

En tout état de cause, l'embauche d'un salarié, quelles que soient la nature et la durée du contrat, donne lieu à différentes formalités obligatoires dont une déclaration auprès des organismes de protection sociale, ce qui offre à l'économiste une base de données fort utile pour analyser la nature des contrats d'embauches.

 

Les cas de recours au CDD

 

L'article L1242-2 du Code du travail liste les cas de recours au CDD : remplacement d'un salarié en cas, accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, emplois à caractère saisonnier, remplacement d'un chef d'entreprise, remplacement du chef d'une exploitation agricole, recrutement d'ingénieurs et de cadres, au sens des conventions collectives, en vue de la réalisation d'un objet défini. Par ailleurs, l'article L1242-3 prévoit qu'un CDD peut être conclu pour favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi et lorsque l'employeur s'engage à assurer un complément de formation professionnelle au salarié.

 

Le tableau ci-dessous résume les principaux cas de recours au CDD :

 

 

[ Source : Ministère du Travail ]

 

Le CDD d'usage ou le salarié kleenex

 

Dans la série des horreurs permises par le droit du travail, le CDD d'usage tient le haut du pavé tant il ravale le salarié au rang de simple kleenex. En effet, il s'agit d'un CDD particulier (pas nécessairement de terme, ni de délai de carence, ni de limite du nombre de renouvellements de contrat, ni durée maximale...), qui permet à un employeur - certes d'un secteur d'activité strictement défini - d'augmenter son effectif en employant rapidement un extra.

 

 

[ Source : https://www.service-public.fr ]

 

Un extra (sic !) est par définition un salarié présent de manière occasionnelle et irrégulière au sein de l'entreprise, ce qui n'empêche pas les dérives de plus en plus fréquentes liées à une interprétation extensive de la notion de "tâche précise et temporaire"...

 

 

[ Source : Les Échos ]

 

L'évolution des embauches en CDD

 

Disons-le d'emblée, pour l'instant le CDI reste la norme en France (en stock disent les économistes) :

 

 

[ Source : INSEE ]

 

Mais la part des CDD dans les nouvelles embauches a beaucoup augmenté depuis deux décennies et dépasse désormais 85 % :

 

 

[ Source : DARES ]

 

Cette évolution est allée de pair avec une forte baisse de la durée des CDD :

 

 

[ Source : DARES ]

 

Pour le dire simplement, en 2017, la durée moyenne d'un CDD est de 46 jours ; un quart des CDD dure moins d'un jour, 50 % moins de cinq jours et 75 % moins de 27 jours ! Avec de tels chiffres, le mouvement des gilets jaunes devenait inévitable... Le tableau ci-dessous montre par ailleurs l'usage intensif (abusif ?) de CDD très courts dans le secteur tertiaire, ce qui ne fait que confirmer mes craintes sur le passage à une économie de services.

 

 

[ Source : DARES ]

 

Le bonus-malus

 

Depuis le 1er juillet 2013, le taux de la contribution patronale d’assurance chômage (4,05 %) faisait déjà l'objet d'une majoration en cas de recours à certains CDD de courte durée. Mais à compter du 1er octobre 2017, cette majoration (4,55 % au lieu de 4,05 %) ne s’applique plus qu’aux CDD d’usage de moins de 3 mois. Autrement dit, la majoration ne s'applique pas pour les CDD liés à un surcroît d’activité, les CDD d’usage d’une durée supérieure à 3 mois, les contrats d’intérim, les CDD conclus en remplacement d’un salarié ou d’un chef d’entreprise absent, les contrats de travail saisonniers et les contrats de travail conclus avec des particuliers employeurs... Bref, la maille du filet est devenue tellement grande, que presque toutes les situations d'embauches passent au travers !

 

 

[ Source : https://www.rhinfoge.fr ]

 

D'où l'idée du gouvernement de mettre en place un bonus-malus, qui consiste à moduler les cotisations sociales des entreprises en fonction de l’utilisation de ces CDD très courts, afin que l’assurance chômage n’ait pas à payer pour des choix organisationnels propres aux entreprises :

Ce d'autant plus que la facture est très élevée pour l'assurance chômage :

 

 

[ Source : Les Échos ]

 

Car, contrairement à une idée reçue, la principale cause de rupture de contrat de travail n'est pas le licenciement économique mais la fin de CDD (avec également une montée en charge de la rupture conventionnelle, qui n'est que trop souvent un licenciement déguisé) !

 

 

[ Source : INSEE ]

 

Hélas, en France Ubu est roi, puisque d'un côté le gouvernement veut limiter les CDD très courts, alors que de l'autre il a flexibilisé à outrance le Code du travail, afin de permettre justement de multiplier ce type de contrats dans le temps.

 

L'Aigle de Meaux concluait à juste titre que "Dieu se rit des prières qu'on lui fait pour détourner les malheurs publics quand on ne s'oppose pas à ce qui se fait pour les attirer", ce que d'aucuns traduisirent de façon plus lapidaire ainsi : "Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes" !

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