Eu égard aux prochaines élections européennes, je poursuis aujourd'hui mon analyse des problèmes économiques de la zone euro, après une série de billets sur la crise des gilets jaunes et les mauvaises réponses apportées par le gouvernement. Ainsi, après avoir évoqué la situation économique de l'Allemagne, les prévisions de croissance en berne dans la zone euro et l'absence d'unification du marché du travail dans la zone euro, nous allons nous demander globalement où en est l'Europe économique.
La confiance des ménages structurellement en berne
Structurellement, la confiance des ménages dans la zone euro est faible :
[ Source : Natixis ]
L'hétérogénéité de la zone euro se voit déjà dans la différence de perception entre pays de la situation de l'économie européenne :
[ Source : Eurobaromètre 2018 ]
La croissance potentielle très faible
La croissance potentielle est définie comme celle réalisant le niveau maximal de production sans accélération de l'inflation, compte tenu des capacités de production et de la main-d’œuvre disponibles. C'est donc en quelque sorte le maximum de croissance qu'un pays puisse espérer à long terme en l'état actuel de ses caractéristiques économiques. Hélas, en raison du ralentissement des gains de productivité et du vieillissement démographique, la croissance potentielle est très faible dans la zone euro :
[ Source : Natixis ]
Le partage des revenus défavorable aux salariés dans la zone euro
De manière assez simple, si le salaire n'augmente pas au même rythme que sa productivité, alors il y a déformation du partage des revenus au détriment des salariés. Dès lors, on peut déduire du graphique ci-dessous, que le partage des revenus au sein de la zone euro se déforme structurellement en faveur des entreprises et donc au détriment des salariés :
[ Source : Natixis ]
La dégradation de la qualité des emplois
Celle-ci se traduit par une baisse substantielle des emplois industriels très productifs plutôt bien rémunérés, et la création d'emplois dans les services souvent plus précaires et mal payés :
[ Source : Natixis ]
La désindustrialisation de la zone euro
Le graphique ci-dessous montre que la désindustrialisation se poursuit et l'on ne peut que craindre le pire si l'Allemagne se retrouvait en difficulté avec son industrie automobile comme je l'ai expliqué dans ce billet :
[ Source : Natixis ]
L'endettement total très élevé
Bien sûr, il y a la dette publique, qui atteint des niveaux très élevés dans de nombreux pays européens :
[ Source : Eurostat ]
Mais il y a aussi l'endettement privé, dont le niveau est devenu très élevé laisse à penser que la consommation et l'investissement reposent en fin de compte pour une grande partie sur du sable :
Dette des agents non financiers privés (en % du PIB)
[ Source : Banque de France ]
Conséquemment, l'endettement total (public et privé) est devenu très élevé, et le moins que l'on puisse dire est que la financiarisation croissante de l'économie et les politiques monétaires très expansionnistes menées par BCE y ont grandement contribué :
[ Source : Natixis ]
Quant aux autres problèmes structurels de la zone euro dont j'ai très souvent parlé sur ce blog (faible circulation des capitaux entre pays membres, concurrence entre pays membres, impossibilité de corriger simplement les problèmes de compétitivité-coût, régulation bancaire inachevée, etc.), ils ne sont pas près d'être réglés. Rien d'étonnant alors de voir resurgir des formes de nationalismes économiques (et politiques), comme je l'ai expliqué dans ce billet. Certes, le repli sur soi-même est loin d'être la bonne solution pour un pays, mais il est difficile de trouver un juste milieu lorsque l'idéologie dominante prône au contraire la compétition (concurrence) à outrance via la libéralisation au détriment de la coopération.
Mais par les bons temps qui courent, il est de bon ton de laisser croire que tous les problèmes de la zone euro se régleront bien un jour... pour peu que les plus pauvres et les classes moyennes ne se révoltent pas avant !