Après mes billets sur l'annulation de la dette publique au sein de la zone euro et l'effet boule de neige de l'endettement public, je vous propose aujourd'hui un gros plan sur la situation économique de l'Italie. Et le moins que l'on puisse dire est qu'elle est inquiétante ! C'est pourquoi, après en avoir brossé le tableau, nous verrons les implications pour les politiques économiques européennes.
État des lieux
Les difficultés rencontrées par l'économie italienne sont nombreuses et bien connues :
* absence de gains de productivité
[ Source : Natixis ]
* vieillissement démographique
* croissance très faible
[ Source : https://www.tresor.economie.gouv.fr ]
Pour ceux qui auraient la flemme de relire mon billet sur la croissance potentielle, je vous rappelle que celle-ci peut être définie comme la croissance réalisant le niveau maximal de production sans accélération de l'inflation, compte tenu des capacités de production et de la main-d’œuvre disponibles. En partant de l'identité suivante Y = P.N où Y désigne le PIB, P la productivité par tête et N l'emploi, l'on en déduit que la croissance potentielle est liée aux gains de productivité par tête et à la croissance de la population active. Or, comme en Italie ces deux variables sont en berne, la croissance potentielle ne peut qu'être faible...
* investissement privé en berne
[ Source : Natixis ]
* système éducatif et de formation peu performant
* désindustrialisation
[ Source : Natixis ]
* finances publiques dégradées
[ Source : OCDE ]
À ce tableau peu reluisant, l'on pourrait ajouter les fragilités du secteur bancaire, la faiblesse des dépenses de R&D, la compétitivité extérieure en berne, les inégalités territoriales (notamment Nord-Sud)...
La contrainte italienne sur les politiques économiques européennes
Le vrai problème vient du fait que l'Italie est membre de la zone euro, ce qui implique qu'elle ne peut plus utiliser l'outil de la dévaluation monétaire pour relancer sa compétitivité-prix. Tout le monde a encore en tête le psychodrame qui s'est joué entre la Grèce et les institutions européennes, dont j'avais rendu compte dans plusieurs billets, entre autres ici, là et encore là. Et comme la taille de l'économie italienne est sans commune mesure avec celle de la Grèce, l'on comprend aisément à quel type de problème la zone euro va devoir se frotter !
Pour éviter une crise économique en Italie, quelle que soit son origine du reste, l'UE devra lui venir en aide. Cela se fera notamment par le plan de relance européen, dont 200 milliards d'euros devraient être alloués à l'économie italienne, mais un tel versement risque fort d'être insuffisant et nécessitera assurément des rallonges après 2023...
De plus, la BCE n'aura d'autres choix que de mener une politique monétaire expansionniste, suffisamment du moins pour empêcher le taux d’intérêt souverain de l’Italie de diverger de celui de l'Allemagne. Or, avec une croissance potentielle proche de zéro et un taux d'endettement public extrêmement élevé, seul un taux d'intérêt très faible peut empêcher de rendre la dynamique de la dette publique explosive.
En définitive, l'économie italienne est dans une situation très dégradée, mais curieusement ce constat passe pour l'heure sous les radars médiatiques. Il est vrai qu'il y a tant à dire sur des sujets bien plus palpitants comme la réouverture des terrasses ou les résultats des rencontres footballistiques... Le triomphe de l'homo festivus de Philippe Muray ?
P.S. L'image de ce billet provient de cet article de BFM TV.