A l'approche des élections régionales allemandes en Hesse et en Basse-Saxe, la question du salaire minimum est en ligne de mire. En effet, rappelons qu'il n'existe pas en Allemagne de salaire minimum national comme le SMIC chez nous. Les négociations se faisant outre-Rhin branches par branches, on a assisté, après de longs mois de négociations, à la conclusion de l'accord suivant : les services postaux ont obtenu l'introduction, à compter du 1er janvier 2008, d'un salaire minimum horaire de 9,80 euros. Soutenu par le Parti social-démocrate (SPD), cet accord a provoqué l'ire de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), le parti d'Angela Merckel. Et ce, d'autant plus, que le SPD souhaite aller plus loin et mettre en place une législation inspirée du modèle britannique où le revenu minimum est fixé par une commission composée d'experts, de représentants des salariés et des patrons.
Bien entendu, lorsqu'il s'agit de fixer une orientation à la politique économique d'un pays, il y a des avis divergents. Ainsi, certains économistes, qui conseillent le gouvernement allemand, préconisent un salaire minimum horaire unique pour toutes les branches à 4,50 euros. Tandis que d'autres refusent catégoriquement une telle mesure qui serait contraire au libre fonctionnement du marché du travail. Mais il ne faut pas oublier que le climat social ne cesse de se dégrader en Allemagne depuis les plans de rigueur du célèbre Peter Hartz (l'ex-manager du groupe Volkswagen que l'on surnommait le tueur de coûts salariaux). Les Allemands ont ainsi vu leur sécurité social devenir moins généreuse, et la notion de justice social a commencé à leur paraître très lointaine (voir l'article sur le plan Hartz 4).
Ce plan qui devait être exceptionnel, l'a surtout été pour les patrons puisque leurs profits ont explosé tandis que le salaire réel des travailleurs a stagné voire diminué sur la même période. Voici ci-dessous l'augmentation du salaire réel en France et en Allemagne en 2006 à partir des chiffres de l'INSEE :
En s'intéressant à la période 1996-2005, les chiffres d'Eurostat m'ont permis de construire le graphique suivant qui présente le taux de salaire réel, l'inflation et le taux de salaire nominal pour 3 pays :
Cela débouche forcément sur un sentiment d'avoir subi la croissance sans en avoir profité. On le voit avec la grève des chemins de fer allemands, grève inimaginable il y a encore quelques années. Mais l'on peut aussi citer les personnels hospitaliers qui ont été à l'origine d'un mouvement important en 2007.
L'objectif des gouvernements semble être le plein emploi. Objectif louable mais irréaliste s'il s'accompagne d'une baisse des salaires trop importantes ou d'une précarisation de l'emploi. Car c'est ainsi que l'on crée ce que les Américains appellent les "working poors", les travailleurs pauvres. Et une telle société ne peut que se déliter à plus ou moins long terme...