Après le trader fou, voici le retour du patron voyou ! Je viens en effet de lire que les salariés du sous-traitant automobile BRS de Devecey (Doubs) avaient surpris leur patron en train de déménager le matériel de l'usine. Ledit patron, Mike Bacon, avait tout de même déjà réussi à faire partir en Slovaquie trois camions remplis de pièces détachées et de matières premières. Mais très rapidement, l'ensemble du personnel s'est mobilisé. Les camions, qui achevaient le transfert commencé par un précédent convoi, ont été bloqués par les voitures des employés, puis vidés. Les salariés ont alors retenu leur employeur deux nuits consécutives dans l'entreprise
Quelques précisions concernant cette entreprise : BRS avait déjà été placée en redressement judiciaire avant d'être rachetée en février 2007 par le groupe britannique Utilux. La mise au point de nouveaux produits et l'arrivée de quelques nouveaux clients ne l'ont redressée suffisamment aux yeux de M. Bacon, qui a déclaré cette phrase hautement intellectuelle pour justifier sa délocalisation sauvage en Slovaquie : "c'est parce que c'est là-bas, aujourd'hui, que tout se fait. Je dois payer les ouvriers 25 euros de l'heure à Devecey et 5 euros en Slovaquie". Or, il faut impérativement rappeler que le coût salarial n'est pas un bon indicateur du coût total supporté par l'entreprise pour produire. En effet, sans rentrer dans les détails, rappelons qu'il existe des coûts liés à la gestion à distance (en Slovaquie ici), des coûts de surveillance sur place, des coûts liés à la barrière de la langue, etc. On appelle cela des coûts de transation (étudiés formellement depuis Coase en 1937 et surtout Williamson en 1985 dans The economic institutions of capitalism). De plus, n'oublions pas qu'il existe aussi des différences de productivité entre les salariés dex deux pays. Ainsi, pour en tenir compte, il faudrait calculer le coût salarial unitaire dans chaque pays, c'est-à-dire le coût divisé par la productivité. Mais là, je sais, j'en demande trop...
Est-il besoin de rappeler en outre que les employés de BRS, dont les salaires de décembre avaient déjà été perçus avec retard, n'ont pour l'instant toujours pas vu la couleur de ceux du mois de janvier...
Pour finir, il est évident que ce n'est pas avec de tels scandales, que l'opinion des jeunes Français (et Françaises bien sûr !) à l'égard des entreprises et du marché va s'améliorer. Ceux qui dénoncent l'enseignement de l'économie dans les lycées, qui serait à la base de cette défiance, devraient se souvenir que les médias sont bien plus puissants qu'un manuel ou qu'un professeur pour transmettre des informations à la jeune génération...