La Commission européenne, à travers son commissaire aux affaires économiques et monétaires (M.Almunia) a, jeudi 21 février, revu en forte baisse ses prévisions de croissance pour 2008 : selon ses services, la croissance devrait être de 1,8 % cette année au sein de la zone, et de 2 % pour l'ensemble de l'Union européenne, soit, dans les deux cas, 0,4 point de moins qu'escompté en novembre 2007...
Ce qui est le plus inquiétant dans cette déclaration, c'est surtout de remarquer que les prévisions de croissance sont revues à la baisse pour les principales économies de la zone euro. Pourtant, les dirigeants européens n'ont pas lésiné sur les moyens pour nous "expliquer" que la crise américaine ne pouvait pas toucher l'Europe, et que nos systèmes financiers vertueux étaient le meilleur gage de sécurité... Je rappelle tout de même au lecteur de ce billet, que ce genre de phrases rassurantes fait partie intégrante de la fonction politique, qui se doit de stabiliser un système qui lui échappe de plus en plus. Alors, quand Madame Lagarde, notre ministre de l'économie, pronostique 2% de croissance en France pour l'année prochaine, tout le monde rit tout bas : c'est surtout qu'elle espère ainsi obtenir une hypothèse autoréalisatrice, c'est-à-dire, une prophétie qui se réaliserait parce que tout le monde y croit !
Revenons un instant sur les chiffres annoncés. D'après les services de la Commission européenne, la croissance devrait être de 1,6 % en Allemagne, soit un demi-point de pourcentage de moins que prévu à l'automne, de 0,7 % en Italie (- 0,7 %) et de 1,7 % en France (-0,3 %). Sur le graphique ci-dessous, issu de l'INSEE, on voit l'évolution de la croissance française de 1960 à 2005, en valeur et en volume.
Pour la Commission, la situation est désormais "exceptionnellement incertaine" dans le monde comme en Europe (il aura fallu 6 mois pour que les têtes pensantes de Bruxelles s'en rendent compte...) et, dans la foulée de la crise immobilière américaine, "la détérioration de la confiance a commencé à affecter l'économie réelle". Cette dernière phrase est lourde de sens, puisqu'elle constitue l'aveu d'une catastrophe à venir. Elle signifie que la crise, au départ cantonnée au système financier, commence à avoir des répercutions sur l'économie réelle, c'est-à-dire l'économie qui touche Monsieur Tout-le-monde : moins de crédits octroyés, baisse de la croissance, etc. Tout ceci pouvant déboucher sur de graves problèmes sociaux : précarisation encore plus accrue des emplois, chômage de masse, etc.
Pour terminer sur une note un peu plus souriante, il est intéressant de voir l'idée que l'on se fait de la politique économique française à Bruxelles, en lisant la fin du communiqué de M. Almunia. Celui-ci reconnaît que les mesures adoptées par le gouvernement Fillon pour améliorer le pouvoir d'achat devraient soutenir la demande des ménages, même si elles "pourraient être moins efficaces qu'attendu".
Diplomatie, quand tu nous tiens...