J'ai souvent expliqué sur mon blog combien la qualité des informations était primordiale dans le monde économique et boursier en particulier. En effet, pour faire simple, rappelons que l'ensemble de la microéconomie classique telle qu'on l'enseigne en 1er cycle universitaire, est basée sur une hypothèse de rationnalité des agents qui va de paire avec une connaissance parfaite de toute l'information disponible. Bien entendu, ce n'est jamais le cas, puisque personne ne peut tout savoir, et d'ailleurs, même si toute l'information était connue, il faudrait encore savoir l'interpréter... Les économistes ont ainsi développer des théories où l'information n'était pas parfaite, ou tout du moi pas partagée par tous de la même façon (théorie de l'asymétrie d'information d'Akerloff,...).
Aujourd'hui, je souhaite vous montrer combien le rôle de l'information est capital sur les marchés financiers. Tout commence le 19 mars par une fausse rumeur lancée sur le Net, probablement par un trader, sur la présumée santé fragile de la banque britannique HBOS (numéro un du marché des prêts immobiliers au Royaume-Uni). Ce trader a employé une technique boursière connue sous le nom de "trash and cash". Pour l'expliquer en quelques mots, disons qu'il s'agit d'emprunter à des fonds de pension des actions de sociétés jugées vulnérables pour les revendre. Des rumeurs malveillantes sont propagées pour faire chuter le titre. Puis, le produit de la cession est utilisé pour racheter de nouvelles actions au plus bas qui sont remises au fond de pension. La plus-value du trader est la différence de prix entre les actions empruntées et les nouvelles. Toute l'opération repose donc sur la croyance du marché en cette rumeur fallacieuse. En l'occurrence, l'opération a réussi puisque le trader aurait empoché environ 100 millions de livres !
Or, la propagation de fausses nouvelles en vue de manipuler les marchés est un délit puni par le gendarme de la bourse au Royaume-Uni, la célèbre FSA (Financial Services Authority). Celle-ci a d'ailleurs lancé une enquête criminelle pour identifier qui est l'auteur de ce coup boursier. Mais, dans les affaires de propagation de fausses informations, les preuves sont souvent difficiles à établir. De plus, le mauvais contexte économique pourrait refroidir l'ardeur de la FSA à mener son enquête pour ne pas donner l'impression d'un acharnement...
Au-delà du cas spécifique HBOS, c'est toute la City qui est mise en cause depuis la crise des subprimes. On pense notamment au Crédit suisse qui a reconnu que plusieurs de ses traders londoniens avaient caché des pertes de 1,4 milliard de livres (sic !) sur des produits financiers complexes pour préserver leurs primes de fin d'année !
Je pense ici, tout comme Michel Aglietta, qu'il ne s'agit pas seulement d'une crise financière, mais surtout d'une crise de la finance...