Le ministère de l'emploi vient de faire hier une découverte sensationnelle : non seulement le chômage repart à la hausse avec 4,4 % sur un an (encore qu'il faille nuancer les baisses passées...), mais de plus cette hausse pourrait se poursuivre durant l'année à venir ! Malheureusement, cette découverte n'en est pas une, puisque la plupart des économistes - et des non économistes - avaient anticipé cette envolée du chômage en période de crise. Pour preuve, voici une déclaration du directeur adjoint au département analyse et prévision à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : "Le chômage va progresser de façon régulière jusqu'à la fin 2009, et ce en raison du fort ralentissement de l'économie française".
Voici ci-dessous un graphique issu du site lemonde.fr et qui présente l'évolution du chômage mésuré selon la définition de la DARES. Le chiffre fourni par le ministère ne prend ainsi en compte que le nombre de chômeurs inscrits à l'ANPE en catégorie 1(courbe du bas)...
Néanmoins, il existera des amortisseurs qui permettront d'endiguer ce flot de chômage, au moins partiellement. Tout d'abord, notre omniprésident a ENFIN compris que les contrats aidés qu'il avait supprimés été une nécessité pour relancer l'économie. Il a ainsi (re)créé 100 000 contrats de ce type qui permettront de diminuer d'autant les chiffres du chômage. Ajoutés à une formation adéquate, ces contrats aidés peuvent être une réponse adaptée à ceux qui avaient le plus de mal à retrouver un emploi pérenne.
Le deuxième amortisseur, dont on parle peu d'ailleurs, est la moindre progression de la population active. Pour donner un chiffre fourni par l'OFCE, il y a 7 ans, la différence entre le nombre de jeunes qui entraient sur le marché du travail et ceux qui le quittaient, était, en moyenne, de 200 000 personnes. Aujourd'hui nous sommes plus proche des 40 000...
Malgré ces amortisseurs qui devraient normalement aider un peu notre économie, nous n'éviterons pas toutes les mesures négatives sur l'emploi. Car, face à un ralentissement, les entreprises réagissent généralement en trois temps. D'abord, elles réduisent le nombre d'heures supplémentaires et recourent au chômage partiel. Si cela ne suffit pas, elles se séparent de leurs intérimaires et ne renouvellent pas les salariés en contrat à durée déterminée (CDD). Et ce n'est qu'après tout cela qu'en général elles procèdent à des licenciements économiques. Mais le salarié qui est confronté à de longues périodes de chômage partiel (que notre omniprésident veut d'ailleurs augmenter tout en prônant l'aberration économique "travailler plus pour gagner plus"...), peut-il véritablement s'attendre à un avenir radieux ? Ne finit-il pas plutôt par se dire qu'il se trouve dans l'antichambre du licenciement qui arrivera tôt ou tard ? D'après ce que j'ai pu constater, c'est ce sentiment qui semble prédominer dans la plupart des usines touchée par le chômage partiel...
Pour chiffrer le chômage partiel, on estime à environ 100 000 les salariés confrontés à cette baisse forcée du temps de travail. C'est moins que durant les autres crises (voir le graphique ci-dessous qui est une infographie issue du site lemonde.fr) :
J'avance que ce chiffre remarquable est dû à la mise en place des 35h dans les entreprises. En effet, dans le cadre actuel, ce sont des jours de RTT qui passent pour l'instant à la trappe et évitent ainsi une perte trop conséquente de salaire. Mais, bien entendu, si la crise devait se prolonger trop longtemps, ce mécanisme ne permettrait plus d'amortir le choc, et les pertes de salaire liées au chômage partiel seraient importantes. Rappelons à cet effet que l'accord interprofessionnel du 21 février 1968 fixe le montant minimum de l'indemnité de chômage technique à au moins 50 % du salaire brut, avec un plancher normalement proche du smic. Mais ce plancher n'a pas été réévalué depuis 1993 et se situe aujourd'hui à 4,42 euros par heure, soit à peine plus que la moitié du SMIC ! L'Etat participe à hauteur de 2,13 euros pour les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés et 2,44 euros pour les autres. Le solde reste à la charge de l'employeur...
En définitive, la crainte d'une récession plus longue que prévue alimente les anticipations négatives et déprime encore un peu plus chaque jour la demande et finalement l'offre. L'année 2009 risque ainsi fort d'être bien plus noire que 2008...