On m'interroge souvent sur l'évolution de l'emploi intérimaire. Il est vrai que les chiffres fournis par l'INSEE, et répétés à l'envi dans les médias, sont en général présentés hors intérim. Disons le donc tout de suite : les chiffres de l'emploi intérimaire sont catastrophiques depuis quelques mois !
Selon Pôle Emploi, un total de 469 800 personnes occupaient un emploi intérimaire en France en avril 2009 (en valeur corrigée des variations saisonnières), soit une chute de 31,9 % par rapport à avril 2008. La baisse mensuelle ayant quelque peu marqué le pas en avril (-0,3 % par rapport à mars 2009), certains y voient déjà un signe de reprise... ce qui est une erreur un excès de croyance dans les chiffres. En effet, n'oublions pas que certaines mesures et décisions conjoncturelles ont influencé - et vont encore influencer - les chiffres à très court terme : certaines aides vont ainsi relancer pendant quelques temps la demande et l'offre et donc avoir un impact sur l'emploi intérimaire. Je pense notamment à Renault qui va reprendre partiellement en France la production d'un modèle de Clio fabriqué en Slovénie, ou à Peugeot qui prévoit une demi-équipe de nuit comprenant 480 postes d'intérimaires à Mulhouse jusqu'en octobre.
Ce n'est donc pas une suprise si seule l’industrie connaît une augmentation de son emploi intérimaire en avril (+0,4%)... Et encore, il faut nuancer ce chiffre. Car, si d'un côté la fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac connaît la hausse la plus conséquente (+2,7%), de l'autre, l’emploi intérimaire continue de reculer fortement en avril dans les activités de fabrication d'équipements électriques, électroniques, informatiques et fabrication de machines (-6,5%).
A contrario, les secteurs du tertiaire et de la construction perdent respectivement 0,3 % et 0,9 % de leurs intérimaires par rapport à fin mars 2009... Tous secteurs confondus, sur un an, les plus fortes diminutions concernent les emplois d’ouvriers, qui représentent environ 3/4 des emplois intérimaires (-31,9 % pour les ouvriers qualifiés et -37,3 % pour les ouvriers non qualifiés). En évolution annuelle, l’emploi intérimaire recule dans toutes les régions. La Franche-Comté affiche ainsi la baisse la plus forte (-49,1%), suivie de la région Champagne-Ardenne (-47,0%). Ma région, la Lorraine, se situe parmi les régions qui connaissent les baisses les plus fortes. Même les régions réputées "dynamiques" perdent de nombreux emplois dans l'intérim : Languedoc-Roussillon (-17,0%), PACA (-17,4%).
Le seul signe positif vu par Pôle Emploi est l'augmentation de l'emploi intérimaire dans 12 régions au mois d'avril par rapport à mars. Au vu des explications conjoncturelles énoncées ci-dessus, on ne peut absolument rien en inférer sur le moyen terme, ni même sur le court terme (trimestre...). Dit autrement, une baisse moins prononcée en avril (qui reste toujours une baisse !) ne présume pas des chiffres du mois de juillet, et encore moins de ceux de la rentrée !
Voici, pour finir, un graphique présentant l'évolution de l'emploi intérimaire depuis l'an 2000 en France (données CVS) :
[ Source : Pôle Emploi, communiqué de presse juin 2009 ]
Est-ce donc le signe d'une reprise ? Rien n'est moins sûr...