La question soulevée dans le titre de ce billet est volontairement provocatrice, car par les temps qui courent il me serait facile de répondre qu'elles servent surtout à perdre de l'argent (le nôtre...) ! Je vais donc chercher à donner quelques idées fondamentales sur le rôle que jouent les banques dans l'économie, afin que le lecteur puisse saisir l'enjeu d'avoir un système bancaire régulé et efficace. Pour plus de détails sur la création monétaire par exemple, je vous invite à vous reporter à mon livre les grands mécanismes de l'économie en clair.
Qu'est-ce qu'une banque ?
La banque a une longue histoire derrière elle, mais elle prend son essor essentiellement dans les cités-États de Florence et Gênes à la fin du Moyen-âge. De nos jours, une banque est une institution financière habilitée, en France par l'Autorité de contrôle prudentiel, à réaliser des opérations de banque telles que définies par l'article L311-1 du code monétaire et financier : "les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que les services bancaires de paiement".
On distinguait traditionnellement et juridiquement la banque de dépôt, dont l'activité principale est d'effectuer des opérations de crédit et de recevoir des dépôts à vue ou à terme, de la banque d'affaires, dont l'activité principale est la prise et la gestion de participations dans des entreprises. Cette distinction fut abandonnée suite à la loi de 1984, ce qui conduisit les banques à mélanger les genres (activités de dépôt et d'affaires) pour devenir ce que l'on appelle, non sans pédantisme, des banques universelles. Or, la crise vient de rappeler que de tels mastodontes bancaires font peser des risques sur tout le système bancaire (=risque systémique), d'où l'idée de diviser à nouveau les activités bancaires comme au temps du Glass-Steagall Act.
Combien de banques trouve-t-on en France ?
L'autorité de contrôle prudentiel (ACP) a agréé 589 établissements de crédit pour l'année 2012, mais seuls 309 sont habilités à traiter toutes les opérations de banque telles que définies plus haut. Dans le détail, on compte :
* 153 sociétés de droit français adhérant à la Fédération bancaire française (FBF) : on y trouve autant Axa banque que BNP Paribas, en passant par Al Khaliji France...
* 22 succursales d'établissements ayant leur siège dans des pays tiers adhérant à la FBF, comme Banco do Brasil ou Crédit du Maroc
* 15 sociétés de droit français affiliées à des organes centraux, comme Banque de Nouvelle Calédonie ou Banque Palatine
* 7 sociétés de droit français affiliées à un organisme professionnel autre que la FBF, comme Fortuneo ou Saxo banque
* 43 établissements affiliés à BPCE (Banque Populaire Caisse d'Épargne)
* 40 établissements affiliés à Crédit Agricole S.A
* 10 établissements affiliés à la Confédération nationale du crédit mutuel
* 1 société coopérative de banque adhérant à la FBF
* 18 caisses de crédit municipal
Au total, on compte 197 établissements bancaires (les 4 premiers dans l'énumération) et 94 mutualiste ou coopératifs. Pour mémoire, alors que les banques commerciales sont des sociétés dont le capital est détenu par des actionnaires, les banques coopératives ou mutualistes sont contrôlées par des sociétaires qui détiennent des parts. Les autres établissements de crédit sont pour l'essentiel des sociétés financières comme Cofidis ou Laser Cofinoga.
Le rôle d'intermédiaire financier
Le rôle principal d'une banque est de collecter des ressources financières sous forme de dépôts (compte bancaire, livret A,...) et d'accorder des prêts. C'est ce que l'on appelle l'intermédiation financière; la banque peut facilement mettre en relation l'épargne des uns avec les besoins de financement des autres, tout en s'assurant de la solvabilité des emprunteurs et du bon usage des fonds prêtés (on dit que la banque réduit les asymétries d'information).
Or, la majeure partie de l'épargne nationale provient des ménages qui placent leur argent à court terme, tandis que les besoins de financement sont à moyen et long termes (investissement des entreprises, achat immobilier des ménages,...). La banque assure alors un rôle de transformation des ressources à court terme en prêts à long terme, ce qui revient en fait à faire un pari sur la stabilité des retraits de l'épargne des ménages.
En effet, si les ménages venaient à retirer leurs fonds tous en même temps, on assisterait à un phénomène de bank run (voir ce billet que j'avais écrit) qui conduirait les banques en manque de liquidités à être secourues soit par d'autres banques, soit par des institutions internationales (FMI, Banques centrales, etc.)... soit par l'État comme ce fut le cas lors de la crise des subprimes, où les États sont allés jusqu'à nationaliser des banques et offrir de confortables garanties des dépôts (100 000 euros au sein de l'Union européenne pour les espèces, jusqu'à 250 000 dollars au plus fort de la crise des subprimes aux États-unis).
Un rôle souvent négligé concernant les moyens de paiement
Une banque se doit aussi de fournir à sa clientèle des instruments de paiement sécurisés et efficaces, que ce soit des chèques, des cartes bleues ou tout simplement des billets. Imaginez un instant le monde dans lequel l'on vivrait si ces moyens de paiement n'existaient plus suite à une crise par exemple... Nous serions dès lors obligés en quelques jours de retourner au troc ! C'est pourquoi, cette fonction de fournir des moyens de paiement est très importante et relève d'un bien public.
Bien entendu, la banque joue également un rôle particulier en raison de son pouvoir de création monétaire, puisqu'elle peut créer de la monnaie sans aucune contrepartie simplement en accordant un crédit à l'un de ses clients... C'est pourquoi l'on dit souvent que les banques transforment les crédits en dépôts, ou que les crédits font les dépôts, en ce sens qu'elles créent l'argent demandé par l'emprunteur et le déposent sur son compte bancaire. On est donc loin de l'image d'Épinal d'une banque qui prête uniquement ce qu'elle a dans ses coffres ! Cela soulève du reste de nombreuses questions sur la limitation de la création monétaire et sur la régulation des banques que j'ai traitées dans les grands mécanismes de l'économie en clair.
Cette semaine, j'ai profité de mon passage sur Mirabelle TV pour évoquer cette question des banques en sortant le grand jeu sur l'euro... C'est à voir dans le Grand rendez-vous du lundi vers la 19e minute :
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