J'ai souvent parlé sur ce blog des prix aberrants atteints dans l'immobilier. Il suffit de se rappeler que, entre 1995 et 2007, treize pays de l'OCDE ont connu une hausse de 45 % des prix réels de l'immobilier. Dans le détail, les prix ont doublé en France (sic !), en Finlande et en Suède, et plus que doublé au Royaume-Uni, en Espagne et aux Pays-Bas ! Et je ne parle même pas de Dubaï avec ses îles artificielles et ses forêts de buildings...
On avait ainsi réussi à vendre sur le marché n'importe quelle bicoque au prix d'un bel appartement de centre ville... Tout le monde connaît un exemple près de chez lui qui confirme cette exubérance du marché immobilier entretenue - au moins en France - par des politiques de défiscalisation (Robien, Scellier,...), des slogans politiques incitants à devenir propriétaire à tout prix, et des dispositifs économico-sociaux favorisant l'accession à la propriété (PTZ, taux d'intérêt maintenus bas par la BCE,...).
Avec quels résultats ? Si ces dispositifs ont bien permis une augmentation du nombre de propriétaires, c'est au détriment de tout bon sens au niveau des prix. De sorte qu'aujourd'hui, il est devenu de plus en plus difficile - voire parfois impossible - de se loger dans certaines villes tant les prix ont flambé. Et ceux qui ont acheté, sont désormais souvent très endettés. Quant à la correction des prix qui devait découler de cette crise - certains parlaient de purge -, elle ne s'est pas opérée partout dans les mêmes proportions. Certaines régions françaises ont vu leur prix baisser plus que d'autres, sans pour autant conduire à une chute aussi spectaculaire qu'aux États-Unis : en moyenne, les professionnels du secteur annoncent une baisse des ventes de 30 % et une chute des prix de 8 % à 10 %, depuis 2008 en France. A titre de comparaison, le recul des prix depuis 2006 atteint 48 % à Miami et plus de 50 % à Las Vegas et Phoenix !
En Europe, la situation est elle aussi très contrastée. Tandis que certains pays traversent une crise immobilière formidable comme l'Irlande, le Royaume-Uni et l'Espagne (1 million de logements vides en Espagne construits sans qu'il y ait de demande solvable avérée), d'autres semblent y échapper. C'est le cas du Portugal où les banques se sont montrées très rigoureuses dans la distribution des crédits immobiliers. On peut également citer la Suisse qui est réputée pour être un marché très fermé avec peu de propriétaires dans la population (37,5 %).
Le marché immobilier constitue ce que j'appelle un marché du "rêve". Il suffit d'une conjonction de slogans et de dispositifs plus ou moins bien calibrés (subprimes, taux de la banque centrale bas,...) pour qu'une grande partie de la population souhaite devenir propriétaire... au moment où les prix atteignent déjà des niveaux rendant irréalisable ce rêve. C'est ce que les Américains ont bien compris tardivement lorsque les saisies et expulsions ont commencé suite aux difficultés de remboursement de leurs prêts : du rêve on est alors passé au cauchemar éveillé ! Mais qui a intérêt à dénoncer la supercherie, tant ceux qui profitent du système sont nombreux ? La petite vidéo ci-dessous était, de ce point de vue, prémonitoire...
N.B : j'animerai demain un café économique sur le thème de la pauvreté. A partir du récent rapport du Secours Catholique et des premiers chiffres provenant notamment des Restos du Coeur, on peut dire que la situation n'est guère réjouissante en France...