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22 juillet 2015 3 22 /07 /juillet /2015 12:43

 

 

Il ne vous aura pas échappé que les crises économiques et financières arrivent fréquemment durant l'été, et débutent en général après un week-end. L'été 2015 n'aura ainsi pas fait exception, puisque nous avons connu la crise grecque mais aussi le krach boursier en Chine, et encore nous ne sommes que mi-juillet !

 

Quoi qu'il en soit, après mes analyses longues et étayées de la situation en Grèce (ici et notamment) et en Chine, je me devais de vous proposer un billet plus léger en cette période de grande chaleur. En route donc vers Londres où se trouve le royaume de Kidzania...

 

Kidzania, le royaume du capitalisme pour enfants

 

Une petite vidéo pour découvrir toute la magie de Kidzania, un monde où les enfants apprennent les joies de l'asservissement au système capitaliste et où il leur faut gagner de l'argent pour vivre comme des petits-grands :

 

 

Kidzania c'est donc 7 000 m² à la gloire du capitalisme et de son messie le kidzo, monnaie officielle du royaume. Ouvert à tous les enfants de 4 à 14 ans (passé cet âge, on craint peut-être qu'ils soient capables d'esprit critique...), Kidzania propose aux enfants de trimer comme des grands pendant 25 minutes par session, cependant que leurs parents feront leurs courses juste en-dessous chez Marks & Spencer.

 

Le capitalisme triomphant

 

Bien entendu, dans ce concept tout droit importé du Mexique où pourtant les crises firent de nombreux dégâts, les promoteurs assurent qu'ils ont uniquement à coeur d'apprendre aux bambins les "valeurs de la vraie vie" et les "opportunités de carrières". Point de traces, selon eux, d'un quelconque militantisme qui consisterait à présenter aux enfants, fort réceptifs à cet âge, le capitalisme (et ses antivaleurs) comme le seul mode de production et de rapports sociaux possibles.

 

Qu'un parc d'attractions pour enfants offre du rêve, c'est sa mission première. Mais si le rêve est une pure chimère monétaire alors là je dis halte à tout, sous peine de transformer la vie des gamins en cauchemar lorsqu'ils finiront par comprendre que gagner de l'argent n'est pas synonyme de bonheur. Ne mélangez pas la sphère sociale et l'argent disaient pourtant avec sagesse les Anciens...

 

D'ailleurs, la direction du parc leur expliquera-t-elle que, même avec toute la bonne volonté du monde, certaines personnes n'arrivent pas à trouver un emploi suffisamment rémunérateur ? Va-t-elle leur expliquer que, en dehors des métiers de la finance et d'une infime part du show-biz (sport inclus), le Royaume-Uni n'offre pas la possibilité de gagner des millions d'euros par son travail, sauf à pratiquer des activités moralement répréhensibles ? De tout cela il ne sera évidemment pas question, puisque le directeur de la franchise affirme de manière péremptoire qu'il faut gagner de l'argent pour "profiter de la vie" (sic !).

 

Quant aux questions de soutenabilité des modèles économiques basés sur la consommation de masse, il n'en entendront pas parler bien sûr ; pas un mot non plus sur le don, acte hautement altruiste et même religieux puisque parole d'Évangile ; quant à l'économie du partage, dont le développement est actuellement phénoménal, on taira probablement même le nom pour éviter de donner aux enfants l'idée qu'un autre monde que celui de la consommation est possible.

 

Mettre l'individualisme à l'honneur, sous sa forme la plus vile, la consommation, est pour les promoteurs du parc une façon efficace de faire du marketing et du placement de marques auprès des enfants. Car n'oublions pas que les grandes enseignes qui sont représentées (H&M, British Airways, etc.) cherchent évidemment à obtenir un retour sur l'investissement auquel elles ont consenti pour être présente dans le royaume de l'abrutissement.

 

Vous noterez par ailleurs que, à l'instar de tout bon système capitaliste, on y trouve une banque où les bambins peuvent déposer leur argent et même acheter une carte de crédit. Ce que le reportage ne dit pas, c'est si certains enfants ont le droit de jouer au trader fou ou à l'escroc financier type Madoff, afin, bien entendu, de gagner de l'argent comme dans la vraie vie... Au reste, le royaume de Kidzania peut-il connaître une crise financière et bancaire ? Bien sûr que non, puisque la finance libéralisée et dérégulée s'autorégule comme nous le savons tous depuis 2007 !

 

J'imagine qu'un tel concept doit particulièrement plaire au ministre de l'économie en France, Emmanuel Macron, lui qui avait souhaité que les jeunes ambitionnent de devenir milliardaires ! Vous savez, le même qui avait expliqué à Elise Lucet que l'État n'a pas à se mêler de la politique financière et salariale des entreprises. Au fait, pourquoi je vous parle de Macron ? Tout simplement parce qu'il n'est pas impossible que ce magnifique parc ouvre un jour en France... On n'arrête pas le progrès !

 

N.B : l'image de ce billet provient d'un article du site http://lesbeauxdimanches.hautetfort.com

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15 juillet 2015 3 15 /07 /juillet /2015 12:14

 

 

Dans un précédent billet, j'avais expliqué pourquoi les négociations entre la Grèce et ses créanciers étaient depuis des mois dans l'impasse, ce qui rendait envisageable, et envisagé, que la Grèce quitte la zone euro. Puis le gouvernement grec en vint à refuser l'ultimatum posé par l'Eurogroupe, fin juin, et à organiser un référendum sur le plan des créanciers, le 5 juillet. J'avais alors rédigé une petite analyse sur ce référendum, que je concluais en affirmant que c'est bien la zone euro qui est arrivée au bord du précipice et pas seulement la Grèce !

 

Et bien aujourd'hui, je ne retire pas un mot de ma conclusion, car celle-ci s'avère encore plus vraie que jamais : la Grèce a capitulé devant l'Eurogroupe, mais désormais plus rien ne sera pareil au sein de la zone euro, car cet épisode a démontré que l'Euro n'était pas irréversible...

 

L'Eurogroupe et la BCE contre la démocratie !

 

15,3 milliards de liquidités en échange d’un engagement immédiat sur un certain nombre de mesures d'austérité, dont le seul effet eût été de plomber encore plus l'activité dans le pays si activité il reste ? Telle était la proposition-diktat avancée par l'Eurogroupe fin juin, qui achevait de démontrer que chez les technocrates, l'Euro ne peut se penser qu'en des termes financiers. Exit donc toutes velléités de changements politiques, sociaux et économiques.

 

C'est d'ailleurs la notion même de démocratie que l'Europe technocratique ne peut supporter, comme en témoigne cette saillie de Jean-Claude Juncker dans un entretien au Figaro le 29 janvier dernier : "dire que tout va changer parce qu’il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c’est prendre ses désirs pour des réalités. [...]   Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens". Bienvenue dans l'Union européenne pénitentiaire dont on ne s'échappe pas !

 

Les propositions inacceptables faites à la Grèce, qui dépassent largement la ligne rouge fixée par le gouvernement, expliquent pourquoi le Premier ministre grec n'avait dès lors plus d'autre choix que de redonner la parole au peuple. Et celui-ci s'est prononcé majoritairement contre les conditions exigées par les créanciers. Et c'est là que tout a hélas dérapé...

 

La capitulation

 

Ce non au référendum, alors même que le oui avait joui de tellement de relais dans les médias que l'on finissait par le donner vainqueur, a fait renaître quelques espoirs dans les coeurs de ceux qui imaginent encore possible une autre Union européenne.

 

 

[ Source : France TV info ]

 

On savait alors qu'il y aurait un avis de gros temps sur la zone euro, mais personne ne s'attendait visiblement à ce que, moins de 3 jours après le référendum qui lui a donné un mandat clair pour mettre un terme à l'austérité, Alexis Tsipras en vienne à négocier sa reddition avec l'Eurogroupe.

 

Reddition ? Non, capitulation ! En effet, le programme accepté le 13 juillet par le Premier ministre grec ressemble beaucoup à celui du mois de juin, mais en pire ! Quel était donc l'intérêt d'avoir entretenu pendant trois semaines un tel psychodrame en Europe pour en revenir finalement au même point ?

 

C'est que les représentants de la Troïka avaient très vite compris que Tsipras ne voulait pas réellement prendre le risque de sortir de l'euro, même si cela signifiait trahir son programme politique. C'est d'ailleurs ce qu'il a confirmé depuis en déclarant à la presse "j'assume la responsabilité pour un texte auquel je ne crois pas mais je le signe pour éviter tout désastre au pays" ! Dès lors, l'histoire était déjà écrite et il ne lui restait donc plus qu'à négocier sa capitulation, i.e. accepter toutes les conditions posées par l'Eurogroupe.

 

Dans le détail, en échange d'une nouvelle "aide" de 80 à 86 milliards d'euros, qui s'appuiera notamment sur le Mécanisme européen de stabilité (MES), la Grèce doit s'engager sur les points suivants :

 

 * d'ici le 15 juillet, le gouvernement grec doit réformer et simplifier la TVA, réformer le système de retraite (= baisser les pensions de retraite ?), garantir l’indépendance de l’Elstat, l’organisme des statistiques grec ;

 

 * d'ici le 22 juillet, le gouvernement grec devra réformer son code de procédure civile afin d'accélérer les procédures et d’en réduire les coûts, et transposer dans sa législation les nouvelles règles de renflouement des banques ;

 

 * présenter un calendrier crédible pour les autres réformes exigées (système de retraite, réduction du coût de la fonction publique, privatisations, droit du travail, libéralisation financière, etc.)

 

 * création d'un fonds chargé de lever 50 milliards d'euros (sic !) en privatisant les actifs grecs. Ce fonds sera sous contrôle des autorités européennes, ce qui revient à dire que la Grèce est de facto dépossédée de ses actifs et placée sous tutelle internationale ! Maigre consolation, Tsipras obtient que 12,5 milliards d'euros de ce fonds servent à soutenir l'investissement en Grèce ; le reste servira à restructurer les banques (25 milliards d'euros) et au service de la dette (12,5 milliards d'euros).

 

Voici le texte intégral de l'accord (il prend quelques instants à s'afficher ci-dessous), traduit en français par Politis :

 

 

 

La zone euro-technocratique

 

Les conditions de ce nouveau plan d'aide se veulent donc humiliantes et même punitives. Et encore, les négociations ne pourront être entamées qu'après l'aval de plusieurs parlements nationaux de l'UE, ce qui signifie que le nouveau plan ne prendra effet que d'ici quelques semaines. D'ici là, un crédit relais pourrait être accordé généreusement à la Grèce pour faire face à ses obligations financières du mois de juillet...

 

Quant à l'emploi des mots "aide" pour désigner en fait des prêts remboursables, "compromis" pour parler d'une déroute  et "accord" pour évoquer une capitulation, cela me fait inévitablement penser à la novlangue d'Orwell... Bienvenue en Océania euro-technocratique ! Vous noterez du reste que le FMI fait son grand retour, ce qui prouve au demeurant que les Européens sont toujours incapables de résoudre leurs problèmes par eux-mêmes.

 

Il faut donc le dire sans ambages : l'Eurogroupe a réussi à faire un exemple pour tous ceux qui chercheraient à contester l'idéologie néolibérale qui préside dans la zone euro. Pire, cet accord de capitulation démontre que, par construction, l'Euro n'est viable que si l'austérité est généralisée au détriment des peuples. C'est d'ailleurs ce qu'avait compris le journal allemand Tageszeitung qui, dans sa une du 5 janvier dernier, avait rappelé les règles de fonctionnement de la zone euro :

 

 

[ Source : http://www.nachdenkseiten.de ]

 

Pour ceux qui ne comprennent pas l'allemand, le titre peut être traduit de la sorte : "L'état major de l'Europuissance annonce". Et parmi les règles énoncées, la 1 stipule que "la Grèce doit faire des économies", la 4 que "la démocratie, il faut pouvoir se la payer", la 5 que "le vote pour des partis non autorisés est strictement interdit" et pour se faire plaisir la 6 "les ordres de l'état-major doivent être suivis sans conditions". N'est-ce pas un magnifique résumé de l'accord-capitulation signé par la Grèce ?

 

Deux prix Nobel d'économie, Joseph Stiglitz et Paul Krugman, s'étaient déjà fendus de nombreux pamphlets contre l'austérité. Et là, ils récidivent, le premier déclarant dans cet entretien que "l'Allemagne a porté un coup sévère et ébranlé l’Europe", le second dans le New York Times que "les efforts demandés dépassent la sévérité, ils recèlent un esprit de vengeance, la destruction totale de la souveraineté nationale et effacent tout espoir de soulagement”.

 

Et maintenant ?

 

François Hollande, dont on sait maintenant qu'il a officié en coulisses pour qu'un accord soit trouvé (quitte pour cela à envoyer des énarques rédiger l'accord à la place des Grecs...), peut s'estimer heureux puisque pour lui le plus important était que la Grèce reste dans la zone euro.

 

Et cela même si pour la Grèce, rester dans la zone euro signifie ployer sous encore plus d'austérité et plonger l'économie dans une dépression sans fin, d'où sortiront immanquablement un jour des forces politiques tyranniques qui mèneront le pays à la ruine politique. Cette paix économique provisoire dans la zone euro, achetée à prix d'or, a donc toutes les caractéristiques de la paix carthaginoise !

 

De même, l'Allemagne a prouvé que son leadership européen n'était pas entamé.et que, in fine, c'est toujours sa position qui prévaut quand bien même celle-ci va à l'encontre du bon sens économique et politique. Car, lecteurs, n'oubliez pas que la Grèce reste insolvable et que ce ne sont pas les "reprofilages" de la dette publique, entendez par là prolongement de la maturité des dettes et baisse des taux, qui vont y changer quelque chose. Seule une annulation partielle de dettes serait à même de permettre éventuellement de remettre le pays à flot économiquement, comme vient de l'annoncer le FMI.

 

C'est du reste pour cela que Yanis Varoufakis a démissionné, contre toute attente, le lendemain de la victoire au référendum. Dans un entretien au magazine britannique New Statesman, il a ainsi révélé que sa position avait été mise en minorité au sein même du cabinet gouvernemental. Plus précisément, il préconisait d'émettre des créances-monnaies (IOU dans le jargon...) et même de prendre le contrôle de la Banque centrale de Grèce si cela s'avérait nécessaire, conformément à une disposition d'urgence prévue par la Constitution. Or, Alexis Tsipras semblait déjà s'être décidé à passer sous les fourches caudines de l'Eurogroupe...

 

C'est pourtant pure folie que de s'engager à dégager plusieurs années de suite un excédent budgétaire primaire lorsque le pays est en récession (dépression est le mot adéquat en économie...) ; c'est aussi pure folie que de chercher à augmenter la TVA dans un pays où le principal problème est l'assiette fiscale ; c'est pure folie que de vouloir encore baisser les dépenses publiques et les revenus alors que la demande est en berne...

 

En fin de compte, la grande illusion sur la soutenabilité de la dette publique se poursuit et c'est la grande saignée que les institutions européennes continuent à prescrire au malade ! Le résultat est déjà prévisible : effondrement de l'activité qui n'existe déjà quasiment plus, hausse du taux d'endettement public, nouvelles mesures d'austérité correctives pour tenir les objectifs de la Troïka, etc. Dans le etc. on peut inclure la révolte, la rage et la révolution.

 

Le pire dans tout cela, c'est que de nombreux Grecs, surtout les plus jeunes, ont cru que leur vote pouvait peser sur la destinée de leur pays. Les dirigeants politiques européens ne mesurent pas bien les conséquences qu'une telle amertume des jeunes va avoir sur le fonctionnement du pays les deux prochaines décennies. Car après ce référendum et la capitulation qui s'est ensuivie, c'est vers une grave crise politique que l'on se dirige, qui commence déjà au sein de Syriza.

 

Désormais le projet de monnaie unique a ainsi montré son vrai visage : l'union mais seulement dans la force, la paix mais seulement en accord avec les traités, la solidarité mais seulement pour la finance privée. Et comme la Grèce est endettée pour plusieurs décennies, je vous laisse imaginer ce qu'il en sera lorsqu'il faudra remettre l'ouvrage sur le métier...

 

Conclusion : la capitulation de Tsipras prouve que, par idéologie, la zone euro ne peut être réformée, même si cela serait profitable aux peuples. C'est à prendre ou à laisser répètent en coeur les faucons de l'austérité. Tout est dit, fermez le ban !

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10 juillet 2015 5 10 /07 /juillet /2015 12:43

 

 

Après avoir rendu compte sur ce blog, pendant plusieurs semaines, de l'évolution de la situation en Grèce (voir entre autres ce billet ou bien celui-là), il m'a semblé utile de rédiger un billet sur la krach boursier en Chine, totalement occulté par le psychodrame et le coup de force qui se jouent au sein de la zone euro. Et ce d'autant plus que les auditeurs de la cafet'éco de Sarreguemines avaient eu le droit à un cours, où je leur avais expliqué pourquoi la Chine était à la veille d'une crise majeure...

 

Les faits

 

Après une longue période de baisse, le marché des actions en Chine était reparti à la hausse depuis un an. Mais depuis trois semaines, on assiste à un retournement spectaculaire du cours des actions sur les marchés chinois, avec une chute moyenne  de près de 30 %, c'est-à-dire que 3 000 milliards de dollars se sont ainsi évaporés :

 

Évolution de l'indice boursier de Shanghai depuis 1 an

 

 

[ Source : Bloomberg ]

 

Bien entendu, comme la Bourse de Hong Kong est intimement liée à celle de Shanghai, les tendances furent assez similaires :

 

Évolution de l'indice boursier de Hong Kong sur 1 an

 

 

[ Source : Bloomberg ]

 

Les causes du krach

 

Cette chute impressionnante des cours en trois semaines est le résultat des ventes massives d'actions, dues à plusieurs facteurs :

 

 * des doutes sur la poursuite d'une politique monétaire expansionniste. En effet, le gouvernement avait considérablement assoupli sa politique monétaire suite au ralentissement sensible de l'activité dans le pays, ralentissement dont les signes sont déjà visibles sur les exportations chinoises, la production industrielle (en berne) et le prix des matières premières dans le monde (en baisse).

 

 * après avoir encouragé le financement par les marchés financiers (décloisonnement entre les marchés de Hong Kong et de Shanghai, relâchement des conditions d'investissement des sociétés d'assurance, etc.), les autorités chinoises, qui espéraient ainsi que les entreprises nationales puissent obtenir plus de fonds propres et relancer leur activité en berne, ont décidé de juguler la spéculation. Pour ce faire, le régulateur chinois a décidé de durcir les conditions de recours aux opérations sur marge, c'est-à-dire pour faire simple les achats d'actions par endettement. Effet de levier, quand tu nous tiens !

 

 * comme je l'ai déjà expliqué sur mon blog, l'immobilier en Chine est une énorme bulle, qui va exploser très prochainement, d'autant que les prix de l'immobilier ont déjà commencé à baisser. Les investisseurs se sont alors décalés du marché immobilier à celui des actions, soutenus en cela par les taux d'intérêt bas.

 

 * lorsque les investisseurs voient l'indice taper le sommet symbolique de 5 000 points, ils souhaitent réaliser leurs profits. N'oublions pas qu'en Chine, investir en Bourse est un véritable sport national (on évoque souvent 80 % d'investisseurs individuels sur les valeurs cotées en catégorie A !), que les ménages pratiquent volontiers même à crédit... D'où près d'un quart des actions qui s'échangent au moyen d'emprunts contractés par des particuliers, ce qui n'est pas sans rappeler la situation qui prévalait aux États-Unis en 1929 !

 

Dès lors, lorsqu'une mauvaise nouvelle ou une contrainte supplémentaire vient faire douter les investisseurs du potentiel de croissance supplémentaire du marché, certains se mettent à revendre leurs titres, rapidement suivis par de très nombreux autres qui suivent mimétiquement le mouvement : c'est ce qu'on appelle précisément une panique boursière !

 

Quelle est la réaction des autorités chinoises ?

 

Les autorités de régulation chinoises ne semblent pas avoir vu venir le tsunami, comme en témoigne leur propre panique à imaginer une réponse adéquate. Il est vrai que la question grecque occupe l'attention de beaucoup de décideurs économiques, au point d'en oublier que la finance dérégulée est toujours une bombe à retardement.

 

Or, s'il y a bien une leçon a retenir du passé c'est que, dans la panique, on assiste toujours dans ces situations à une déflation par la dette, c'est-à-dire que les investisseurs endettés vendent massivement leurs titres pour tenter de rembourser les prêts contractés auprès des brockers, ce qui accélère encore la chute des cours...

 

Comprenant que la situation devenait très grave, les autorités chinoises ont alors annoncé plusieurs mesures pour tenter d'enrayer la baisse des cours :

 

 * création d'un fonds de stabilisation financière, afin d'aider les courtiers à racheter des titres jusqu'à ce que l'indice de Shanghai revienne à 5 000 points ;

 

 * interdiction pour les investisseurs étrangers de vendre à découvert dans la catégorie A ;

 

 * interdiction pour les investisseurs qui possèdent plus de 5 % dans des sociétés chinoises cotées de vendre leurs titres pendant six mois ;

 

 * injection de liquidités dans les sociétés de financement de marge, en contrepartie de l'engagement à acheter également des actions de grandes entreprises d'État ;

 

 * près de la moitié des actions ont été suspendues de la cotation.

 

Malheureusement, en plus d'être inefficaces dans le cas d'un mouvement de panique, ces mesures risquent d'aboutir à un résultat encore pire. Par exemple, en raison de la suspension de la moitié des actions, on peut imaginer qu'un investisseur à court de liquidités se verra contraint de vendre massivement ses titres encore cotés, ce qui déprimera encore plus le marché.

 

Toute la question est désormais de savoir si cette chute des cours peut être enrayée rapidement et si les conséquences sur l'économie réelle ne seront pas trop graves. Enfin, je ne vous parle même pas des faillites personnelles et autres restructurations de dettes qui auront lieu, en particulier celles des administrations locales, véritables machines à faire de la dette opaque... N'est-ce pas la preuve que la finance livrée à elle-même conduit aux plus grands désordres ?

 

N.B : l'image de ce billet provient d'un article du site Business Insider Australia 

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3 juillet 2015 5 03 /07 /juillet /2015 14:36

 

 

Le référendum voulu par le gouvernement grec décidera, ce dimanche 5 juillet, de l'avenir du pays au sein de la zone euro. En effet, même si l'intitulé de la question est connu et porte sur le plan des créanciers, ce référendum sera inévitablement celui du maintien ou non dans l'Euro. C'est du reste ce que Jean-Claude Juncker, ancien chef de paradis fiscal et donc très proche des préoccupations des peuples, s'est empressé de faire passer comme message.

 

La zone euro privilégie les capitaux aux Hommes

 

Comme je l'écrivais dans mon précédent billet, Alexis Tsipras est probablement allé au bout de ce qu’il pouvait faire pour son pays. Sa lutte contre l'austérité, qui aura duré 5 mois, a mis au grand jour le dogmatisme de l'Eurogroupe et le peu de cas que les institutions européennes font de la démocratie.

 

D'une certaine façon, les dirigeants politiques ont cherché à créer une Union européenne sans les peuples, comme si ces derniers étaient réputés consentir à toutes les décisions et réformes. La monnaie unique est alors arrivée comme la cerise sur un soufflet, qui a fait retomber l'ensemble au rang de simple zone de libre-échange (ce qui est loin de déplaire au Royaume-Uni), démontrant au passage que les institutions européennes sont faibles et la construction de la zone si peu aboutie, qu'elle n'est même pas en mesure de faire face à une crise.

 

Cette volonté de réaliser l'Europe des capitaux avant celle des Hommes est devenue évidente en 2005, lors du référendum sur le traité constitutionnel où le non français a eu pour seul écho le traité de Lisbonne. Puis les choses se sont aggravées avec le TSCG, dont l'objectif purement financier est d'aboutir à l'équilibre des budgets nationaux, selon les voeux des faucons allemands. Qui se souvient d'ailleurs que lors de la campagne présidentielle, François Hollande avait annoncé sa volonté de renégocier le TSCG pour y ajouter des dispositions relatives à la croissance ? il est vrai qu'au vu des piètres résultats obtenues, il vaut peut-être mieux ne plus en parler...

 

Les dirigeants politiques de l'Union européenne s'obstinent ainsi depuis une décennie (2 ?) à mettre en place une austérité généralisée, seule à même de sauver la construction européenne selon eux. Dit autrement, la grande saignée devait déboucher sur un renouveau de l'Europe, car les citoyens retrouveraient confiance dans une Union européenne désendettée et mise au pas par les traités. Mais comme toujours avec ce genre de promesse, il y a loin de la coupe aux lèvres...

 

Enfin, l'omerta qui règne au sujet du traité transatlantique et les pitoyables négociations-oukases avec les pays en difficultés financières (Grèce, certes, mais aussi Irlande par exemple), ont achevé de démontrer que la démocratie n'avait pas droit de cité dans les rencontres de l'Eurogroupe et plus généralement du Conseil européen.

 

La Grèce a fait d'énormes efforts

 

Si l'on regarde l'indicateur de l'excédent budgétaire primaire, c'est-à-dire le solde entre dépenses  et recettes de l'État, avant paiement des intérêts à verser sur la dette publique, alors on peut voir sur la graphique ci-dessous que la Grèce a fait d'énormes efforts, contrairement à ce que certains affirment :

 

 

[ Source : Alternatives Économiques ]

 

La Grèce a même réussi à dégager un excédent budgétaire primaire structurel, c'est à dire corrigé des effets de la conjoncture, ce qui signifie que le pays dégage suffisamment de ressources pour se désendetter. Notez a contrario la situation au Royaume-Uni et en France...

 

Mais pour arriver à ce résultat, le pays s'est vu imposer un plan d'austérité drastique sur les conseils avisés de la Troïka, dont les effets sont cataclysmiques :

 

 

[ Source : Okeanews.fr ]

 

L'Eurogroupe et la BCE contre la démocratie !

 

Cette Union européenne technocratique, qui a cherché un semblant de légitimité dans une association contre nature avec le FMI dans le cadre de la tristement célèbre Troïka, a fait des ravages ! Elle pensait d'ailleurs poursuivre dans cette voie, mais c'était sans compter sur le trublion grec, qui a décidé de faire valoir les intérêts de son peuple avant ceux de ses créanciers.

 

On sait désormais, contrairement à l'ignoble campagne de presse menée contre lui, qu'Alexis Tsipras a fait des propositions sérieuses et concrètes à l'Eurogroupe, qui sont résumées dans cet article de l'Humanité. On y découvre que le gouvernement grec a de facto accepté un surcroît d'austérité, pour complaire à ses créanciers partenaires européens. En gage de bonne volonté, il a même évoqué la possibilité d'abandonner son référendum si l'Eurogroupe accepte de s'engager sur une restructuration de la dette publique grecque.

 

Il faut donc le dire sans ambages : l'Eurogroupe cherche, à mon sens, à avoir la tête du gouvernement grec (élu démocratiquement, faut-il le rappeler ?), afin de faire un exemple pour tous ceux qui chercheraient à contester l'idéologie sous-jacente dans les plans d'aide européens. C'est ce que pensent également deux prix Nobel d'économie, Joseph Stiglitz et Paul Krugman.

 

Le premier déclare ainsi, dans un article de Project Syndicate, que "les dirigeants européens finissent par exposer au grand jour la véritable nature du conflit autour de la dette grecque, et cela n'a rien de plaisant : il s'agit bien plus une question de pouvoir et de démocratie que d'argent et d'économie". Le second, avec son mordant habituel, appelle, dans une tribune au New York Times, les Grecs à voter "non" au référendum de dimanche, affirmant que "céder à l’ultimatum de la troïka serait l’abandon ultime de toute idée d’une soi-disant indépendance de la Grèce" !

 

Au reste, Jean-Claude Juncker n'avait-il pas été explicite sur le rang subordonné qu'il accorde à la démocratie, dans un entretien au Figaro le 29 janvier dernier ? Pour mémoire, en réponse à la question de la restructuration de la dette publique grecque, Juncker déclarait "dire que tout va changer parce qu’il y a un nouveau gouvernement à Athènes, c’est prendre ses désirs pour des réalités. [...]   Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens". Sidérant...

 

Pourtant, et il n'y a pas d'économiste sérieux pour affirmer le contraire, c'est pure folie que de s'engager à dégager plusieurs années de suite un excédent budgétaire primaire lorsque le pays est en récession (dépression est le mot adéquat en économie...) ; c'est aussi pure folie que de chercher à augmenter la TVA sur le seul (quasiment...) secteur exportateur de la Grèce, à savoir le tourisme ; c'est pure folie que de vouloir encore baisser les dépenses publiques et les revenus alors que la demande est en berne...

 

Quant à la BCE, en n'augmentant pas le plafond des aides d'urgence ELA (voir mon précédent billet pour comprendre ce que sont les aides ELA), malgré les fuites de capitaux, elle a précipité le gouvernement grec vers la solution extrême d'un contrôle de capitaux doublé d'une fermeture des banques.

 

D'ailleurs, si l'on prend le temps de lire l'entretien accordée par Benoît Cœuré, membre du directoire de la BCE, au quotidien Les Échos, on comprend l'insondable bêtise dogmatique de la BCE... Une perle de cet entretien, pour ceux qui n'auraient pas le temps de le lire en entier : "la question n’est donc pas de savoir s’il faut réaménager la dette mais s’il est utile pour la Grèce de la réaménager une quatrième fois. Le plus important pour l’avenir de la Grèce, c’est de récréer de la croissance". Évidemment, la sacro-sainte croissance pour un pays en dépression !

 

La nécessité du référendum en désespoir de cause

 

Ces propositions inacceptables, qui dépassent largement la ligne rouge que s'était fixé le gouvernement, expliquent pourquoi le Premier ministre grec n'avait dès lors plus d'autre choix que de redonner la parole au peuple, qui devra se prononcer sur son avenir dans la zone euro au vu des conditions exigées par les créanciers. Après moult versions, il semble désormais acquis que la question de ce référendum sera la suivante : " Faut-il accepter le projet d’accord soumis le 25 juin 2015 par la Commission européenne, la BCE et le FMI ? ".

 

Cette question soulève immédiatement de nombreuses remarques. Tout d'abord, sa formulation laisse à penser que le projet d'accord est définitif, alors que nous venons de voir que le gouvernement grec était prêt à l'amender à la condition expresse de restructurer la dette publique. De plus, ma crainte est que de nombreux citoyens ne connaissent pas exactement l'enjeu de ces négociations car, il faut l'avouer, même les économistes ont désormais du mal à s'y retrouver au vu de la complexité du sujet. D'où la nécessité d'une campagne d'au moins un mois, règle générale et constitutionnelle, afin de permettre le débat d'idées.

 

Le danger est alors que les passions l'emportent sur la raison - d'autant qu'il n'y aura pas de campagne mais juste un gouvernement qui appelle à voter non - , c'est-à-dire que la peur de l'inconnu conduise un peuple, pourtant opprimé, à accepter de son plein gré l'estocade de ses créanciers... Le ministre des finances, le célèbre Yanis Varoufakis, a du reste mis son poste dans la balance, déclarant qu'il démissionnerait si le oui devait l'emporter.

 

L'après référendum

 

L'infographie ci-dessous résume assez bien les scénarios possibles (cliquez sur l'image pour l'agrandir) :

 

 

[ Source : Le Huffington Post ]

 

En définitive, je renouvelle les propos de mes précédents billets : cette fois, c'est bien la zone euro qui est arrivée au bord du précipice et pas seulement la Grèce !

 

N.B : l'image de ce billet provient du site http://www.audit-citoyen.org

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28 juin 2015 7 28 /06 /juin /2015 18:54

 

 

Cette fois la zone euro est arrivée au bord du précipice : la Grèce vient de refuser l'ultimatum posé par l'Eurogroupe, qui consistait à lui fournir 15,3 milliards de liquidités en échange d’un engagement immédiat sur un certain nombre de mesures d'austérité, dont le seul effet eût été de plomber encore plus l'activité dans le pays si activité il reste. Le président de l’Eurogroupe a alors décidé de poursuivre la réunion en l’absence d’un représentant de l’État grec, ce qui revient à exclure manifestement la Grèce de cette instance informelle.

 

En désespoir de cause, le Premier ministre grec a décidé l'organisation d'un référendum, le 5 juillet prochain, sur le plan proposé par les créanciers :

 

 

Les conséquences de l'échec des négociations

 

En cas de défaut sur le remboursement des 1 600 millions d'euros dus au FMI avant le 30 juin, certes les agences de notation laissent entendre qu'elles ne le considéreront pas comme un défaut de paiement, mais aux yeux de tous l'événement sera vu à sa juste valeur. Et ce même si le FMI prendra plusieurs semaines avant de déclarer sa créance en défaut.

 

Dès lors, on assisterait à une accélération massive des sorties de capitaux et retraits de dépôt bancaires, mouvement déjà entamé depuis des mois. Ne perdons pas de vue que, depuis 2010, ce sont plus de 80 milliards d’euros qui ont quitté le pays ! Toute la question serait alors de savoir si la BCE continuera à fournir des liquidités aux banques grecques, au travers de la facilité d’urgence aux établissements de crédit, appelée ELA (Emergency Liquidity Assistance) dans le jargon.

 

Qu'appelle-t-on ELA ?

 

Un document de la BCE explique la procédure en détail, mais pour notre propos il suffit de savoir que c'est un moyen de fournir d'urgence des liquidités aux établissements de crédit d'un pays membre de la zone euro.

 

Plus précisément, conformément à l'article 14.4 du SEBC, "le dispositif ELA prévoit la fourniture par une banque centrale nationale de l’Eurosystème de monnaie de banque centrale et/ou de toute autre assistance pouvant entraîner une augmentation de la monnaie de banque centrale à une institution financière solvable, ou à un groupe d’institutions financières solvables, devant faire face à des problèmes de liquidité temporaires, sans que ces opérations n’entrent dans le cadre de la politique monétaire unique. La responsabilité de l’octroi de facilités d’urgence incombe à la/aux BCN concernée(s). Cela signifie que celle(s)-ci assume(nt) les coûts et les risques liés à la fourniture de liquidité d’urgence".

 

Ainsi, c'est la Banque centrale de Grèce qui fournit cette liquidité aux banques grecques, sous le contrôle très strict évidemment de la BCE. Le point important est que cette aide, temporaire - mais qui dure depuis des mois en Grèce et dont le plafond n'a cessé d'être augmenté à près de 90 milliards actuellement -, est conditionnée à la solvabilité des banques aidées.

 

Or, l'état des banques grecques n'est pas brillant avec la quantité de créances douteuses et litigieuses dans leur bilan. De plus, elles ont acheté beaucoup de titres d'État, qui peuvent devenir bien plus qu'une épée de Damoclès si l'État grec fait officiellement défaut sur une partie de sa dette publique. Car rappelons que ces titres, achetés par les banques nationales, sont le seul moyen autonome de financement de l'État grec, puisque le pays n'a plus accès aux marchés financiers.

 

Mais sans liquidités en euros, le Grexit (sortie de la Grèce de l'Euro) deviendrait par conséquent réalité, même si les Grecs ne souhaitaient pas quitter la zone euro. Ce qui n'était pas prévu de jure, car les traités ne prévoient pas la sortie d'un État de la zone euro, le deviendrait donc de facto ! En effet, pour faire fonctionner son économie, si elle est privée de la monnaie unique, la Banque centrale de Grèce devra impérativement lui trouver un substitut au plus vite...

 

Le contrôle des capitaux indispensable

 

L'annonce d'un référendum pour le 5 juillet, le défaut annoncé du 30 juin et le possible arrêt (ou durcissement, plus probablement) de la fourniture de liquidités par le moyen de l'ELA, vont certainement nécessiter la mise en place d'un contrôle des capitaux, afin de juguler les sorties de capitaux du pays et les retraits bancaires trop massifs.

 

En effet, si tous les clients se mettent à retirer au plus vite leurs dépôts de peur que leur banque ne fasse faillite, alors la banque court le risque d'être à court de liquidités (car elle ne possède pas assez de billets pour rembourser tout le monde) et devenir effectivement insolvable, même si elle ne l'était pas au début. C'est précisément ce que l'on appelle une prophétie auto-réalisatrice.

 

L'exemple de Chypre en mars 2013, où les banques ont fermé pendant 12 jours, est bien entendu dans toutes les têtes. Certains pensent d'ailleurs qu'un tel contrôle des capitaux pourrait être annoncé dès ce lundi, en raison de la panique qui pourrait se déclencher après ce week-end où même la BCE a réuni son conseil des gouverneurs un dimanche !

 

Le plus triste est que cette mesure toucherait en priorité la vie des petites gens et des petites entreprises nationales, et qu'elle durerait certainement assez longtemps eu égard au climat économique tendu. A Chypres, ce fut 2 ans !

 

Les grandes fortunes et les grands groupes ne seront, quant à eux, que peu pénalisés par ces restrictions, puisqu'ils ont déjà déplacé leurs capitaux dans d'autres pays, en particulier en Allemagne... ce qui ne manque pas d'ironie, lorsqu'on connaît les mauvaises relations qu'entretiennent le gouvernement grec et le gouvernement allemand. Mais comme le rappelait l'empereur Vespasien, Pecunia non olet !

 

Le référendum

 

Alexis Tsipras est probablement allé, en tout état de cause, au bout de ce qu’il pouvait faire pour son pays. Sa lutte contre l'austérité, qui aura duré 5 mois, a mis au grand jour le dogmatisme de l'Eurogroupe et le peu de cas que les institutions européennes font de la démocratie.

 

D'une certaine façon, les dirigeants politiques ont cherché à créer une Union européenne sans les peuples, comme si ces derniers étaient réputés consentir à toutes les décisions et réformes. Cette crise est aussi le fruit d'une expansion trop rapide et trop vaste de l'UE, qui plutôt que de consolider l'existant a voulu créer très vite une zone politique, économique et monétaire de premier plan. Un vrai gâchis donc pour le projet humainiste !

 

Le Premier ministre grec n'avait alors d'autre choix que de redonner la parole au peuple, qui devra se prononcer sur son avenir dans la zone euro, au vu des conditions exigées par les créanciers. Bien entendu, qu'on le veuille ou non, ce référendum sera celui du maintien ou non dans l'Euro et montre bien que, in fine, les questions économiques sont toujours des questions politiques. Quant aux commentaires, certains n'ont pas ménagé leurs mots pour conspuer ce référendum !

 

En définitive, ceux qui affirment découvrir que nous sommes désormais au bord du précipice sont, sinon des ignorants qui ont vécu 5 ans dans un grotte platonicienne, plus certainement des menteurs qui s'accomodaient de cette situation favorable à leurs intérêts égoïstes. Cela fait d'ailleurs 4 ans que je répète à l'envi que, si les créanciers n'annulent pas une partie substantielle de la dette publique grecque et ne l'aide pas à créer une base productive, alors la catastrophe sera au bout du chemin.

 

Nous disposons pourtant d'un travail important mené par la Commission pour la vérité sur la dette publique grecque. Celle-ci vient de rendre son rapport préliminaire, et sa conclusion est limpide : la dette grecque est en grande partie illégale, illégitime et odieuse !

 

Récemment, une auditrice de l'une de mes conférences m'avait trouvé trop pessimiste quand j'exposais la question grecque. Le résultat est pourtant là et ma conclusion reste la même que dans mon précédent billet : qui peut croire qu'un peuple, qui a connu la dictature politique, puisse accepter encore longtemps la tyrannie économique, qui débouche sur le chaos social ?

 

Hélas, dans le cas présent, et contrairement à ce que laissent entendre les politiques comme Manuel Valls ou Angela Merkel, une sortie de la Grèce de la zone euro serait un échec cuisant pour la construction européenne et un saut dans le vide !

 

Dans ce cas, le mécanisme de sortie ordonnée de la zone euro, que j'avais présenté dans plusieurs conférences et évoqué brièvement dans cette vidéo, ne sera plus qu'une chimère. La place sera lors toute chaude pour les partis politiques extrémistes...

 

Une fois n'est pas coutume, terminons ce billet avec un peu de musique :

 

 

N.B : l'image de ce billet provient d'un article d'ATTAC.

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19 juin 2015 5 19 /06 /juin /2015 13:28

 

 

Les négociations entre la Grèce et ses créanciers, qui s'apparentent davantage à un conflit ouvert, sont depuis des mois dans l'impasse. A tel point que l'échec de la réunion d'hier était prévisible et qu'il est désormais envisageable, et envisagé, que la Grèce quitte la zone euro. Mais comment a-t-on pu en arriver là ? Qui sont les créanciers de la Grèce ? Quelles seraient les conséquences d'un Grexit ? Autant de questions auxquelles je vais chercher à apporter une réponse dans ce billet, certes un peu long, mais indispensable au vu de la situation actuelle.

 

Le mauvais diagnostic des créanciers de la Troïka

 

Pour le dire simplement, l'ex-Troïka (BCE + FMI + UE) soignait depuis 2010 un problème de liquidité en lieu et place d'un problème de solvabilité. A la différence de la crise de liquidité où l'emprunteur peut payer ses dettes mais ne trouve pas temporairement de prêteur, la crise de solvabilité concerne l'emprunteur qui ne peut pas rembourser ses dettes.

 

En 2010, la Grèce doublait ainsi son insolvabilité externe (plus de 10 % de déficit courant et 140 % du PIB de dettes nettes extérieures en 2011) d'une insolvabilité budgétaire (plus de 9 % du PIB de déficit public et 160 % du PIB de dettes publiques en 2011). Pour le dire autrement, la Grèce ne pouvait faire face ni à son endettement vis-à-vis des pays étrangers ni à son endettement public...

 

A mauvais diagnostic des créanciers, mauvais remède appliqué au malade grec ! Dès lors, pour répondre aux injonctions de la Troïka (BCE + FMI + UE) et obtenir le déblocage des prêts, le précédent gouvernement grec s'est vu contraint de multiplier les politiques d'austérité : réduction drastique des salaires et des retraites, coupes claires dans les dépenses des ministères et dans les aides sociales, privatisations des entreprises publiques.

 

La grande saignée économique pour le peuple

 

Le résultat de toutes ces coupes fut une formidable explosion du chômage, de la précarité, de la pauvreté et tout simplement de la misère socio-économique. Mais c'était bien entendu pour "le bien de la Grèce" que la Troïka lui prescrivait ce remède. Ainsi, les conséquences désastreuses de cette politique d'austérité étaient vues comme de simples effets indésirables à court terme, qui cèderaient rapidement le pas à la croissance et à la compétitivité à l'export.

 

Chaque année on déclarait donc que la reprise était en vue, mais rien ne venait... Donc on prescrivait encore plus de rigueur l'année suivante, selon le principe bien connu des shadoks, qu'il faut toujours poursuivre une politique qui ne marche pas, car plus ça rate plus on a de chances que ça marche ! Le pays a ainsi pratiqué saignée sur saignée, pensant certainement que les médecins-économistes savaient ce qu'il fallait faire pour relancer l'économie. C'est ce que je qualifiais de grande saignée économique !

 

Paul Krugman, prix Nobel d'économie, cite même désormais l'Europe en exemple pour expliquer à ses concitoyens américains que les plans de rigueur constituent une politique économique inefficace et mortifère ! Dans son billet de blog "le suicide économique de l'Europe", il concluait : "Plutôt que d'admettre qu'ils se sont trompés, les dirigeants européens semblent déterminés à faire tomber leur économie - et leur société - d'une falaise. Et c'est le monde entier qui en paiera le prix"...

 

Et pourtant, dans une note interne rendue fort opportunément publique en 2013, le FMI avait reconnu que le plan de sauvetage de la Grèce en 2010 s'était soldé par un échec ! L'institution, dirigée par Christine Lagarde depuis 2011, expliquait même qu'il aurait fallu restructurer la dette grecque dès 2010, mais que les Européens s'y sont opposés.

 

Pire, l'ancien conseiller économique de José Manuel Barroso a déclaré, dans le cadre de son audition par la Commission pour la vérité sur la dette grecque : "en 2010, les grands dirigeants européens (dont la Commission européenne) et le directeur du FMI de l’époque, Dominique Strauss-Kahn, ont délibérément refusé de considérer la Grèce comme insolvable dans le but de protéger les intérêts des grandes banques européennes. En effet, selon les statuts du FMI, cette Institution ne pouvait pas prêter à un État dont la dette est déjà insoutenable".

 

Puis arriva Syriza...

 

Syriza est une coalition de la gauche radicale en Grèce, dont le leader est Alexis Tsipras. Syriza, qui est par ailleurs membre du Parti de la gauche européenne, avait proposé un programme électoral basé sur 4 piliers (lutte contre la crise humanitaire, relance de l'économie, reconquête du travail, réforme de l'État) et une cinquantaine de mesures phares, dont la restructuration de la dette publique à hauteur d'au moins 50 % et la fin de l'austérité qui a mis le pays au tapis.

 

Cela n'avait pas manqué d'inquiéter au plus haut point les tenants de l'orthodoxie néolibérale, comme en témoignent la saillie de Jean-Claude Juncker et celle attribuée à Angela Merkel concernant une possible sortie de la Grèce de la zone euro (Grexit). Bref, personne ne voulait d'un parti qui affiche clairement la volonté de redonner le pouvoir au peuple et donc de privilégier les intérêts de celui-ci aux intérêts des créanciers.

 

Et ce bien que Syriza ne souhaitait plus la sortie de l'Euro, mais la fin de l'austérité, afin de faire repartir la demande intérieure, et la restructuration de son insoutenable dette publique (320 milliards d'euros, soit plus de 177 % du PIB !) qui mine tout espoir d'en finir avec la crise, dans un pays dont les fondements politiques, économiques et sociaux ont été sérieusement et durablement atteints.

 

Les conséquences d'un défaut grec

 

Les heurts diplomatiques fréquents entre le gouvernement grec et ses "partenaires" européens, tout comme l'impossibilité manifeste de trouver un accord entre la Grèce et ses créanciers, augmentent encore la volatilité sur les marchés.

 

Et ce d'autant plus que l'Eurogroupe a laissé filtré, par dépêche Reuters, que l'hypothèse d'un défaut était dorénavant examinée très sérieusement. Il est vrai que si un accord était trouvé, il lui faudrait encore être endossé par l’Eurogroupe et ensuite validé par certains parlements nationaux, notamment en Allemagne. Or, comme le deuxième plan d'aide à la Grèce prend fin le 30 juin, après avoir déjà été prolongé dans la souffrance de 4 mois au début de l'année, on voit mal comment cela serait possible si aucun accord n'est signé cette semaine...

 

Faut-il d'ailleurs rappeler que la dette publique grecque appartient à plus des deux-tiers aux autres État membres de la zone euro, au travers essentiellement du FESF, des prêts bilatéraux et de la BCE ?

 

 

[ Source : Le Figaro ]

 

Dès lors, un défaut même partiel laisse craindre des pertes qui seront épongées pour un montant important par les contribuables allemands et français. Il est donc devenu à la mode d'estimer ce que chaque pays laisserait comme plumes dans l'affaire : 68 milliards d'euros pour la France et 85 milliards pour l'Allemagne, selon Philippe Waechter de Natixis.

 

Certains poussent même le vice masochiste jusqu'à calculer ce que cela représenterait pour chaque foyer fiscal ! Mais si le défaut de la Grèce débouche sur la dissolution de la zone euro, alors le coût sera bien plus élevé que les montants indiqués ci-dessus, ne serait-ce que parce que des éléments non monétisables auront été perdus (unité européenne, confiance, etc.) !

 

Et quid des 30 milliards d'euros apportés par le FMI ?

 

L'institution, qui n'a jamais connu de défaut ni effacé aucune dette depuis sa création, est devenue manifestement très virulente avec la Grèce. Aurait-elle déjà saisi que la Grèce ne lui remboursera pas la somme due à la fin du mois ? Est-ce pour cela que le FMI semble privilégier un supplément d'austérité et des objectifs inatteignables pour la Grèce ?

 

Notons qu'en cas de défaut sur le remboursement des 1 600 millions d'euros dus au FMI avant le 30 juin, certes les agences de notation laissent entendre qu'elles ne le considéreront pas comme un défaut de paiement, mais aux yeux de tous l'événement sera vu à sa juste valeur. Et ce même si le FMI prendra plusieurs semaines avant de déclarer sa créance en défaut.

 

Bien entendu, on assisterait à une accélération massive des sorties de capitaux et retraits de dépôt bancaires, mouvement déjà entamé depuis des mois :

 

[ Source : Natixis ]

 

Cela nécessiterait de mettre en place d'urgence un mécanisme de contrôle des capitaux, à l'instar de ce qui avait été fait à Chypre en mars 2013. Quoi qu'il en soit, cela déboucherait très vite sur une panique bancaire, bank run dans le jargon bancaire, aux conséquences terribles.

 

En effet, si tous les clients se mettent à retirer au plus vite leurs dépôts de peur que leur banque ne fasse faillite, alors la banque court le risque d'être à court de liquidités (car elle ne possède pas assez de billets pour rembourser tout le monde) et devenir effectivement insolvable, même si elle ne l'était pas au début. C'est précisément ce que l'on appelle une prophétie auto-réalisatrice.

 

Les banques en manque de liquidités devront être secourues soient par d'autres banques, soient par des institutions internationales (FMI, Banques centrales, etc.)... soit par l'État comme ce fut le cas lors de la crise des subprimes, où les États sont allés jusqu'à nationaliser des banques et offrir de confortables garanties des dépôts (100 000 euros au sein de l'Union européenne pour les espèces, jusqu'à 250 000 dollars au plus fort de la crise des subprimes aux États-Unis).

 

Mais comment voulez-vous que la Grèce puisse appeler à l'aide ceux-là même qui refuse de l'aider actuellement ? On assisterait alors certainement, en plus de la mise en place d'un contrôle des capitaux  à un chantage à la liquidité versée par la BCE, comme ce fut le cas en Irlande où Jean-Claude Trichet avait menacé de couper les liquidités au pays si celui-ci n'acceptait pas les réformes proposées : dès lors soit le gouvernement grec se couche au détriment de son peuple, soit il fait front mais se retrouve contraint de créer une nouvelle monnaie puisque la BCE ne lui fournira plus d'euros pour alimenter son économie.

 

Et qu'en est-il des remboursements à la BCE ?

 

La Grèce devra très vite faire face à d'importants remboursements de dette, et il lui faudra certainement trouver en tout 12 milliards d'euros pour affronter toutes ses obligations en 2015...

 

 

[ Source : Natixis ]

 

En particulier, il lui faudra trouver 3,5 milliards d'euros pour rembourser ses dettes envers la BCE, avant le 20 juillet.

 

Si la Grèce fait défaut sur ce remboursement, la BCE pourrait alors décider que les banques grecques sont désormais insolvables (c'est d'ailleurs une réalité avec la quantité phénoménale d'obligations de l'État grec qu'elles détiennent) et ainsi leur couper l'accès à la liquidité d'urgence (ELA), qui est actuellement le seul lien qui unisse encore le secteur bancaire grec à la zone euro.

 

Il faudrait alors mettre en place un contrôle drastique des capitaux ; mais sans liquidités en euros, le Grexit (sortie de la Grèce de l'Euro) deviendrait par conséquent réalité, même si les Grecs ne souhaitaient pas quitter la zone euro ! Ce qui n'était pas prévu de jure (les traités ne prévoient pas la sortie d'un État de la zone euro), le deviendrait donc de facto !

 

Les conséquences d'un Grexit

 

Disons-le d'emblée : je ne crois absolument pas que les conséquences d'un tel événement puissent être contenues à la Grèce seule. Au contraire, les investisseurs du monde entier vont saisir que la construction européenne n'est pas autant irréversible que l'avait laissé entendre Mario Draghi, il y a quelques mois.

 

Et même si certains pensent que Super Mario peut tout à la BCE depuis qu'il a annoncé en 2012 sa volonté de tout faire pour sauver l'Euro, il y a fort à parier que la panique ne cesserait pas et emporterait avec elle l'ensemble des économies membres de la zone euro.

 

Certes, l'OMT a été validé par la Cour européenne de justice de l'UE, ce qui signifie que la BCE pourrait intervenir massivement sur le marché secondaire de la dette souveraine pour éviter la spéculation sur les autres États membres. Et le MES pourrait lui apporter son aide. Mais l'OMT n'ayant encore jamais été utilisé, le flou entourant son utilisation me fait dire qu'il ne pourra certainement pas servir à éteindre un feu dans toute la zone euro... D'autant que la solidité du système bancaire européen reste encore à prouver.

 

Mais c'est oublier que, au-delà de l'aspect financier, l'abandon de l'Euro par la Grèce constituerait certainement un détonateur bien plus puissant que ce qu'estime l'Allemagne, qui laisse même entendre qu'il s'agirait d'un non-événement. En effet, comment croire qu'une sortie précipitée de la Grèce ne créerait pas une panique politique, économique et sociale en Espagne et surtout en Italie ?

 

Car les ménages et entreprises, loin d'accorder un grand crédit aux institutions européennes, pourraient prendre peur et reporter leurs projets d'investissement, annulant ainsi la timide embellie due à la baisse des prix du pétrole ! La récession pourrait alors être violente...

 

Dans ce cas, le mécanisme de sortie ordonnée de la zone euro, que j'avais présenté dans plusieurs conférences et évoqué brièvement dans cette vidéo, ne sera plus qu'une chimère. Pourtant, depuis de nombreuses années, et en particulier dans ce billet de 2012, j'expliquais comme quasiment tous les économistes qui ont encore un peu de bon sens, que la Grèce ferait tôt ou tard défaut sur sa dette.

 

Et ma conclusion reste la même : qui peut croire qu'un peuple, qui a connu la dictature politique, puisse accepter encore longtemps la tyrannie économique, qui débouche sur le chaos social ?

 

N.B : l'image de ce billet provient d'un article Courrier International

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17 juin 2015 3 17 /06 /juin /2015 11:11

 

 

Comme je l'avais écrit dans ce billet, notre époque a vu fleurir les idées reçues et autres contrevérités en économie, qui ne cessent d'être martelées afin de servir les intérêts d'une minorité en s'assurant, à défaut d'adhésion, l'absence de contestation du plus grand nombre.

 

C’est pourquoi, j'avais pris grand plaisir à la publication de mon nouveau livre, Mieux comprendre l'économie : 50 idées reçues déchiffrées, aux éditions Ellipses. C'est justement pour en parler, que j'ai été invité dans l'émission entre les lignes de Mosaïk, par Marie-Anne Gabriel. La vidéo peut être visionnée gratuitement en cliquant sur la photo ci-dessous :

 

 

[ Cliquer sur l'image pour voir la vidéo ]

 

Je rappelle que mon livre, comme l'indique son titre, répertorie 50 idées reçues et vous offre la possibilité de comprendre ces sujets simplement, sans mathématiques ni graphiques.

 

Pour ce faire, chaque idées reçue fait l'objet d'un chapitre court, qui commence par quelques citations sur le sujet, se poursuit par deux ou trois pages d'explications et se termine par un encadré "boîte à outils", où le lecteur trouvera des compléments techniques sur la question (par exemple sur la manière de mesurer le chômage, de calculer l’inflation, de fixer le seuil de pauvreté,…). En fin d'ouvrage, le lecteur trouvera en prime un petit lexique.

 

Ce livre s'adresse donc à toutes les personnes qui souhaitent comprendre l'économie, et peut être acheté dans toutes les bonnes librairies, même celles en ligne (dont voici quelques liens) :


Amazon I Fnac I Ellipses I Decitre I Chapitre I Joseph Gibert

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10 juin 2015 3 10 /06 /juin /2015 10:57

 

 

Après avoir connu des taux de croissance formidables pendant près de deux décennies, la Chine devra probablement se contenter d'un modeste 7 % cette année. Certes, d'aucuns diront que c'est déjà très bien comparé à l'Union européenne, mais c'est méconnaître les risques que cela fait peser sur une économie chinoise, dont le modèle reste pour l'instant largement tributaire d'une croissance forte.

 

Évolution de la croissance chinoise

 

Le graphique ci-dessous résume parfaitement la situation :

 

 

[ Source : http://philippewaechter.nam.natixis.com ]

 

Le taux de croissance en Chine, dont la moyenne était de 10 % sur la période 1980-2014 (avec des pics officiels à 16 %, probablement plus officieusement), ralentit inexorablement depuis 2010 pour atteindre 7,4 % en 2014 et probablement 7 % en 2015.

 

Les causes du ralentissement de la croissance

 

Le ralentissement du taux de croissance en Chine est dû à plusieurs facteurs :

 

 * le changement de modèle économique est lent et difficile. La Chine cherche en effet à rééquilibrer son processus de croissance, c'est-à-dire à passer d'un modèle de croissance tiré uniquement par les industries exportatrices à une croissance plus équilibrée basée sur la consommation des ménages et les services. Or, tandis que l'industrie ancienne, intense en main-d'oeuvre, stagne, les services et la consommation intérieure n'ont pas encore pris le relais, ce qui risque de conduire à de graves problèmes sociaux si l'économie chinoise n'arrive plus à absorber les jeunes diplômés et laisse augmenter le chômage.

 

 

[ Source : Natixis ]

 

 * l'économie mondiale tourne au ralenti et la demande adressée à la Chine est donc plus faible. C'est d'ailleurs précisément ce que déclare Roberto Azevedo, directeur général de l'OMC, dans une interview aux Échos : "On ne voit nulle part une reprise robuste de la croissance, que ce soit en Europe, aux États-Unis ou en Chine. [...] Le ralentissement du commerce par rapport à la croissance est lié à des pays comme la Chine".

 

 * la démographie est défavorable en Chine (vieillissement et population active en stagnation)

 

 

[ Source : http://www.businessinsider.com ]

 

 * l'immobilier a trop longtemps été le principal secteur d'investissement, ce qui a débouché sur la création d'une bulle qui menace désormais d'exploser.

 

 * la compétitivité-prix de la Chine s'est dégradée sensiblement, en raison de la hausse rapide des coûts salariaux unitaires. Rappelons que cette hausse est, pour l'essentiel, le résultat du changement de modèle économique désiré par les autorités chinoises, puisque les augmentations de salaires doivent conduire à une hausse du pouvoir d'achat des consommateurs et donc au rééquilibrage du processus de croissance.

 

 

[ Source : Natixis ]

 

Les conséquences du ralentissement de l'activité en Chine

 

Malgré les mesures de relance prises par le gouvernement en Chine (investissement public et assouplissement monétaire), l'activité ne repart pas. Plus exactement, l'ancien modèle de développement économique en Chine a fait long feu, mais le rééquilibrage avec la demande intérieure sera long et difficile. En attendant, les conséquences de ce ralentissement de la croissance en Chine sont les suivantes :

 

* les pays qui sont de grands exportateurs vers la Chine vont évidemment souffrir du ralentissement de son activité et du recul de ses importations (confirmé au mois de mai selon cet article). On pense bien entendu aux pays de l'ASEAN, mais aussi à tout le continent africain qui est commercialement lié avec la Chine.

 

* les exportateurs de matières premières vont être très durement touchés par ce ralentissement, qui va de pair avec une moindre demande de minerais, métaux et hydrocarbures. Au vu de la taille des importations chinoises, un tel recul conduit nécessairement à une baisse des cours des matières premières au niveau mondial... et donc à un manque à gagner important pour les exportateurs. Faut-il rappeler ici que 35 % des exportations de l'Australie sont destinées à la Chine ?

 

En dehors de toutes ces conséquences négatives, notons tout de même que ce ralentissement est une bonne nouvelle pour l'environnement en Chine. En effet, le gouvernement a mis en place un embryon de politique de lutte contre la pollution, qui passe notamment par la fermeture des usines les plus polluantes et vétustes.

 

Et quand on sait que les alertes à la pollution se mutliplient à un rythme effrayant, on comprend l'intérêt de cette question et les raisons qui ont poussé les autorités chinoises à en cacher l'existence, quitte pour cela à censurer le documentaire Under the dome, réalisé par une ancienne présentatrice vedette de la télévision chinoise :

 

 

En définitive, l'avenir économique en Chine sera, à moyen terme, inexorablement lié au développement de la demande intérieure. Dès lors, les entreprises étrangères, dont les françaises, qui voudront commercer avec la Chine, auront tout intérêt à répondre directement aux besoins de la classe moyenne (encore en devenir pour l'instant...).

 

Mais avant, gageons que l'immense bulle immobilière ne fasse pas trop de dégâts lorsqu'elle explosera, d'autant qu'elle fut massivement financée par l'endettement auprès d'institutions financières peu ou pas réglementées...

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3 juin 2015 3 03 /06 /juin /2015 11:24

 

 

La lutte contre l'évasion fiscale est enfin devenue une priorité des gouvernements, en raison de leurs difficultés à équilibrer leur budget. Et pour être efficace, elle doit d'abord commencer par un grand ménage au sein de l'Union européenne, sous peine de revivre chaque année de nouveaux LuxLeaks... 

 

C'est pourquoi, je suis avec beaucoup d'intérêt les actions menées depuis quelques mois par l'OCDE, qui s'est engagée désormais dans une lutte mondiale pour l'échange automatique de données fiscales pour les particuliers, et contre l'érosion des bases imposables des entreprises,

 

C'est d'ailleurs pour évoquer l'évasion fiscale durant une quinzaine de minutes, que TV Cristal m'a invité sur son plateau :

 

 

[ Cliquer sur l'image pour voir la vidéo sur le site de TV Cristal ]

 

Il ne faut donc pas relâcher la pression sur les multinationales, qui cherchent à s'exonérer des règles communes et à ne pas payer d'impôt.

 

Amazon est de ce point de vue le cas d'école de la multinationale, qui a eu maille à partir avec Bruxelles en raison de ses stratégies d'optimisation fiscale. En effet, en 2013, la société avait créé une polémique au Royaume-Uni en annonçant le paiement de 2,8 millions d’euros d'impôts sur les sociétés en 2012, un montant dérisoire au regard de ses bénéfices !

 

La commission parlementaire sur les finances publiques avait alors découvert qu'Amazon, bien qu'ayant perçu 2,5 millions de livres d'argent public, s'arrangeait pour faire enregistrer ses ventes au Luxembourg où se trouve son siège social. Or, comme par hasard, les règles de taxation au Luxembourg lui permettait de baisser substantiellement l'impôt acquitté, en raison de montages opaques, mais légaux !

 

C'est ainsi que quasiment toutes les administrations fiscales de la zone euro ont eu des griefs à l'égard d'Amazon. L'Allemagne a ainsi considéré qu'Amazon ne lui avait payé que 3 millions d'euros d'impôts sur les sociétés pour environ 9 milliards d'euros de chiffre d'affaires dans le pays ! La France est même allée jusqu'à lancer une procédure de redressement fiscal pour un montant de 230 millions de dollars avec des arguments solides comme ceux-là :

 

 

[ Source : http://www.nextinpact.com ]

 

Enfin, à force de jouer à l'équilibriste sur le fil raide de la fiscalité européenne, cela lui a valu une enquête en bonne et due forme de la part de la Commission européenne, qui reprochait au Luxembourg d'avoir accordé à Amazon une aide d'État préférentielle, contraire aux traités européens.

 

Et là coup de théâtre il y a quelques jours, Amazon annonçait qu'il déclarerait ses revenus - et donc paierait ses impôts - dans chaque pays où la société réalise des ventes, quitte pour cela à créer des filiales ! C'est donc bien la preuve qu'avec un peu de bonne volonté politique, on peut lutter efficacement contre l'évasion fiscale...

 

N.B : l'image de ce billet provient d'un article du site http://www.trunews.com

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27 mai 2015 3 27 /05 /mai /2015 13:09

 

 

Les médias n'ont de cesse de s'esbaudir devant les très bons chiffres du chômage aux États-Unis. Qu'il suffise de lire cet article du Figaro ou celui-ci qui provient de l'Obs pour s'en convaincre... Il est vrai que, en mai 2015, le taux de chômage est tombé à 5,4 % de la population active, son plus bas niveau depuis le début de la crise des subprimes. Mais ces chiffres reflètent-ils la réalité de la situation sur le marché de l'emploi aux États-Unis ?

 

La baisse du chômage aux États-Unis

 

Plutôt qu'un long discours, jetons un oeil au graphique suivant :

 

 

[ Source : Yahoo finance ]

 

Avant de nous intéresser aux chiffres du chômage, notons que les barres rouges de ce graphique correspondent aux "non-farm payrolls", c'est-à-dire le nombre d'emplois salariés dans tous les secteurs en dehors de l'agriculture.

 

Ce graphique montre, entre autres, la baisse impressionnante du taux de chômage aux États-Unis depuis quelques mois. Tellement prononcée, que certains n'hésitent plus à affirmer que le pays va très prochainement arriver à son taux de plein emploi. Quoi qu'il en soit, il est dorénavant officiellement inférieur au seuil de 6,5 % que la Fed avait fixé comme préalable à la remontée de ses taux directeurs. Donc tout semble aller très bien chez l'Oncle Sam, sauf que...

 

Ce que cette baisse des chiffres ne dit pas

 

Tout d'abord, si le marché de l'emploi aux États-Unis était si proche du plein emploi, on se demande pourquoi on ne voit pas apparaître de tensions sur les salaires. Au contraire, à de rares exceptions près très médiatiques, leur évolution reste désespérément atone :

 

 

[ Source : https://www.americanprogress.org ]

 

De plus, si l'on compare avec les précédentes récessions, l'économie américaine a beaucoup plus de mal a retrouver le niveau d'emploi d'avant crise. Voilà pourquoi les statistiques publiées début mai par le BLS (Bureau of Labor Statistics), qui font état de 223 000 créations d'emplois en avril 2015, ont passé du baume au coeur des dirigeants politiques, après un premier trimestre plutôt mauvais.

 

Des chômeurs découragés...

 

En outre, il est nécessaire de regarder le taux de participation, qui est par définition le rapport entre la population active et la population en âge de travailler effectivement. Pour le dire autrement, c’est la proportion de la population en âge de travailler qui a un emploi ou qui en cherche. Son évolution est très importante, car elle donne une indication sur les raisons de la baisse du taux du chômage.

 

 

[ Source : zerohedge.com ]

 

On voit sur le graphique ci-dessus que, aux États-Unis, le taux de participation a baissé depuis le début de la crise en 2008 et reste désormais à un niveau historiquement bas de 62,8 %. Cela peut s'interpréter comme le résultat d'un découragement de beaucoup de chômeurs qui, au vu du peu d'offres qu'ils trouvent, finissent par abandonner toute recherche d'emploi...

 

Cependant, une personne qui abandonne ses recherches d'emploi passe de la catégorie chômeur (qui est incluse dans la population active) à la catégorie inactif, ce qui fait mécaniquement baisser le taux de chômage. Mais est-ce vraiment le signe que l'économie américaine va mieux ? Et que dire de tous ces Américains qui subissent le travail à temps partiel, mais viennent tout de même diminuer le taux de chômage ?

 

C'est du reste un grand débat aux États-Unis, de savoir si la baisse du taux de participation est due à des effets conjoncturels ou structurels. De nombreuses incertitudes demeurent, même si  de nombreuses études penchent désormais pour des explications structurelles (démographie, perte de capital humain, découragement, effet d'hystérèse, etc.). Voilà pourquoi la Fed a abandonné le seuil de taux de chômage à 6,5 % évoqué plus haut pour commencer à augmenter ses taux d'intérêt.

 

L'économie des États-Unis va mal

 

Paul Craig Roberts, l'un des pères fondateurs des Reaganomics lorsqu'il était sous-secrétaire au Trésor dans l'administration Reagan, s'est fendu d'un article dans CounterPunch où il montre qu'aucun emploi n'a été créé en avril 2015 dans l'industrie ; pire, il affirme que "le paysage de la population américaine active est celui d’un pays du Tiers Monde. La plupart des emplois créés sont des services domestiques peu payés".

 

Pour finir, ne perdons pas de vue que, la diminution des gains de productivité aux États-Unis et le faible taux de participation au marché de l'emploi, vont conduire à un recul de la croissance potentielle, qui est déjà passée de près de 3,5 % avant crise à 1,7 % aujourd'hui... Ainsi, à long terme, je ne vois pas comment les États-Unis vont réussir à créer massivement de l'emploi avec le même modèle économique qu'avant la crise !

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