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1 mars 2022 2 01 /03 /mars /2022 13:15

 

 

Le 24 février 2022 restera indubitablement dans l'histoire comme le jour où la guerre a réapparu en Europe avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Depuis, les États du monde entier prennent des sanctions économiques et politiques contre la Russie. En particulier, il a été décidé, après moult débats, d'exclure de nombreuses banques russes du système SWIFT, décision que d'aucuns à l'instar de Bruno Le Maire qualifient "d'arme nucléaire financière" contre la Russie. Dans ce billet, nous allons donc chercher à comprendre ce qu'est SWIFT et quelles sont les conséquences possibles d'une telle suspension.

 

Qu'est-ce SWIFT ?

 

SWIFT est l'acronyme de Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication, une société coopérative de droit belge créée en 1973 par les banques pour les banques. Il s'agit en fait d'un immense réseau qui interconnecte les institutions bancaires dans le monde, afin qu'elles puissent envoyer de manière rapide et sûre des messages liés à leurs paiements internationaux. En d'autres termes, SWIFT est la version électronique et automatisée du télex d'antan, ce qui facilite grandement les choses lorsque l'on sait que près de 11 000 banques membres dans plus de 200 pays s'échangent en moyenne tous les jours 42 millions de messages de paiement :

 

[ Source : SWIFT ]

 

SWIFT n'est donc pas un système de paiement comme TARGET 2 en Europe, mais un système de messagerie des ordres de paiement, c'est-à-dire un maillon de la chaîne de règlement des transactions internationales.

 

Exemple d'utilisation de SWIFT

 

Afin de vous permettre de bien comprendre le rôle de SWIFT, imaginons une entreprise française qui achète pour 1 million d'euros de matériel en Russie. Cette importation va donner lieu à un paiement entre la banque française (débit du compte client français de 1 million d'euros) et la banque russe (crédit de l'entreprise russe du même montant). SWIFT va alors servir à transmettre un ordre de paiement irrévocable de la banque française à la banque russe :

 

 

Une fois le message SWIFT transmis, les banques doivent trouver le moyen d'exécuter le règlement proprement dit, en faisant appel à un système de règlement comme TARGET 2 ou très souvent au système des banques correspondantes, qui dans notre exemple consiste pour la banque française qui effectue un paiement en roubles pour son client à détenir un compte dans une banque russe, cette dernière effectuant le règlement.

 

La suspension des banques russes de SWIFT

 

Le 27 février 2022, les ministres des Affaires étrangères de l'UE ont décidé de suspendre un certain nombre de banques russes du réseau SWIFT, ce qu'a officialisé Ursula von der Leyen :

Si vous n'êtes pas à l'aise avec l'anglais made in Europe (alors que le français est censé être une langue officielle de travail au sein des institutions européennes...), voilà le point important à retenir de cette allocution : "Cette action empêchera les banques d'effectuer la plupart de leurs transactions financières mondiales et, par conséquent, les exportations et importations russes seront bloquées".

 

Cette décision, ardemment souhaitée par Emmanuel Macron, a donné lieu à des palabres nombreuses entre les dirigeants européens, les Allemands craignant visiblement les conséquences d'un tel acte pour leur économie si dépendante du gaz russe...

 

Quelles conséquences après la suspension ?

 

Venons-en à présent aux conséquences de cette décision, dont l'Iran et la Corée du Nord ont déjà fait les frais par le passé. Au vu des explications fournies ci-dessus sur le fonctionnement de SWIFT, le lecteur aura compris que les transactions internationales de la Russie vont devenir passablement compliquées à court terme. Les banques et entreprises russes devront donc soit payer leurs transactions internationales en cash, soit s'appuyer sur une banque étrangère qui accepterait d'exécuter le paiement.

 

Le maître du Kremlin laisse entendre qu'il pourrait aussi s'appuyer sur son système alternatif de messagerie sécurisée, le Système de transfert de messages financiers (SPFS), bien qu'il ne compte guère que quelques institutions bancaires en son sein. Dans ce dernier cas, les entreprises russes chercheront à passer par une banque membre du SPFS, pour qu'elle transmette par exemple l'ordre de paiement via SWIFT. Bref, un processus bien plus compliqué et plus cher, dans la mesure où il multiplie le nombre d'intermédiaires. À moins que la Chine ne vienne à la rescousse de son allié russe, en accélérant l'intégration du SPFS au CIPS (China International Payments System), ce dernier étant connecté à SWIFT...

 

Curieusement, tous les regards sont tournés vers les conséquences sur l'économie russe, d'autant qu'il a été annoncé la paralysie des actifs de la Banque centrale du pays. Mais quid du paiement des importations de gaz, surtout dans des pays où la dépendance au gaz russe dépasse 50 % (Allemagne, Pologne...) et même 75 % (Roumanie, Bulgarie, Autriche...) ? Voilà pourquoi les hésitations allemandes ont conduit à ne pas déconnecter certaines banques russes liées aux contrats énergétiques comme Gazprombank... Et les entreprises qui font traditionnellement du commerce avec la Russie vont évidemment déguster la même soupe à la grimace, même si les chefs d'État européens ne cessent de répéter en chœur que la Russie n’est pas un partenaire important sur le plan économique.

 

 

[ Source : Eurostat ]

 

En définitive, nous entrons dans une période de grande incertitude économique et politique, qui laisse craindre une escalade de part et d'autre. Quid des moyens pour faire ensuite redescendre la vapeur ?

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23 février 2022 3 23 /02 /février /2022 13:24

 

 

Dans mon article sur l'inflation, j'avais montré combien ce phénomène provoque l'hystérie des possédants, alors qu'ils ne sont pas les plus à plaindre. Je voudrais aujourd'hui revenir brièvement sur l'augmentation globale des richesses, que les gouvernements voient un peu trop vite comme le signe d'une reprise forte de l'économie.

 

L’augmentation globale des richesses

 

Comme le fait Patrick Artus, nous appelons ici richesse la somme de la monnaie M2, des bons du Trésor, des certificats de dépôt, des billets de trésorerie et certificats de dépôts, de la valeur de marché des obligations, de la capitalisation boursière, de la richesse immobilière. Le graphique ci-dessous montre que cette richesse globale rapportée au PIB augmente tendanciellement dans l'OCDE :

 

 

[ Source : Natixis ]

 

Et les politiques monétaires ultra-expansionnistes menées par les Banques centrales ne peuvent qu'alimenter cette tendance, en ce qu'elles réduisent (artificiellement) les primes de risque et les taux d'intérêt et poussent ainsi les investisseurs à envahir certaines classes d'actifs, d'où une hausse des cours soutenant la richesse.

 

Économie en berne

 

Dans une certaine vision de l'économie, d'aucuns s'attendaient à ce que la hausse des richesses s'accompagne d'effets favorables à l'économie : hausse de la consommation et hausse de l'investissement. Or, globalement, il n'en a rien été. En d'autres termes, la richesse totale augmente au moment où l'économie est au plus mal :

 

 * l'investissement (ici des ménages) n'en profite pas ;

 

 

[ Source : Natixis ]

 

 * les prévisions de croissance sont en berne dans la plupart des pays ;

 

 

[ Source : FMI ]

 

 * les inégalités de patrimoine s'aggravent, les uns possédant des actifs financiers et immobiliers qui prennent de la valeur, les autres ne possédant quasiment rien à faire fructifier ; ci-dessous, la situation en France en 2018 ;

 

 

[ Source : Insee ]

 

 * le sort de l'immense majorité des personnes ne s'améliore pas, d'où une déstructuration sociale et politique (crise n'est pas le bon mot, car le phénomène s'amplifie...) ; seuls quelques politiques se persuadent encore que le reliquat d'onction démocratique obtenue aux élections leur assure une véritable légitimité ; le peu d'intérêt suscité par l’élection présidentielle en France en est du reste un symptôme manifeste.

 

Bref, la hausse des richesses est loin de s'accompagner de la prospérité pour tous ! Elle n'est pas seulement le signe d'une économie malade, mais d'une société qui s'effondre...

 

P.S. L'image de ce billet provient de cet article de l'Union.

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16 février 2022 3 16 /02 /février /2022 11:40

 

 

Histoire de voyager de temps en temps au-delà des frontières de l'UE, voilà un billet sur la politique économique au Japon. Le moins que l'on puisse dire est que les nuages noirs s’amoncelaient déjà bien avant la crise de la covid-19 et que la croissance potentielle est désespérément proche de zéro...

 

Croissance, démographie et productivité en berne

 

La croissance est en berne depuis de très nombreuses années :

 

 

[ Source : Université Sherbrooke ]

 

En outre, le pays connaît un déclin démographique :

 

 

[ Source : Le Monde ]

 

La population est vieillissante, même si les compétences de la population active sont élevées :

 

 

[ Source : IndexMundi ]

 

Le Japon est souvent présenté comme une économie en quasi-plein emploi avec pénurie de main-d’œuvre. Mais ce résultat fut obtenu au prix d'une hausse sensible des emplois précaires, souvent occupés par les jeunes et les femmes, que les réformes récentes tentent difficilement de corriger. Par ailleurs, allocation peu efficace du travail et de l'épargne expliquent certainement que les gains de productivité soient faibles :

 

 

[ Source : Natixis ]

 

Autant d'éléments qui pèsent in fine sur la croissance potentielle du pays, d'autant que le partage des revenus se fait au détriment des salariés, comme dans la zone euro, mais à une échelle bien plus large, ce qui augmente les profits des entreprises bien au-delà du niveau nécessaire pour leurs investissements :

 

 

[ Source : Natixis ]

 

La politique économique au Japon

 

La politique économique du Japon repose sur une combinaison surprenante :

 

 * une politique budgétaire durablement expansionniste (niveau élevé des dépenses publiques et de l’endettement public)

 

 

[ Source : Natixis ]

 

 

[ Source : OCDE ]

 

 * Une politique monétaire structurellement expansionniste, afin de conserver les taux d’intérêt réels à long terme suffisamment bas pour assurer la soutenabilité de la dette publique

 

Taux obligations d'État 10 ans Japon

 

[ Source : CNBC ]

 

Pour l'instant, la dette publique japonaise, à près de 260 % du PIB (sic !), n'est pas un problème trop grave, puisqu'elle est très largement détenue par les Japonais eux-mêmes. En effet, en simplifiant un peu, l’épargne des ménages et des entreprises se dépose dans les banques, qui l'utilisent pour acheter des obligations d'État. Cependant, cette situation est précaire, et potentiellement explosive si les résidents décidaient de placer leur épargne sur des actifs étrangers bien plus rémunérateurs. Si les ménages acceptent des taux d'intérêt proches de zéro, c'est que l'inflation est en moyenne nulle depuis l'éclatement de la bulle au début des années 1990 et que les salaires sont globalement stables.   

 

Face à cette économie atone, le gouvernement semble avoir misé sur le commerce international, l'économie numérique et la décarbonation. Mais cela sera-t-il suffisant sachant que la demande intérieure est négativement impactée par des conditions de travail dégradées ?   

 

P.S. L'image de ce billet provient d'un billet du site https://www.eleconomista.es                       

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9 février 2022 3 09 /02 /février /2022 11:21

 

 

Cet ouvrage collectif, publié aux éditions Dunod, se veut un outil destiné aux étudiants en classes préparatoires ECG. Il réunit en 320 pages des éléments méthodologiques, des fiches sur les notions importantes des deux années, des dissertations entièrement rédigées et des sujets de colles. Pour ma part, j'ai apporté des contributions dans les fiches notions et faits stylisés.

 

Cet ouvrage pour les prépas ECG peut être acheté dans toutes les bonnes librairies et en ligne :

 

Amazon I Dunod I Fnac I Decitre I Joseph Gibert

 

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31 janvier 2022 1 31 /01 /janvier /2022 12:51

 

 

Il y a quelque temps, j'avais rédigé des billets en lien avec la hausse des prix vécus au quotidien par les ménages en France : un sur le prix de l'électricité, un autre sur le pouvoir d'achat et enfin un dernier sur la nature de ces hausses. Aujourd'hui, je voudrais juste rappeler quelques éléments complémentaires sur l'inflation, car il me semble que nous assistons à une hystérisation du sujet dans les médias.

 

L'inflation, c'est quoi ?

 

Selon l'Insee, "l'inflation est la perte du pouvoir d'achat de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix". Tous les mots ont leur importance dans cette définition, ainsi l'augmentation doit être générale et surtout durable pour être qualifiée d'inflation. Or, pour l'instant, comment parler d'inflation après seulement quelques mois de hausse des prix, qui de surcroît s'expliquent pour une grande partie par les goulets d'étranglement résultant de la reprise simultanée de l'activité dans le monde après les confinements ?

 

Cependant, et c'est le point nodal, l'inflation est avant tout un rapport social. Or, le pouvoir de négociation des salariés concernant le partage des revenus est devenu structurellement faible dans la zone euro. Ce sont donc les éventuels effets de second tour qu'il faut surveiller, c’est-à-dire les éventuelles hausses de salaire liées à la hausse des prix à la consommation. En effet, l'inflation suppose une hausse généralisée et autoentrenue des prix à la consommation. Et pour l'instant, dans la zone euro, si l'on observe des effets de second tour sur la production (hausse des coûts de production liés à des hausses de prix des intrants), rien de tel n’est vraiment visible du côté des salaires.

 

Évolution du taux d'inflation (IPC) en France

 

Selon l'Insee, en décembre 2021, les prix de l’énergie reculent, ceux des produits manufacturés sont stables, mais ceux des services et de l’alimentation augmentent. Au total, sur un an, les prix à la consommation augmentent de 2,8 % :

 

 

[ Source : Insee ]

 

Il n'en fallait pas plus pour que ceux qui possèdent le plus de patrimoines poussent des cris d'orfraie, alors qu'ils ne sont pas les plus à plaindre : que dire de ceux qui n'ont que leur modeste salaire et subissent de plein fouet ce phénomène, comme je l'ai montré dans cet article ? En d'autres termes, un certain groupe social a installé le sujet dans les médias comme le problème numéro 1, d'où la multiplication des analyses plus ou moins sérieuses sur les placements financiers contre l’inflation, alors que d'autres n'ont même pas d'épargne et se retrouvent en difficulté pour vivre. Cherchez l'erreur !

 

Et un graphique pour rappeler la réalité des années 1970-1980 :

 

 

[ Source : OCDE ]

 

L'inflation est-elle mauvaise ?

 

Plutôt que de longs discours, voici une courte et brillante vidéo d'Olivier Passet, dans laquelle il rappelle qu'un peu d'inflation ferait du bien à l'économie française, mais que des mécanismes d'autocorrection s'activent pour empêcher le retour d'une inflation forte :

En définitive, gardons-nous de jugements trop hâtifs sur l'inflation, d'autant qu'ils sont produits par des personnes qui ne risquent pas de tomber dans la misère...

 

P.S. L'image de ce billet provient de cet article du quotidien Le Monde.

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19 janvier 2022 3 19 /01 /janvier /2022 11:46

 

 

Après mon billet sur la grogne sociale qui résulte de la hausse des prix, nous allons nous intéresser à la question de chômage, mais sous l'angle du taux d'activité. Ce dernier n'est que rarement convoqué dans les débats, alors même que son évolution nous donne des informations utiles sur la participation de la population à l'activité économique d'un pays, en particulier aux États-Unis où il est fort à propos désigné par l'expression "taux de participation".

 

Définition et constat

 

Le taux d'activité est le rapport entre le nombre d'actifs (personnes en emploi et chômeurs) et l'ensemble de la population correspondante. Souvent, les comparaisons internationales se limitent à une tranche d'âge, par exemple 20-64 ans ou 25-65 ans comme sur le graphique ci-dessous :

 

 

[ Source : OCDE ]

 

L'on voit un taux d'activité très élevé au Japon, l'économie étant en quasi-plein emploi avec pénurie de main-d’œuvre. Mais le graphique ne dit pas que ce résultat fut obtenu au prix d'une précarisation de l'emploi, souvent occupé par les jeunes et les femmes, que les réformes récentes tentent péniblement de corriger. Les États-Unis semblent être le mauvais élève, du moins du groupe de pays présentés sur ce graphique. Regardons alors de plus près l'évolution récente, en comparaison avec la zone euro, sur la tranche d'âge 20-64 ans :

 

 

[ Source : Natixis ]

 

Recul du taux d'activité aux États-Unis

 

En poussant la comparaison par catégorie, Patrick Artus a montré que le recul du taux de participation aux États-Unis résulte surtout des hommes de 20 à 59 ans et des personnes ayant un niveau intermédiaire d’éducation. Plusieurs explications peuvent être mises en avant pour expliquer ce phénomène inquiétant. Parmi celles-ci, il y a celle des compétences, car de plus en plus d'emplois font appel à une qualification élevée.

 

La santé des personnes est un autre facteur expliquant le recul du taux d'activité. Qu'il suffise de penser à la crise des opiacés ou, plus récemment, aux personnes touchées par la pandémie de covid-19. L'idée avancée par Joe Biden d'améliorer la couverture santé des Américains est de ce point de vue une excellente nouvelle pour eux, en tant qu'être humain, et pour l'économie, en tant que participants à l'activité. En effet, des personnes en meilleure santé sont plus susceptibles d'accepter un emploi que celles malades...

 

Cela semble être une évidence, mais pas aux États-Unis où de nombreux politiques se persuadent depuis un demi-siècle du contraire, alors même que les chiffres montrent qu'une protection sociale faible n'a jamais été associée à une hausse du taux d'activité. L'on retrouve à peu près le même genre d'ânerie en France avec le discours sur les allocations chômage et leur prétendu effet désincitatif sur la reprise d'emploi : la causalité n'est pas démontrée, mais souvent évoquée pour justifier des réformes et (accessoirement) pour satisfaire un certain électorat...

 

De plus, dans la période récente, l'on a assisté aux États-Unis à une vague de démissions, qualifiée de Great Resignation (Grande démission), qui est le résultat d'un changement de rapport au travail avec les confinements de la pandémie. Certains prennent une retraite anticipée, en vivant de leur patrimoine qui a pu gonfler grâce aux performances boursières et immobilières. Mais le plus souvent, il s'agit de travailleurs qui en ont assez d'exercer un emploi dans des conditions dégradées (salaire faible, temps de travail fractionné ou élastique, charge de travail trop forte, faible intérêt pour l'emploi...) et souhaitent profiter plus de leur famille et de leur temps libre. Pour ce faire, ils changent de secteur d'activité, ce qui crée des tensions sur l'emploi, notamment dans la restauration (l'on note le même phénomène en France). D'autres, enfin, ont repris le chemin des études pour apprendre un nouveau métier, se former à de nouvelles disciplines ou tout simplement pour prendre du champ intellectuel.

 

En définitive, notre brève analyse du taux d'activité montre que le taux de chômage ne dit pas tout de la situation de l'emploi dans une économie donnée. En effet, aux États-Unis, il eût été facile de conclure à une situation de plein emploi avec le seul taux de chômage, alors que le taux d'activité suggère une situation au contraire très dégradée.

 

 

[ Source : BLS ]

 

Cela démontre au passage qu'à force de n'évoquer le chômage que sous l'angle de son taux, on finit par occulter toutes les questions de qualité de l'emploi et de déclassement professionnel, qui expliquent le malaise grandissant ressenti par les salariés ravalés au rang de simples exécutants numérotés d'un programme d'ensemble voué tout entier à l'efficacité compétitive, c'est-à-dire prosaïquement à l'accumulation de capital par une minorité d'actionnaires usant et abusant de son droit de propriété sur l'entreprise !

 

P.S. L'image de ce billet provient de cet article de The Economist.

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10 janvier 2022 1 10 /01 /janvier /2022 11:14

 

 

En novembre 2021, j'avais écrit un billet sur le pouvoir d'achat, malmené notamment par les hausses de prix de l'énergie. Et ce matin, nous avons appris que Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance (tout ça !), annoncerait avant la fin de la semaine une solution pour limiter la hausse des prix de l'électricité à 4 % en 2022. Il est vrai qu'une augmentation de 40 % aurait fait désordre juste avant l'élection présidentielle...

 

Dans ce billet, j'aimerais ainsi montrer que le principal enjeu du gouvernement français est désormais d'éviter l'explosion sociale liée aux facteurs économiques, en augmentant les dépenses publiques pour compenser la volatilité des prix et souvent leur hausse.

 

L'origine de la grogne sociale

 

Nous allons commencer par nous demander d'où pourrait venir la grogne sociale, sachant que pour ne pas alourdir ce billet nous nous concentrerons uniquement sur les facteurs économiques.

 

 * la hausse du prix de l'électricité

 

 

[ Source : Comwatt ]

 

 * la hausse du prix du gaz

 

 

[ Source : Hello Watt ]

 

Plus généralement, avec la transition énergétique il faudra s'attendre à une hausse des prix de l'énergie, d'autant que le marché du carbone européen augmente par construction le coût du CO2 émis.

 

 * la hausse des prix de l'immobilier

 

Les célèbres courbes de Friggit nous montrent bien que les prix de l'immobilier se sont déconnectés des salaires :

 

 

[ Source : CGEDD

 

Notons que cette hausse des prix de l'immobilier résulte en grande partie de la politique monétaire très expansionniste menée par la Banque centrale européenne (BCE), conduisant à des taux d'intérêt réels extrêmement bas. 

 

 * la hausse des prix à la consommation

 

 

[ Source : Insee ]

 

Imaginez un instant ce que deviendraient les prix si la production était entièrement relocalisée en France, sans changement de mode de consommation...

 

Hausse des dépenses publiques

 

Sur la base des facteurs économiques que nous venons de passer en revue, le calme social était historiquement acheté (dans le compromis fordien) par des salaires suffisamment élevés pour compenser la hausse des prix et permettre d'entretenir la demande globale. Durant les trente dernières années, le calme social s'achetait plutôt par des prix bas à la consommation résultant des délocalisations et de l'exploitation des travailleurs dans les pays à bas coût de production, système qui a fini par se retourner contre ses promoteurs en raison de la désindustrialisation, des pertes d'emplois, de compétences et de souveraineté économique...


De nos jours, avec des marchés mondialisés et libéralisés, les prix deviennent de plus en plus volatiles et difficiles à prévoir. Quant aux salaires, au nom de la compétitivité - entendez la concurrence à outrance que se livrent les entreprises au sein même de l'UE - leur évolution est très limitée et trop souvent associée à une précarisation croissante des emplois. La paix sociale s'achète dès lors à grands renfort de dépenses publiques, que ce soit pour donner des chèques énergie aux ménages, pour compenser les prix de l'immobilier, pour compenser les faibles salaires, etc.

 

Dans ce contexte, l'on ne comprend pas très bien la politique menée les cinq dernières années par Macron, qui a consisté à discréditer les dépenses publiques et à les baisser (aides au logement, allocations des chômeurs, bientôt retraites, etc.). Il existe en effet le risque d'une chute importante des revenus des ménages, donc de la demande globale, au moment où le gouvernement ne cesse de courir après une hypothétique croissance. À moins que cette baisse des dépenses publiques ne soit qu'un moyen de satisfaire les promesses (électorales) de réduction de la pression fiscale sur les plus riches et les entreprises.

 

Dans tous les cas, le gouvernement prouve chemin faisant qu'il ne souhaite pas modifier le système économique dans l'intérêt du plus grand nombre. La précarisation de l'emploi et la perte de sens du travail ne semblent guère l'ébranler. Pourtant, faut-il rappeler qu'a priori les individus travaillent non pas pour espérer des allocations compensatrices de l'État, mais pour gagner de quoi vivre décemment ? Cette fonction du travail est même un droit fondamental, malheureusement si peu respecté... La leçon des gilets jaunes n'a visiblement pas été retenue !

 

P.S. L'image de ce billet provient de cet article du site http://www.leboisenergie.be

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31 décembre 2021 5 31 /12 /décembre /2021 13:04

 

 

J'ai commencé l'année 2021 par un article sur l'accord post-Brexit, question qui semble bien éloignée de l'actualité du moment dominée à nouveau par la crise sanitaire. C'est dire combien il devient indispensable de prendre du recul pour réfléchir à d'autres sujets importants, sous peine d'être constamment happé par le quotidien sans perspectives d'avenir. Mais revenons un instant encore sur l'année 2021, riche en événements économiques et sociaux, d'où mes nombreuses analyses dont vous trouverez les liens dans le tableau ci-dessous. Pour finir ce billet, je vous proposerai comme chaque année quelques éléments de réflexion sur 2022...

 

Retour sur l'année 2021

 

Commençons donc par un petit retour en arrière sur mes billets de l'année 2021. Tous les liens sont actifs, il vous suffira donc de cliquer sur le billet de votre choix pour le lire ou le relire, c'est selon !

 

Janvier Février

 

L'accord post-Brexit

L'Asie crée le plus grand accord commercial au monde

Le privilège exorbitant du dollar

Les inégalités post-covid

 

Qu'est-ce que la pauvreté ?

La financiarisation de l'économie

Les dégâts de la financiarisation de l'économie

Mars Avril

Le Bitcoin

La libéralisation des licenciements

La balance commerciale

Le bilan de la BCE

 

Un nouveau rapport sur la dette publique en France

La Bourse, temple de la spéculation

L'effet boule de neige de la dette publique

Relance aux États-Unis vs relance dans l'UE

 

Mai Juin

 

La finance : talon d'Achille des pays développés ?

L'économie verte

Faut-il annuler la dette publique au sein de la zone euro ?

Retour sur le plan de relance européen

 

Services publics et réduction des inégalités

La pauvreté en France

L'inquiétante situation économique de l'Italie

Quels liens entre flexibilisation et chômage structurel ?

Juillet Août

 

Le niveau inquiétant des élèves en sciences

Où vont les liquidités des Banques centrales

 

 

L'anacyclose ou le cycle des régimes politiques

Cafet'éco à Sarreguemines et autres considérations

Septembre Octobre

 

Trop de monnaie = inflation ?

La montée de l'insignifiance selon Castoriadis

Aide aux devoirs à Forbach

Monnaies locales : mon interview sur France 3

Qui paiera la dette après la crise de la covid-19 ?

 

 

Conférence sur la dette à l'UPT de Forbach

Budget 2022 : dernière étape avant l'austérité ?

L'électricité flambe !

Les dépenses publiques : sujet politique très inflammable !

Robert Owen, père fondateur du mouvement coopératif

 

Novembre Décembre

 

Les États-Unis sont-ils encore le banquier du monde ?

Dette publique : le sujet absent de la campagne électorale

Le pouvoir d'achat

Nicholas Georgescu-Roegen et la bioéconomie

 

24 % des ménages détiennent 68 % des logements !

Ce monde d'après où l'économie dysfonctionne...

Le danger d'un taux d'épargne national faible !

Joyeux Noël !

 

Et en 2022 ?

 

Le monde reste suspendu aux chiffres de la croissance sans s'interroger sur ce qu'ils recouvrent. Dès lors, les prévisions pour 2022 sont susceptibles de rassurer les personnes qui s'imaginent encore que le PIB est un gros gâteau à se partager :

 

 

[ Source : FMI ]

 

Cependant, comme je l'écrivais dans mon précédent billet, les prévisions sont systématiquement revues à la baisse en automne, lorsque la pandémie repart de plus belle. D'où le titre de la publication du FMI : "La reprise de l’économie mondiale se poursuit, mais la dynamique s’est affaiblie et l’incertitude accrue"... Bref, personne ne sait réellement quels dégâts le virus va encore faire dans l'économie ! Quant à la croissance verte, Hélène Tordjman a montré avec brio l'illusion d'un tel système économique fondé sur l’accumulation du capital et la sauvegarde de la nature. Pourtant, le concept continue à faire florès dans les partis politiques...

 

 

L'année 2022 sera marquée par l'élection présidentielle, suivie des législatives. À n'en pas douter, quel que soit le taux d'abstention, le candidat qui accédera à la magistrature suprême se targuera d'avoir obtenu l'onction démocratique, occultant de facto que le régime politique n'a de démocratique que le nom. C'est le constat fait par de très nombreux citoyens, qui ont la désagréable impression que les campagnes politiques se succèdent et se ressemblent, en ce que seules quelques vagues problématiques sont abordées à l'exclusion de toute thématique politique de fond, qui obligerait à prendre de vrais engagements auprès des Français. Exit par conséquent l'échange verbal musclé et le débat animé, nécessairement perçus comme une agression insupportable ("cessez de m'agresser verbalement" est devenu l'arme des minus habens réduits à quia) dans notre société postmoderne ; place au consensus mou sur des lois politico-économiques réputées universelles, sous peine de passer pour un extrémiste. Le lecteur intéressé par ces questions pourra utilement se reporter à une longue analyse que j'avais faite en 2020.

 

Quant à l'inflation, elle résulte pour l'instant essentiellement de goulets d'étranglement du côté de l'offre, sans véritable augmentation des salaires. Quant aux facteurs politiques et géostratégiques de l'inflation, Olivier Passet considère qu'ils devraient jouer à la baisse :

Chaque année, je rappelle aussi que nous ne sommes jamais à l'abri d'un cygne noir, tant les fragilités économiques et sociales sont nombreuses... La crise sanitaire en fut un exemple probant en 2020 !

 

Sur ce, je tiens à vous remercier chers lecteurs pour votre fidélité et vous prie de recevoir mes meilleurs vœux (l’indispensable santé en premier) pour cette année 2022 ! Merci pour vos commentaires, partages, liens et encouragements, qui me touchent et m'incitent à continuer mes analyses sur ce blog malgré le temps qui me fait toujours plus cruellement défaut...

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24 décembre 2021 5 24 /12 /décembre /2021 11:48

 

Assurément, les fêtes de fin d'année seront à nouveau placées sous l'épée de Damoclès de la covid-19, qui se propage depuis quelques semaines à très grande vitesse et désormais sous une nouvelle variante, Omicron... Depuis le déclenchement de la pandémie, le rythme de la vie (économique) se joue en deux saisons : une accélération très forte de la circulation du virus de l'automne jusqu'à la fin de l'hiver avec son lot de restrictions en tous genres (confinement, couvre-feu, fermeture de commerces et de lieux culturels...), puis un ralentissement progressif les six mois suivants avec son lot de perspectives trop optimistes et très vite démenties par la reprise de la pandémie. 

 

Quant aux espoirs d'une immunité collective, qui devait être atteinte grâce à une vaccination de l'ensemble de la population, ils semblent s'être envolés à la même vitesse qu'apparaissent les nouvelles variantes du virus. La promesse d'une vie normale, survendue par les gouvernements de tous les pays, a désormais cédé la place à la promesse d'une survie sans passage en réanimation à la faveur de multiples doses de rappel du vaccin, alors même qu'une grande partie de la population mondiale n'est toujours pas vue offerte la possibilité d'une primo-vaccination :

 

 

[ Source : Our World in Data ]

 

Le  Directeur général de l’OMS lui-même a tenu à préciser "qu'aucun pays ne pourra se sortir de la pandémie à coups de doses de rappel et les rappels ne sont pas un feu vert pour célébrer comme on l’avait prévu". Dont acte...

 

Dans le domaine économique, cela signifie qu'il ne faut pas trop se fier aux prévisions d'été, mais plutôt à celle de l'automne dans la mesure où elles tiennent compte de la réalité sanitaire. Cela même si l'observation des comportements humains durant toute l'année laisse pantois : non-respect des gestes élémentaires de sécurité, réservations/annulations de vacances dans des pays soumis à un risque sanitaire élevé, organisation de grands événements commerciaux, culturels ou politiques, qui brassent des milliers de personnes en pleine accélération de la circulation du virus, etc.

 

Nous vivons dans l'illusion d'un monde normal (au fait, quelle définition donner à ce mot ?), à tel point qu'un membre de ma famille me disait qu'il a la désagréable impression que "ce n'est pas tant les gens que l'on cherche à sauver à Noël, mais les commerçants"... Ajoutez à ce constat les multiples déclarations du trio Castex/Véran/Attal, le dernier s'employant chaque jour à faire augmenter progressivement le sentiment de danger, tout en affirmant paradoxalement qu'il n'y aura pas de mesures restrictives supplémentaires. S'agit-il de laisser aux Français la bride sur le cou pendant les fêtes, afin d'éviter l'explosion sociale, d'autant que le souvenir des gilets jaunes reste vivace ? Ou bien est-ce seulement pour sauver le commerce, dans la mesure où le gouvernement voit dans ce dernier une source de croissance et une politique territoriale (au demeurant, il y a alors du mouron à se faire...) ? Certaines mauvaises langues affirmeront que la réalité est beaucoup plus prosaïque : il serait malvenu de confiner à quelques encablures de l'élection présidentielle...

 

Mais en tout état de cause, la pandémie aura au moins eu l'avantage d'éliminer du débat public à peu près tous les sujets importants : la dette publique, les dépenses publiques, les inégalités de revenus, les inégalités de patrimoine immobilier, la pauvreté, etc. Quant au pouvoir d'achat, il a fort opportunément été placé au cœur des logorrhées médiatiques pendant trois semaines, comme le prix de l'électricité, afin d'être oublié aussitôt les fêtes de fin d'année arrivées !

 

En effet, dans l'ère du vide de la postmodernité, une information en chasse une autre quelle que soit son importance et l'humain ne pèse au fond pas très lourd dans la société du spectacle. Précisons que le livre de Guy Debord ne concerne pas le pain et les jeux de cirque, comme le croient trop souvent ceux qui ne l'ont pas lu, mais la domination de la marchandise sur nos vies dans le monde capitaliste. Tant et si bien que la première phrase de son livre, parallèle évident avec l’œuvre de Marx, est la suivante :   "Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s'annonce comme une immense accumulation de spectacles". Beaucoup plus loin, il précisera que "le spectacle n'est pas un ensemble d'images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images".

 

Une crise devrait être l’occasion de se poser des questions et de changer tout à la fois nos modes de production, nos modes de vie et avant tout nos façons de penser. Mais pour ce faire, il faut en priorité décoloniser l'imaginaire pour créer le monde d'après ! En République, ce sont les citoyens, considérés comme un ensemble coopératif, qui en ont le pouvoir, mais encore faut-il qu'ils s'en saisissent. À défaut, la minorité qui profite de ce système continuera à le présenter comme naturel, même s'il en résulte des dégâts au plus grand nombre...

 

Joyeux Noël tout de même !

 

Sur ce constat et cette invitation à l'action coordonnée, je vous souhaite un joyeux Noël et vous retrouverai la semaine prochaine pour mon dernier billet de l'année 2021 !

 

 

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17 décembre 2021 5 17 /12 /décembre /2021 13:02

 

 

Après mon billet sur les dysfonctionnements du monde économique, il m'a semblé utile de revenir sur une question qui m'a été posée par un étudiant sur le taux d'épargne de la nation. En effet, lorsque l'économie d'un pays est ouverte sur le monde, les politiques économiques sont souvent bien plus difficiles à coordonner, à tel point que certains parlent de malédiction de l'épargne faible. Mais de quoi s'agit-il ? Pour ceux qui seraient allergiques aux formulations mathématiques, vous pouvez sans préjudice de compréhension sauter le premier point.

 

Taux d'épargne de la nation et investissement

 

Au niveau macroéconomique, l'épargne de la nation (ou épargne nationale), agrège l'épargne des ménages, des entreprises et de l'État. L'on obtient alors l'identité comptable macroéconomique suivante :

 

Y = C+I+G+BC

 

où Y représente le PIB, C les dépenses de consommation, I les dépenses d'investissement , G les achats publics de biens et services, et BC le solde de la balance commerciale.

Puisque l'épargne est définie comme le revenu courant moins les dépenses en besoins courant, si l'on suppose pour simplifier que l'ensemble des dépenses de consommation (C) et des dépenses publiques (G) sont des dépenses en besoin courant, alors l'épargne d'une nation (S) s'écrit :

 

S=Y-C-G

 

L'on en déduit :

 

S-I=BC

 

Taux d'épargne de la nation et déficit extérieur

 

De cette dernière identité, l'on peut déduire que si l'investissement intérieur (I) d'un pays est constant (au moins à court terme), un taux d'épargne de la nation faible conduit souvent à une différence entre investissement et épargne négative (S-I<0), d'où tend un déficit commercial (BC<0).

 

En d'autres termes, lorsque le taux d'épargne de la nation - somme de l'épargne privée et de l'épargne publique en pourcentage du PIB - est structurellement faible et inférieur au taux d'investissement de la nation, alors cela tend à conduire à un déficit extérieur structurel.

 

Un impact sur la croissance

 

Pour financer le déficit extérieur, le pays en question va devoir s'endetter à l'extérieur, ce qui le rend dépendant des investisseurs internationaux et va le contraindre à les rassurer constamment sur sa capacité à rembourser sa dette extérieure. En effet, si ces investisseurs refusent de continuer à lui prêter, alors le pays peut faire face à une grave crise de sa balance des paiements et de change, c'est-à-dire une une dépréciation du taux de change et un donc un renchérissement des importations en valeur, ce qui in fine pèsera sur la croissance.

 

Pour l'éviter, le pays à taux d'épargne faible cherchera à attirer les capitaux en quête de rendement par une politique de taux d’intérêt élevés, suffisamment pour compenser aux yeux des investisseurs le risque d’insolvabilité extérieure et de change. Ce faisant, il peut certes réussir à attirer les capitaux étrangers, mais au détriment hélas de sa croissance nationale, minée par les taux d'intérêt trop élevés.

 

Ainsi, dans les deux cas, la croissance du pays à faible taux d'épargne nationale s'en trouve réduite, ce que d'aucuns qualifient de malédiction des pays à faible épargne ! Ce que nous venons d'expliquer est propre à une économie ouverte.

 

Mais certains commentateurs se font un plaisir d'occulter la possibilité de l'endettement extérieur et raisonnent alors à tort en économie fermée : Y = C+I+G (il n'y a donc plus de commerce international, d'où l'absence de la balance commerciale BC). Chemin faisant, ils en déduisent - toujours à tort - que l'épargne est un réservoir de liquidités finançant l'investissement, c'est-à-dire qu'ils font de l'identité comptable Y = C+I+G une causalité ramenant la question du financement de l'investissement à un marché des fonds prêtables. Dans ce cas, il faudrait alors tout faire pour inciter les plus riches à financer les investissements productifs et risqués, à grand renfort d'incitations fiscales (suppression de l'ISF, baisse de cotisations sociales...), quitte à diminuer les dépenses publiques les plus importantes en contrepartie...

 

Or, depuis Keynes, l'on sait que l’investissement génère sa propre épargne, ce que rappelle avec beaucoup d'à-propos Olivier Passet dans cette courte vidéo :

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