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5 avril 2012 4 05 /04 /avril /2012 10:31

 

montagne-dollar.jpg

 

LTRO : voici quatre lettres qui ont fait couler beaucoup d'encre dans la communauté économique ! Cette mesure, de par l'ampleur de son volume, mérite que l'on s'y attarde un peu.

 

De quoi s'agit-il ?

 

Il s'agit d'une opération de refinancement à long terme (Long-Term Refinancing Operation) proposée par la Banque centrale européenne (BCE). Plus précisément, la BCE offre aux banques de la zone euro des prêts illimités à trois ans à un taux préférentiel de 1 %, en vue de répondre à un grave problème de liquidité sur le marché interbancaire et éviter un credit crunch (pénurie de crédits). On se souvient qu'en 2011, les banques européennes n'avaient réussi à emprunter "que" 744 milliards de dollars pour couvrir près de 900 milliards de dollars de dettes. En effet, comment savoir ce qu'une banque a réellement dans son bilan comme produits toxiques ?

 

Quel est le montant des LTRO ?

 

Lors de la première opération de LTRO, le 21 décembre 2011, 523 banques étaient venus au guichet de la BCE pour emprunter quelque 489 milliards d'euros ! Le 29 février, la BCE a remis le couvert en offrant cette fois 529 milliards d'euros à environ 800 banques. Au total, c'est environ 1 000 milliards d'euros de liquidités qui ont été fournies au marché.

 

A quoi devait servir cet argent ?

 

Tout d'abord, cet argent doit permettre aux banques de faire face aux remboursements de leurs dettes passées, que certains ont qualifiées de mur de la dette : 813 milliards d'euros entre 2012 et 2013, selon Oddo Asset Management. Ces prêts de la BCE leur permettront donc d'échapper à des émissions obligataires très coûteuses actuellement.

 

Dans un second temps, les dirigeants politiques espéraient que ces liquidités serviraient à financer les PME... et les États, ce que d'aucuns n'ont pas manqué de qualifier avec un brin d'ironie "Sarko Trade". Concrètement, le LTRO permet aux banques de se financer à 1 % et d'acheter ensuite soit des obligations d'entreprises soit des titres d'État qui rapportent bien plus (par exemple 7 % il n'y a guère longtemps sur les titres italiens à 10 ans). Au final, ces achats de titres devaient déboucher sur une détente des taux d'intérêt.

 

Les opérations de LTRO furent-elles un succès ?

 

Pour les banques certainement, puisque cela leur a permis de faire face à leurs échéances et même de réaliser de juteux placements parfois. Mais en ce qui concerne l'économie réelle, le succès est loin d'être confirmé : L'Observatoire du Crédit logement/CSA constatait en mars 2012 une baisse de près de 50 % de la production de crédits immobiliers par rapport à mars 2011, l'activité du médiateur du crédit pour les entreprises continue de plus belle, les banques commerciales semblent réticentes à financer la trésorerie des entreprises, etc.

 

Pour les États, ce fut un succès à court terme en ce sens que les dettes souveraines trouvaient alors un nouveau débouché, les banques se mettant à acheter les titres d'État. Dans le détail, c'est surtout une alternative à l'achat direct de titres par la BCE, opération interdite par ses statuts mais inévitable sauf à laisser le système bancaire de la zone euro s'effondrer. Ainsi, plutôt que de négocier une véritable refondation des institutions européennes - dont la BCE - pour venir en aide directement et légalement aux États, les dirigeants politiques ont espéré à haute voix que la Banque centrale offre des liquidités aux banques pour qu’elles fassent le travail à sa place. Leur voeu fut exaucé... même si la détente sur les taux fut de courte durée (voir le cas de l'Espagne ici) et ne change rien au fond du problème de la zone euro

 

A long terme certains économistes redoutent des tensions inflationnistes. C'est en particulier le point de vue du président de la Bundesbank, Jens Weidmann, membre du conseil des gouverneurs de la BCE et faucon de la théorie monétariste. Or, il ne peut y avoir de risque inflationniste tant que la récession plane au-dessus des économies ! Le vrai risque est surtout de créer des banques "zombies" qui accèdent au refinancement auprès de la BCE bien qu'elles soient déjà insolvables... Curieusement, ce fait est très peu évoqué, alors même que le Japon est l'exemple concret de matérialisation d'un tel risque après la crise de 1997.

 

Mais si l'argent n'a servi ni à financer massivement les États, ni les entreprises et les ménages, où s'est-il endormi ? Réponse ci-dessous :

 

liquidity.jpg

 

[ Cliquer sur l'image pour agrandir ]

 

C'est la ligne use of the marginal lending facility qui nous intéresse. On y découvre que les banques ont déposé le 4 avril 773 milliards d'euros sur les comptes de la BCE, comme elles le font chaque soir à un niveau quasiment égal. Cela signifie simplement que les banques, au lieu de prêter aux autres agents économiques les liquidités obtenues à taux préférentiel, préfèrent les laisser dormir sur un compte.

 

Résumons : la BCE prête à 1 % aux banques, celles-ci utilisent partiellement cet argent pour faire face à leurs dettes et investir un peu dans les titres d'État afin de se faire de grosses marges, mais elles déposent la majeure partie sur un compte... à la BCE ! La boucle est bouclée et l'économie réelle est coulée !


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30 mars 2012 5 30 /03 /mars /2012 13:14

 

RL 27 mars 2012 - Copie

 

C'est cette question que j'ai abordée lors de ma conférence à Saint-Avold, dans le cadre de l'Université du Temps Libre de Metz (UTL). En effet, depuis la perte du triple A par les États-Unis et la France, je me suis souvent exprimé sur le rôle tenu par les agences de notation tant les questions furent nombreuses et les explications parcellaires. J'avais ainsi analysé ce non-événement économique sur les plateaux de TV Mosaïk et de France 3, après y avoir consacré un long billet sur mon blog. Cela, dans la continuité de l'entrée "agence de notation" que l'on trouve dans mon dictionnaire révolté d'économie.

 

Mais je me suis très vite aperçu que si le public souhaitait saisir le fonctionnement des agences de notation, il désirait surtout comprendre qui elles sont et comment elles ont pu acquérir un tel pouvoir. C'est pourquoi, j'ai cherché lors de ma présentation à remonter l'histoire de Standard & Poor's, Moody's et Fitch afin de comprendre à quoi sert cette précisément cette notation.

 

Il m'a dès lors été possible d'évoquer les dégâts causés (ou à venir !) par les plans de rigueur et les réformes sociales prises au nom du maintien du triple A. Ceci dans le but de mettre en évidence les contradictions économiques, sociales et politiques soulevées par la politique économique actuelle dans la zone euro (et en France en particulier), et donner quelques clés pour poser le bon diagnostic et changer les choses avant que le système n'explose !

 

Le Républicain Lorrain est venu suivre ma conférence à Saint-Avold où le public fut très nombreux :

 

RL-27-mars-2012.jpg

 

[ Cliquer sur l'image pour l'agrandir ]


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24 mars 2012 6 24 /03 /mars /2012 11:03

 

Crise-mondiale.jpg

 

Commençons par une évidence : la crise n'est pas finie ! Ni dans la zone euro, où les politiques d'austérité précipitent un peu plus chaque jour les États membres dans le gouffre, ni dans le monde en général où règne encore en maître le mythe du marché autorégulateur. Pourtant, les crises financières, bancaires, économiques, sociales - et bientôt politiques ! - auraient dû conduire les dirigeants politiques à réviser leur diagnostic, et partant les remèdes appliqués aux économies.

 

Ce n'est malheureusement pas le cas, puisque la voie de l'austérité est désormais suivie par quasiment tous les partis de gouvernement de la zone euro, en particulier en France. Je ne nie pas qu'un niveau stratosphérique d'endettement public puisse devenir problématique en termes budgétaires notamment, mais encore faudrait-il que l'on s'intéresse à ce qui est fait de cet argent. Si celui-ci peut servir au développement d'un pays, au travers de l'investissement dans des projets d'avenir (mais qu'est-ce qu'un projet d'avenir aujourd'hui en France ?), alors il génèrera de la croissance et débouchera sur une hausse durable du bien-être des nations, ce qui devrait être le but ultime de toute politique économique. 

 

Ne nous y trompons pas : ce que d'aucuns appellent crise des dettes souveraines n'est donc en fait que la conséquence d'un mal plus profond, qui trouve son origine dans l'abandon des prérogatives des États aux marchés financiers ! Dans le cas de l'Europe, un deuxième problème vient se greffer au premier : l'absence d'institutions fédérales nécessaires au bon fonctionnement de la zone euro.

 

Certains économistes libéraux, à l'instar de Pascal Salin, continuent néanmoins à affirmer que la crise n'est dû ni à des excès dans la finance, ni à une instabilité du capitalisme, mais à manque de liberté sur les marchés financiers :

 

 

C'est précisément pourquoi de nombreux économistes ont comme moi décidé de signer le manifeste des économistes atterrés, afin que soient proposées des alternatives à la doxa néolibérale. Les diverses fausses évidences ainsi que les contre-idées soumises au débat sont désormais disponibles sur le site web des économistes atterrés. Il ne reste plus qu'à espérer que les citoyens se saisissent rapidement de ces questions économiques, d'autant plus que le niveau économique de la campagne électoral en France est tangent à zéro...

 

Pour finir, il faut garder présent à l'esprit que la zone euro est dorénavant dans une situation de plus en plus intenable au vu des difficultés qui s'agrègent les unes aux autres : ratification d'un nouveau traité budgétaire porteur d'une récession encore plus forte, absence de volonté fédéraliste au sein de la zone euro, taux de chômage en nette hausse dans de nombreux pays, tensions sociales et politiques exacerbées,... L'euro serait-il dès lors rentré dans sa phase terminale ? C'est ce qu'affirme Jacques Sapir dans son dernier livre, interviewé en début d'année par Stéphanie Antoine sur France 24 :

 

 

En définitive, c'est maintenant qu'il faudrait se saisir de ces questions et changer, améliorer - révolutionner ? - le système économique !


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17 mars 2012 6 17 /03 /mars /2012 10:37

 

urne.jpg

 

Cette campagne électorale est pour l'instant loin d'avoir le niveau qu'on puisse espérer, d'autant qu'elle concerne tout de même la plus haute fonction du pouvoir exécutif de notre État. Actuellement, pour cacher le vide des idées, on brasse des évidences, on arrange les chiffres, on parle de tout sauf de l'essentiel, on ment (n'est-ce pas du reste consubstantiel à une campagne ?) et on ressort des placards des propositions anciennes. Petit florilège :

 

* la TVA sociale : c'est le prototype même de la fausse bonne idée qui revient tous les 5 ans. Après avoir coûté cher en sièges de députés lors des élections législatives de 2007, Nicolas Sarkozy a souhaité passer en force en présentant la mesure comme une arme anti-délocalisation... Or, j'avais montré dans un billet que, bien que parée désormais de toutes les vertus selon les dirigeants politiques, la TVA sociale est loin de constituer une réponse efficace à la perte de compétitivité des entreprises françaises.

 

* le chômage : depuis quelques mois, il est présenté comme volontaire, c'est-à-dire issu pour l'essentiel de la fainéantise des chômeurs, dans la plus pure tradition néolibérale qui cherche à se persuader que le marché du travail laissé sans entraves (donc sans SMIC, sans code du travail,...) conduirait nécessairement au plein emploi ! On ne peut qu'inviter ceux qui n'ont pas encore été totalement désintoxiqués d'allait relire Keynes ou, s'ils manquent de temps, la petite synthèse que j'en ai faite dans ce billet.

 

* les prix des carburants : François Hollande semble convaincu qu'il peut résoudre le problème par un gel des prix pendant 3 mois, avant de mettre en place une usine à gaz qui doit permettre de "geler les prélèvements fiscaux de l'Etat [sur les carburants] à un certain niveau". Marine le Pen, quant à elle, y va carrément au bazooka puisqu'elle propose de réduire la TICPE de 20 %, ce qu'elle financerait par une surtaxation des groupes pétroliers et gaziers. Or, le principe d'incidence fiscale, dont j'ai parlé notamment dans ce billet consacré à la hausse des carburants, nous apprend que, sous couvert d’aider les consommateurs, ces baisses de taxes et gels de prix seront captées par les producteurs de pétrole et ne profiteront que très peu aux consommateurs.

 

* le nombre de fonctionnaires : il semblerait que la cure d'amaigrissement, baptisée RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) dans le jargon administratif français, continue a être la seule idée de la plupart des gouvernements européens. Dans ce registre, Nicolas Sarkozy a affirmé que les effectifs de la fonction publique territoriale ont augmenté de 110 % sur les dernières années, alors qu'il suffit de se rendre sur le site de l'INSEE pour s'apercevoir qu'entre 1996 et 2008, la hausse était plutôt de 32 %...

 

* La dette publique : pour conserver le triple A de la France, le gouvernement avait annoncé qu'il fallait prendre des mesures d'austérité, comprenez réduire les dépenses publiques. Bien entendu, cela se ferait dans le respect de l'État-Providence... sauf que, pour satisfaire les marchés financiers, Xavier Bertrand a dû admettre que la mission emploi et travail (qui représente les crédits consacrés au travail et à l’emploi dans le budget de l'État) a perdu 12 %. Au moment où le chômage atteint des sommets, était-ce vraiment la bonne idée de satisfaire les marchés financiers de la sorte ? D'autant qu'ils nous l'ont bien rendu depuis... 

 

* le pouvoir d'achat : par ces temps de crise, il n'est pas difficile de vendre du rêve. Il y a Nicolas Sarkozy qui continue de se persuader que le pouvoir d'achat en France a augmenté de 1,4 % tous les ans pendant la crise, oubliant de préciser qu'il faisait référence à l’évolution du pouvoir d’achat global du pays, qui ne constitue pas la méthode utilisée par l'INSEE ni Eurostat en Europe... et pour cause, cela ne correspond pas au pouvoir d'achat individuel ! Mais il y a aussi Marine le Pen qui promet une hausse de 200 euros sur certains salaires, par la création d’une "Contribution sociale sur l’importation", sorte de taxe qui portera sur l’ensemble des biens et des services importés chaque année en France. Bien entendu, elle omet d'expliquer que ce sont au final les consommateurs français qui la paieront lorsque les prix des produits importés auront augmenté ! Enfin, François Hollande n'échappe pas à la critique en croyant qu'un encadrement des loyers permettra aux ménages français de se loger sans trop amputer leur pouvoir d'achat.

 

* le déficit commercial : il faudrait passer une vie entière à répéter que cet indicateur n'apporte que très peu d'informations utiles, comme l'explique Jean-Paul Fitoussi. Ceux qui suivent l'évolution du déficit commercial comme le lait sur le feu, ne sont que des colbertistes qui s'ignorent... et qui ignorent comment la balance commerciale se construit ! En effet, on peut très bien imaginer que lorsqu'une économie est en crise, celle-ci diminuera probablement ses importations ce qui aura pour effet de réduire le déficit commercial si les exportations se maintiennent. Or, il est difficile dans ce cas de figure de soutenir que la réduction du déficit commercial est une bonne chose ! Pourtant, quasiment tous les candidats semblent partager la même amertume lorsqu'il est question du déficit commercial de la France. Ainsi, François Bayrou en est-il même arrivé à chercher un obscur lien entre déficit commercial et chômage...

 

* la pauvreté : Claude Guéant peut facilement annoncer une baisse de la pauvreté en France, puisqu'il s'appuie sur un indicateur légalement truqué, le taux de pauvreté monétaire ancré dans le temps. On l'avait découvert lorsque Martin Hirsch était Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté (gouvernement Fillon), et qu'il lui avait semblé nécessaire de casser le thermomètre officiel de la pauvreté pour atteindre son objectif de réduction de celle-ci. En effet, cet indicateur fantaisiste prend comme référence le seuil de pauvreté de 2006 et le réévalue avec l'inflation, sans tenir compte de l'évolution des revenus ! 

 

 

A tout ceci, il faudrait encore ajouter la polémique de chiffres sur la viande halal, l'immigration, le coût des 35h, le coût du travail, le crédit impôt recherche, etc. Chacun de ces thèmes témoignent alors d'un mélange de méconnaissance, de récupération ou même de mensonge sur les chiffres et les faits, de sorte que les Français ne voient plus bien l'intérêt de suivre une telle campagne électorale et ne jugeront plus sur les faits, mais sur des éléments subjectifs voire insignifiants (sympathie, suggestion d'une personne de la même classe sociale,...). C'est l'effet d'allodoxia, défini par Pierre Bourdieu.  

 

Peut-être un jour les politiques comprendront-ils que s'ils ne trouvent plus de solution aux maux économiques, c'est parce qu'ils nous ont enfermés dans un système économique mortifère qui crée des inégalités, des crises et du chômage, et qu'il faudra du courage pour tout changer !

 

A quand le réveil du citoyen ?



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10 mars 2012 6 10 /03 /mars /2012 12:26

 

humour-agences-de-notation.jpg

 

Depuis que la France a perdu son fameux AAA le 13 janvier dernier, les commentaires et analyses n’ont cessé de se succéder sur les conséquences de cette dégradation de la note souveraine de notre pays. J'avais moi-même analysé ce non-événement économique sur les plateaux de TV Mosaïk et de France 3, après y avoir consacré un long billet sur mon blog. Cela, dans la continuité de l'entrée "agence de notation" que l'on trouve dans mon dictionnaire révolté d'économie (cliquer sur l'image pour agrandir) :

 

entrée agences

Par-delà la fixation qui a été faite sur la perte du triple A, c’est en filigrane la crédibilité de la politique économique menée en France – et en Europe – qui est interrogée. C'est pourquoi, il m'a semblé indispensable de proposer une conférence sur les agences de notation, où je pourrai expliquer entre autres la nature et le fonctionnement de ces agences, afin de comprendre à quoi sert cette notation.

 

Je souhaite dès lors évoquer les dégâts causés par les mesures d’austérité et les réformes sociales prises au nom du maintien du triple A. Ceci dans le but de mettre en évidence les contradictions économiques, sociales et politiques soulevées par la politique économique actuelle, et donner quelques clés pour poser le bon diagnostic qui fait toujours encore défaut !


Cette conférence de 2h environ, se tiendra à l’Université Populaire de Forbach, le jeudi 15 mars 2012 à 19h. Elle s’adresse à tous ceux qui souhaitent comprendre la politique économique suivie par la France, et ce à quelques semaines de l’élection présidentielle ! La présentation se veut accessible à tous et ne nécessite aucune connaissance préalable. Toutes les questions seront les bienvenues à la suite de la présentation.

 

L’entrée est fixée à 5€ pour les personnes non inscrites au cycle de conférences économiques de l’UPT.


 

Renseignements et inscriptions auprès de l’UPT

 

15 rue du Parc

57600 Forbach

  Tél : 03 87 84 59 67

Email : upt.vhs@wanadoo.fr 


 

Vous trouverez ci-dessous l'article que le Républicain Lorrain a publié pour annoncer ma conférence (cliquer sur l'image pour l'agrandir) :

 

RL-8-mars-2012.jpg

 

N.B : l'image de ce billet provient du site http://www.les-crises.fr

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4 mars 2012 7 04 /03 /mars /2012 11:26

 

keynes.png

 

Le propre du néolibéralisme est de faire croire qu'un raisonnement apparemment simple et compréhensible par tous constitue une prescription pour résoudre tous les problèmes de l'économie. La plus célèbre de ces prescriptions est sans conteste celle concernant le marché du travail : dans la perspective néoclassique, reprise par les néolibéraux, le chômage ne peut résulter que d'une insuffisante flexibilité du marché du travail. Dit autrement, le chômage ne peut provenir que de mécanismes qui entravent la baisse du salaire jusqu'à son niveau d'équilibre, pour lequel les offreurs (les salariés) et les demandeurs (les entreprises) y trouvent leur intérêt.

 

Les néolibéraux en déduisent donc actuellement que la lutte contre le chômage passe nécessairement par une baisse du salaire, qui n'est possible que si l'on abandonne toute référence à un salaire minimum, ce dernier étant accusé d'empêcher les mécanismes de marché de réduire le salaire à son niveau d'équilibre. Si leur victoire politique n'est plus à démontrer depuis 1980, les néolibéraux et autres faucons associés ont de plus en plus de mal à justifier leur idéologie en économie (cliquer sur le graphique pour l'agrandir) :

 

chomage-2012.jpg

 

[ Source : Eurostat ]

 

Il ressort de ce graphique que, dans l'Union européenne à 27, le taux de chômage s’est élevé à 10,1 % en janvier 2012, contre 9,5 % en janvier 2011... avec des records enregistrés en Espagne (20,6 % à 23,3 % en 1 an), en Grèce (14,1 % à 19,9 % entre novembre 2010 et novembre 2011), ainsi qu'en Irlande et au Portugal (14,8 % chacun).

 

Ne serait-ce pas justement les pays à qui la troïka a prescrit des plans d'austérité censés sauver leur économie de la "faillite" ?

 

En ces temps de crise où les idées se brouillent et sont souvent récupérées pour créer de l'idéologie, le comble est que beaucoup de ces institutions font désormais référence à Keynes et à sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie (publiée en 1936) pour justifier l'injustifiable ! Or, Keynes n'a-t-il pas déclaré que le fonctionnement du marché du travail, tel que le voient les néoclassiques, est une analyse "supposée simple et évidente qui a été fondée, pratiquement sans discussions, sur deux postulats fondamentaux" ? Il va même plus loin en écrivant "il se peut que la théorie classique décrive la manière dont nous aimerions que notre économie se comportât. Mais supposer qu'elle se comporte réellement ainsi, c'est supposer que toutes les difficultés sont résolues".

 

Le génie de Keynes consista précisément à revenir sur ces fausses évidences. Tout d'abord, il insista sur le fait que l'analyse néoclassique du marché du travail repose en fait sur un raisonnement en équilibre partiel, qui néglige les éventuelles interactions entre les marchés : il concède ainsi que, si une entreprise baisse les salaires, elle pourra dès lors réduire les prix de vente de ses produits et accroître ainsi sa part de marché et au final embaucher des salariés supplémentaires. Mais l'erreur des néoclassiques est d'oublier que, si ce comportement devait se généraliser à toutes les entreprises, il deviendrait impossible de raisonner comme si toutes les autres variables restaient identiques : une baisse des salaires dans toutes les entreprises réduirait alors inévitablement les débouchés et conduirait très certainement à l'aggravation de la situation économique.

 

N'est-ce pas exactement ce que l'on constate aujourd'hui dans les pays où l'austérité dans les dépenses publiques est conjuguée à des coupes claires dans les salaires ?

 

Keynes prévoit également le cas où un seul pays pratiquerait cette politique de baisse générale des salaires, dans le but d'accroître sa part du marché mondial. Il rappelle à nouveau qu'il s'agit-là d'un raisonnement en équilibre partiel, puisqu'il néglige les probables réactions des autres pays qui finiront tôt ou tard par pratiquer la même politique. Et Keynes de conclure que si tous les pays mettent en placent de telles politiques de réduction des salaires, alors il s'ensuivrait une internationalisation de la récession.

 

N'est-ce pas exactement la politique suivie par l'Allemagne qui demande, au travers du nouveau traité budgétaire, que tous les États s'astreignent à une austérité généralisée, alors qu'elle pratique une politique de déflation salariale interdite par les traités ?

 

Enfin, Keynes réfute l'idée même qu'il existerait un marché du travail comme le présente les néoclassiques, c'est-à-dire avec une demande de travail des entreprises qui augmente lorsque le salaire réel diminue (fonction décroissante), et une offre de travail des salariés qui augmente lorsque le salaire réel augmente (fonction croissante). Pour lui, même s'il admet qu'à l'équilibre le salaire égale le produit marginal du travail, la demande de travail ne résulte pas d'un mécanisme aussi simple que celui décrit par les néoclassiques, en particulier parce que les salariés et les patrons ne sont pas des agents économiques libres et égaux. Cela revient en fait à dire que Keynes avait bien perçu que sur le marché du travail les salariés étaient loin d'être en position de force dans les négociations, et qu'il fallait tenir compte de ce système hiérarchisé pour analyser le marché du travail.

 

Du côté de l'offre de travail, Keynes réfute l'idée qu'elle augmenterait avec le salaire réelle. Sa principale explication tient au fait que salariés et patrons s'engagent sur la base du salaire nominal, car l'inflation n'est pas connue au moment de la signature (la notion d'inflation est-elle au reste comprise par la majorité des salariés et des patrons ?). Par ailleurs, il confronte la théorie néoclassique à ses propres contradictions, puisque si cette théorie était valide, les salariés devraient réduire leur offre de travail lorsque les prix à la consommation (= inflation) augmentent, leur salaire réel (=salaire nominal - inflation) diminuant. Or ce n'est pas le cas... Selon Keynes, le niveau de l'emploi serait lié à celui de la production, qui dépend de la demande effective. Cette dernière, qui correspond au final à la demande solvable, dépend elle-même des dépenses de consommation et des dépenses d'investissement.

 

La conclusion de Keynes est donc sans appel et mériterait d'être méditer longuement par les institutions qui imposent l'austérité généralisée dans le monde : si le marché du travail ne fonctionne pas comme le présentent les néoclassiques, alors il est illusoire d'espérer le plein-emploi en flexibilisant encore plus le marché du travail ! Pire, la diminution généralisée des salaires exerce un effet dépressif sur la demande et donc sur l'activité des entreprises, ce qui débouche sur une chute du niveau de l'emploi !

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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 11:06

 

potdevin.jpg

 

En ces temps de campagne électorale, s'il y a un thème économique qui semble être oublié c'est bien celui de la corruption. C'est pourquoi, l'ONG Transparency International (TI) a adressé aux candidats à l’élection présidentielle 7 propositions pour renforcer la transparence et l’intégrité de la vie publique. Les premières réponses sont disponibles ici. Les candidats ont jusqu'à la mi-mars pour donner une réponse, puisque TI France rendra public, dans la semaine du 19 mars, un bilan de ces publications. Affaire à suivre donc !

 

Mais au fait, qu'appelle-t-on corruption ? Un site comme la Toupie la définit comme suit : "La corruption est l'utilisation abusive d'un pouvoir reçu par délégation à des fins privées comme l'enrichissement personnel ou d'un tiers (famille, ami...). Elle consiste, pour un agent public, un élu, un médecin, un arbitre sportif, un salarié d'entreprise privée..., de s'abstenir de faire, de faire, de faciliter quelque chose, du fait de sa fonction, en échange d'une promesse, d'un cadeau, d'une somme d'argent, d'avantages divers...". Il s'agit donc autant des dessous de table, des pots de vin, des bakchichs, du favoritisme, des extorsions, de la concussion, etc. Ainsi expliqué, on comprend mieux pourquoi la corruption est un problème très ancien que l'on rencontrait déjà chez Aristote. De nos jours, on distingue en général la corruption active (proposer par exemple de l'argent) de la corruption passive (accepter cet argent).

 

Ce qui rend la corruption très grave, c'est que selon une estimation de la Banque mondiale, entre 2001 et 2002, plus de 1 000 milliards de dollars auraient été détournés en pots-de-vin, soit environ 3 % des échanges de la planète pour cette même période ! Certains illustres dictateurs comme Suharto en Indonésie, Ferdinand Marcos aux Philippines, Mobutu au Zaïre et Abacha au Nigeria, détenant la palme du détournement selon Transparency International qui estime les sommes captées à plusieurs milliards de dollars !

 

L'OCDE a mis en place en 1997 une Convention anti-corruption, qui établit des normes juridiquement contraignantes pour faire face à la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales. Ratifiée par 37 pays, elle s'accompagne également de recommandations et de commentaires qui font désormais partie d'un livret. Il est bon au reste de rappeler que l’OCDE, le Conseil de l’Europe et les Nations Unies ne définissent pas précisément la corruption, mais plutôt les comportements de corruption. C'est ainsi que l'OCDE vient de consacrer une étude à l’identification et à la quantification des produits de la corruption active dans les transactions commerciales internationales, dont les conclusions (payantes) sont disponibles sur son site.

 

Chaque année, Transparency International publie un Indice de Perception de la Corruption (IPC) qui s'étend de 0 (haut niveau de corruption perçu) à 10 (haut niveau d’intégrité perçu), et qui permet de classer 183 pays en fonction de la perception du niveau de corruption affectant leur administration publique et classe politique (cliquer sur la carte pour accéder à la ressource en ligne).  Il est calculé sur la base de données issues de 17 enquêtes portant notamment sur l’application des lois anti-corruption, l’accès à l’information ou encore les conflits d’intérêts. Les limites de la méthodologie font qu'il n'est pas possible de comparer la note d'un pays d’une année sur l’autre.

 

corruption1.jpg

[ Source : Transparency International ]

 

On constate sur cette carte - plus la zone est sombre et plus l'indice de perception de la corruption est élevé - que de nombreux pays obtiennent une note inférieure très faible. Plus précisément, deux tiers des pays évalués obtiennent une note inférieure à 5. En haut du classement on trouve la Nouvelle-Zélande (9,5/10) suivie du Danemark (9,4/10) et de la Finlande (9,4/10), tandis qu'à l'autre extrémité se trouvent la Somalie (01/10) et la Corée du Nord (01/10). La France arrive au 25ème rang avec une note de 07/10, loin derrière l'Allemagne (08/10) et le Luxembourg (08,5/10). On se demande du reste ce qui a bien pu pousser les observateurs internationaux à avoir une image si négative de l’administration et de la politique française... Le classement général peut être consulté ici.

 

Pour finir, il est intéressant de consulter le rapport Système National d’Intégrité qui évalue en quelque sorte le dispositif anti-corruption en France, en analysant les principales institutions jouant un rôle dans la prévention et la lutte contre la corruption : Parlement, gouvernement, Cour des comptes, mais également partis politiques, médias, etc. La conclusion est que les lois existent mais ne sont pas suffisamment appliquées, ce qui semble signifier que la lutte contre la corruption n'est pas une priorité politique. Ah bon, nous n'avons toujours pas une République irréprochable ?

 

 

N.B : la photo de ce billet provient d'un article du site 7sur7.be, qui rappelle que "le montant du pot-de-vin moyen a plus que triplé en Russie en 2011 par rapport à l'année précédente, pour atteindre l'équivalent de près de 6.000 euros, a indiqué vendredi un responsable du ministère de l'Intérieur cité par l'agence Interfax".

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18 février 2012 6 18 /02 /février /2012 12:42

pétrole suicide

 

Il n'aura échappé à personne que les prix des carburants poursuivent leur envolée et battent désormais des records historiques, comme en témoignent les chiffres publiés par la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) à partir des données fournies par les stations-service, et que l'on peut retrouver sur le site suivant :

 

prix-carburants2.jpg

 

[ Source : http://www.prix-carburants.gouv.fr ]

 

En moyenne, le litre de sans plomb 95 s’est vendu la semaine dernière à 1,5787 euro et le litre de sans plomb 98 à 1,6184 euro. Même le gazole, qui représente environ 80 % de la consommation française de carburants automobiles, suit une tendance haussière avec un litre à 1,4180 euro en moyenne.

 

 

 

A ce stade, il faut rappeler comment se forme le prix du litre d'essence. En France, au prix HTT (hors toutes taxes) de l'essence est ajouté une Taxe Intérieure sur les Produits Pétroliers (TIPP) perçue sur les volumes vendus, ainsi qu'une TVA appliquée sur le prix TIPP comprise. On obtient alors le prix TTC de l'essence :

 

carburant-tipp.jpg

 

[ Source : Ouest France  ]

 

Mais comment se forme le prix HTT de l'essence ? Celui-ci dépend essentiellement du cours du baril de pétrole et de la marge des transporteurs, distributeurs et raffineurs. Mais cette dernière, même si elle est en hausse, ne suffit pas à expliquer la hausse des prix actuels des carburants.

 

On en déduit donc que les hausses actuelles TTC que nous connaissons, sont essentiellement liées au cours du baril de pétrole et au taux de change euro/dollar. Pour le dire autrement, le cours du baril est élevé en raison notamment des tensions géopolitiques en Iran et de la baisse de l'euro par rapport au dollar qui renchérit les importations en dollar comme le pétrole.

 

C’est à ce moment qu’apparaissent les propositions populistes consistant soit à réduire les taxes sur l’essence ou à ressusciter la TIPP flottante, soit à bloquer les prix des carburants. Or, le principe de l’incidence fiscale permet de montrer que, sous couvert d’aider les consommateurs, ces baisses de taxes seront captées par les producteurs de pétrole et ne profiteront que très peu aux consommateurs.

 

J'avais exposé ce principe dans une petite vidéo, réalisée lorsque la Maison Blanche envisageait de réduire les taxes sur les carburants durant l'été 2008. Dans le cadre d'un modèle simple (vers la 5e minutes de la vidéo), j'explique pourquoi il n'y a pas grand chose à attendre d'une telle mesure...

 


 

 

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11 février 2012 6 11 /02 /février /2012 10:54

grece_dette_sysiphe.png

 

Le propre de l'idéologie économique mortifère est de justifier une préconisation même lorsque celle-ci conduit manifestement à une catastrophe. C'est le cas en Grèce, où le gouvernement de coalition a mis en place un nouveau plan d'austérité, condition sine qua non réclamée par la troïka (Union européenne, FMI, BCE) pour débloquer des fonds à la Grèce et lui éviter ainsi un défaut de paiement en mars, date à laquelle elle doit rembourser 14,5 milliards d'euros de prêts arrivant à échéance.

 

Bien entendu, le Premier ministre grec, Lucas Papademos, s'est félicité de cette décision arguant que sans cet accord le pays aura plongé dans le "chaos incontrôlé". C'est là précisément que l'on peut dénoter l'idéologie qui préside à ces décisions, car depuis maintenant 3 ans que la Grèce s'impose des plans d'austérité, le résultat est le suivant :

 

croissance-Grece.jpg

[ Source des données : Eurostat ]

 

Chaque année on déclarait que la reprise était en vue, mais rien ne venait... Le pays a donc pratiqué saignée sur saignée, pensant certainement que les médecins-économistes savaient ce qu'il fallait faire pour relancer l'économie. Plus prosaïquement, le gouvernement de Georges Papandréou comme celui de Lucas Papademos ne voyait pas trop comment faire face aux obligations financières de l'État sans le concours de la troïka. C'est ce qui explique que le gouvernement grec a cédé à peu près tout ce qui restait de souveraineté nationale à la troïka, au risque de s'aliéner son propre peuple. Désormais, le FMI estime que la récession devrait se poursuivre jusqu'en 2012, et que la reprise ne viendrait en 2013 qu'à la condition de pratiquer encore plus d'austérité !

 

Celle-ci devrait passer par la suppression de 15 000 emplois dans le secteur public en 2012 et une réduction de 20 % du salaire minimum, le tout mâtiné d'une énième réforme des retraites et assaisonné d'une baisse drastique des dépenses publiques. Lorsqu'on se rappelle que la Grèce a déjà réduit son déficit public de 5 % du PIB depuis 2010, on comprends mieux l'exaspération des citoyens grecs, qui se demandent quels efforts ils peuvent encore faire pour démontrer leur bonne foi à l'Union européenne.

 

Dans ce contexte, rien d'étonnant donc à ce que l'annonce de ces nouvelles mesures d'austérité aient provoqué des protestations, deux grèves générales étant prévues. De manière symbolique, le principal syndicat de police grec a même menacé de réclamer des mandats d'arrêt contre les représentants de la troïka dans le pays, pour avoir cherché à abolir la démocratie et la souveraineté nationale ! Les Grecs ont tous encore en mémoire l'inconcevable proposition allemande visant à placer la Grèce sous tutelle économique de l'Union européenne, remplacée depuis par une idée tout aussi inepte consistant à bloquer sur un compte les intérêts dus par l'État grec ! Le couple Merkozy a-t-il seulement conscience qu'il s'attaque là au dernier pan de la souveraineté nationale de la Grèce, en lui demandant de privilégier d'abord le remboursement de sa dette à la résolution de la grave crise sociale qui traverse depuis lors le pays ?

 

document grèce

 

[ Cliquer sur l'image pour voir la vidéo ]


Disons-le sans ambages : la Grèce fera tôt ou tard défaut sur sa dette, et ce ne sont pas les négociations sur une réduction "volontaire" du montant de la dette publique qui y changera quelque chose. Le pays se trouve en effet dans une situation d'insolvabilité budgétaire et extérieure qui ne peut s'améliorer, même avec une réduction importante de sa dette publique. C'est du reste ce que dit en substance l'agence de notation Standard and Poor's, qui émet des doutes sur la soutenabilité de la dette publique puisque seule une petite composante de la dette subirait la décote de 70 % prévue.

 

L'analyse part du fait que la solvabilité budgétaire est assurée dans le temps lorsque le déficit public est inférieur au produit de l’endettement public et de la croissance en valeur. Sur cette base, et au vu de la faible croissance attendue en Grèce, il faudrait une réduction de plus de 100 points de PIB de la dette publique pour rétablir la solvabilité budgétaire ! En ce qui concerne la solvabilité extérieure, celle-ci est assurée dans le temps si le déficit courant est inférieur au produit de l'endettement extérieur et de la croissance en valeur. Or, l’endettement extérieur de la Grèce s'élevant à environ 190 % du PIB, il faudrait donc une réduction conséquente du déficit courant pour rétablir la solvabilité extérieure. Mais comment demander à un peuple qui commence à manquer du strict nécessaire, de se priver encore du peu qu'il importe ?

 

Lorsqu'on parle de la décote sur la dette publique, d'aucuns s'imaginent un peu trop vite qu'un défaut total sur la dette résoudrait tous les problèmes. Loin s'en faut ! Le problème de l'insolvabilité extérieure dont je viens de parler restera le même, mais se conjuguera cette fois aux dégâts qu'un défaut total ne manquerait pas d'entraîner sur les banques grecques qui ont acheté beaucoup d'obligations d'État. Pour comprendre cela, commençons par examiner la détention de dette publique grecque par les banques des pays de la zone euro :

 

dette-banques.jpg

[ Source : Natixis, flash économie n°108 ]

 

Complétons ces données par un tableau présentant le montant des fonds propres détenus par les banques des pays de la zone euro (cliquer sur le tableau pour agrandir) :

 

dette-banques2.jpg

 

[ Source : Natixis, flash économie n°108 ]

 

Le constat est sans appel : avec 27 milliards d'euros de fonds propres et 54 milliards de titres de la dette publique grecque, les banques grecques peuvent, en cas de défaut total, y laisser plus que leur maillot de bain puisque les pertes pour le système bancaire s'élèveraient donc à 200 % des fonds propres ! Celles-ci feraient donc faillite et il serait nécessaire de les recapitaliser avec des fonds publics probablement, ce qui nuirait aux finances publiques.

 

Néanmoins, cette éventualité serait moins terrifiante si elle était associée à une volonté avérée de reprendre en main les systèmes bancaires et financiers, pour enfin les mettre au service de l'intérêt général. Malheureusement, cette politique économique de croissance pour tous fait défaut à l'heure actuelle. Le poids de l'idéologie néolibérale est si fort, que nombre de décideurs croient encore qu'une fois le pays saigné à blanc, la croissance reviendra comme par enchantement couronner les souffrances et privati(sati-)ons passées. C'est le cas du gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, qui a présenté à Jean-Pierre Elkabbach sur Europe 1 un florilège de l'argumentation néolibérale (vidéo disponible ci-dessous) :

 

 

* "Il faut que les Grecs s'aident eux-mêmes" : argument typique de la vulgate néolibérale, qui laisse entendre que chacun est responsable de ses problèmes, oubliant de préciser que la Grèce a déjà perdu sa souveraineté économique et ne fait donc que subir les prescriptions de la troïka.

 

* "Il n'y a pas moyen de faire autrement, on ne se redresse pas sans efforts" : un classique que l'on retrouvait en Argentine ou au Mexique dans les années 1990, et qui est à rapprocher du TINA (There is no alternative) de Margaret Thatcher. Bref, c'est bon pour vous par principe, donc vous appliquez sans réfléchir !


* "La Grèce doit faire comme ont fait d'autres pays qui ont été en difficulté, qui sont parfaitement en ligne avec le programme de redressement qu'ils ont prévu" : Monsieur Noyer est-il certain que l'Irlande et le Portugal se portent désormais mieux, avec respectivement 14,5 % et 13,6 % de taux de chômage en décembre 2011, selon Eurostat (moyenne de 9,9 % au sein de l'UE à 27) ?

 

 

En fait de prospérité, c'est un pays exsangue que ces politiques auront réussi à dé-construire ! Comme le rappelle Michel Aglietta dans un article du Monde, "la première règle d'or est de ne pas réduire précipitamment l'endettement de l'État tant que le secteur privé ne peut pas soutenir l'économie". Concernant la Grèce, il en conclut, au vu des troubles sociaux et politiques que connaît le pays, que "dans les conditions actuelles, la Grèce a presque intérêt à mener ce pari risqué [sortir de l'euro]"...

 

Qui peut en effet croire qu'un peuple qui a connu la dictature politique puisse accepter encore longtemps la tyrannie économique qui débouche sur le chaos social ?

 

N.B : l'image de ce billet provient du site soleilvert


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7 février 2012 2 07 /02 /février /2012 14:04

dette2

 

La question de la dette a gagné en intensité avec la crise, puisque les États de la plupart des économies développées du monde se sont massivement endettés pour relancer la croissance et venir en aide à leur système bancaire : la dette publique des États-Unis a ainsi dépassé 14 000 milliards de dollars début 2011, un niveau inégalé dans l’histoire du pays ! En Europe, suite aux difficultés rencontrées par les économies de la Grèce et de l’Irlande, la question des finances publiques s’est posée avec une acuité particulière, témoignant du rôle important joué par la dette dans la gestion d’un État.

 

J'ai souvent cherché à rendre compte de la dynamique de la dette et de ses implications sur l'économie au travers des billets de mon blog. C'est pourquoi, mon éditeur Ellipses m'a proposé d'écrire un livre qui s'adresserait à tous ceux qui souhaitent comprendre les débats actuels sur la dette. Il pourra ainsi, tout particulièrement, être lu avec profit par les étudiants des classes préparatoires économiques et commerciales, ainsi que ceux cherchant un point d'entrée dans le monde économique ou préparant des concours (IEP, concours administratifs, grandes écoles,…).

 

Ce livre se propose de guider le lecteur dans les méandres de la dette d’un État, en proposant des définitions précises, présentées de manière abordable et illustrées d’exemples, de schémas et de graphiques (41 figures et 19 tableaux). Les points les plus ardus sont amenés progressivement, et tout au long du texte des encadrés ont été insérés pour développer des points précis. Pour une plus grande lisibilité, les idées fortes d’un chapitre sont résumées dans un encart spécial dénommé « à retenir », faisant ainsi de ce livre un outil pratique que l’on peut consulter lorsque l’on cherche un point précis. Parmi les nombreux points traités, on peut citer les suivants :


     * Comment est construit le budget de l’État ?

 

     * Quelles différences y a-t-il entre dette publique, dette extérieure et dette totale ?

 

     * Quelles sont les théories qui rendent compte des effets de l’endettement public ?

 

     * L’endettement a-t-il toujours été utilisé dans l’histoire 

 

     * Comment les États font-ils face au service de la dette ?

 

     * Les États grec et irlandais sont-ils menacés de faillite ?

 

     * La dette publique est-elle un fardeau pour les générations futures ?

 

 

Le Républicain Lorrain vient de consacrer un article à la parution de mon livre :

 

RL-28-Janvier-2012.jpg

 

[ Cliquer  sur l'image pour agrandir ]


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