Dans une récente conférence sur le monde économique et social de demain, je me montrais très pessimiste sur la capacité des gouvernements à régler les graves problèmes actuels, d'autant que tout laisse à penser que leur objectif principal est le retour au monde d'avant : business as usual ! Il s'agit pourtant d'une occasion unique de se poser des questions sur nos modes de vie, de production et de consommation, pour imaginer le monde d’après. Dans ce contexte, les très sombres prévisions de la Commission européenne rappellent que la crise économique et sociale est devant nous et qu'il faudra bien un jour s'atteler à changer les choses...
Prévisions de croissance en berne
Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission, a résumé le grand désarroi des dirigeants politiques par cette phrase : "la deuxième vague de la pandémie anéantit nos espoirs d'un rebond rapide". En effet, les prévisions sont sombres :
[ Source : Le Figaro ]
Hausse attendue du chômage
Dans ses prévisions d'automne, la Commission européenne admet que le chômage est un fléau, qui a "fortement grevé les moyens de subsistance de nombreux Européens" :
[ Source : Eurostat ]
Il est cependant vrai que les mesures prises par les États membres - dont le chômage partiel - ainsi que les initiatives lancées au niveau de l'UE ont contribué à atténuer l'impact négatif de la pandémie sur l'emploi. On notera cependant l’optimisme indéfectible de la Commission, qui tout en concédant la hausse probable du chômage en 2021, anticipe une décrue en 2022 à mesure que l'économie européenne se redressera...
Crise(s)
Il serait réducteur et même conceptuellement faux de voir dans la crise actuelle une simple récession économique cyclique, qui laissera tôt ou tard place à une reprise économique. Au fond, cette vision erronée de la situation consiste à se persuader que la reprise économique résultera, comme à chaque crise du système capitaliste, d'un peu de patience et de quelques plans relance plus ou moins ambitieux.
Mais rien n'est plus faux, dans la mesure où cette fois ce n'est pas le système économique ou financier qui a déraillé, mais les gouvernements qui ont arrêté volontaire l'économie en raison de la crise sanitaire. Dès lors, sommes-nous véritablement appareillés pour répondre efficacement à une telle crise provoquée par un virus ? Je ne le crois pas, d'autant qu'en l'absence de traitement contre le coronavirus, les gouvernements sont - qu'on le veuille ou non - condamnés à une politique de stop and go, c'est-à-dire de confinement/déconfinement.
Et à force de ne parler que de l'économie, on en viendrait même à oublier que les corps social et politique français étaient déjà en passe de se disloquer avant la covid-19, en raison des inégalités croissantes, de la hausse de la pauvreté, de l'individualisme érigé comme vertu, des compromissions électorales et de la dissolution des notions de peuple et de souveraineté dans un grand fatras appelé société civile (l’archipel français selon Jérôme Fourquet). Quia ventum seminabunt et turbinem metent ! Et je ne parle même pas de la crise écologique... Gare alors à la dynamite sociale qui guette et qui ferait passer les gilets jaunes pour un simple mouvement de contestation !
P.S. L'image de ce billet provient de cet article de la Croix.