Après mes billets sur les sujets absents de la campagne présidentielle et sur la fête du Travail, il me semble utile de revenir sur la question du pouvoir d'achat, puisque selon une enquête CSA Research pour Cofidis, il manquerait en moyenne 490 euros aux personnes interrogées pour vivre convenablement. Mais encore faut-il s'entendre sur le constat : qu'est-ce que le pouvoir d'achat ? Comment le mesure-t-on ? Quels sont les principaux facteurs qui vont peser sur le pouvoir d'achat ?
Qu'est-ce que le pouvoir d'achat ?
Je me contenterai de donner ici quelques éléments de compréhension pour le besoin de mon analyse. Le lecteur intéressé par les questions de pouvoir d'achat, d'inflation, de prix et de choix dans la consommation, pourra utilement se reporter à l'un de mes livres aux éditions Ellipses, Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'économie ! ou Les grands mécanismes de l'économie en clair - 2e édition (chapitre 2 et 3).
Le pouvoir d'achat correspond à la quantité de biens et de services qu’un ménage peut acheter avec ses revenus ; il dépend du niveau des revenus mais aussi de celui des prix. Dès lors, l’évolution du pouvoir d’achat correspond à la différence entre l’évolution des revenus des ménages et l’évolution des prix. Bien entendu, si la hausse des revenus est inférieure à celle des prix, alors le pouvoir d’achat diminue...
Dans ses calculs de pouvoir d'achat, l'Insee s'appuie sur le revenu disponible des ménages, c'est-à-dire les revenus d’activité (revenus du travail, revenus de la propriété) augmentés des prestations sociales reçues et diminués des impôts versés. Et pour mesurer l'évolution des prix, l'institut de statistiques utilise l'indice des prix à la consommation (IPC).
[ Source : Insee ]
Quels facteurs vont peser sur le pouvoir d'achat ?
Durant la crise de la covid-19, le pouvoir d'achat des ménages a mieux résisté que prévu en raison des aides importantes de l'État.
[ Source : Insee ]
Hélas, l'économie française est déjà fortement affectée par les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement, une évolution incertaine de la demande qui s'est décalée après les confinements sur les biens plutôt que les services, la hausse des prix de l'énergie et plus généralement les conséquences de la guerre en Ukraine. Autant de facteurs qui vont peser très fortement sur le pouvoir d'achat, d'autant que les hausses de salaire sont encore loin de compenser l'inflation, les emplois précaires et mal payés devenant de plus en plus nombreux. Seuls le SMIC et quelques allocations ont automatiquement été revalorisés le 1er mai en raison de l'inflation :
[ Source : France bleu ]
Au total, il y a fort à parier que les hausses de prix vont désormais s'étendre à d'autres biens de première nécessité dont l'alimentation :
Quant à l'immobilier, qui n'entre dans l'indice des prix à la consommation que par la petite porte des loyers et des charges, il pèse lui aussi très lourd dans le budget des ménages. Et lorsque les taux d'intérêt réels à long terme deviennent fortement négatifs, le risque est une hausse du coût d'achat d'un bien immobilier et subséquemment des loyers. Bref, encore des difficultés à venir pour les ménages...
En définitive, s'il veut éviter une nouvelle grogne sociale comme celle des gilets jaunes, le gouvernement devra mener une politique budgétaire expansionniste, qui entrera en contradiction avec les engagements d'équilibre des finances publiques (via la baisse des dépenses publiques). Curieusement, peu de commentateurs font remarquer que dans ce contexte les promesses de baisses d'impôts risquent fort de rester lettre morte... sauf pour une minorité !