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15 mai 2023 1 15 /05 /mai /2023 13:14

 

 

Entre vie chère, salaires à la traîne et marchés financiers en souvent en ébullition, je m'étais demandé dans un précédent billet si l’atterrissage économique pouvait encore se faire en douceur. Ce d'autant plus que de nombreux pays se lancent désormais dans une course aux réformes structurelles (exemple de la réforme des retraites en France) dans l'espoir de renouer avec les gains de productivité, quitte à appliquer pour ce faire des potions amères et aux résultats bien incertains. L'une d'entre consiste à baisser de manière indifférenciée les dépenses publiques, dans le but de réduire concomitamment les impôts prélevés pour les financer.

 

Or, comme je l'ai expliqué dans ce billet, ce théorème (sic) de Schmidt fait partie de tous ces concepts "zombis". Exit donc les véritables questions sur la nature, le montant et l'efficacité des dépenses publiques - au moment où le gouvernement lance son opération transparence sur les impôts  ("En avoir pour mes impôts", sic)... Pour autant, le gouvernement ne semble pas pouvoir sortir de sa politique de "quoi qu'il en coûte", qui coûte néanmoins "un pognon de dingue" !

 

Venons-en à la dette publique, sujet du billet d'aujourd'hui, que j'avais traitée avec la question de la dépense publique lors d'une conférence à l'Université Populaire de Sarreguemines et dans mon nouveau livre grand public, Les grands mécanismes de l'économie en clair (3e édition, revue et augmentée), publié aux éditions Ellipses. Il suffit de jeter un œil sur le graphique ci-dessous, pour en comprendre l'enjeu :

Infographie: Dette publique : un état des lieux | Statista Vous trouverez plus d'infographie sur Statista

 

Bref état des lieux au sein de l'UE

 

Voici le niveau atteint par la dette publique au sein de l'UE :

 

[ Source : Eurostat ]

 

Beaucoup plus intéressant, son évolution sur un an, qui laisse à penser que les choses s'améliorent :

 

[ Source : Eurostat ]

 

Par rapport au quatrième trimestre 2021, la grande majorité des États membres ont enregistré une baisse de leur taux d'endettement public, à la faveur notamment d'un taux d'inflation élevé !

 

Taux d'intérêt nominaux en hausse

 

Depuis le début de l'année 2022, les taux d'intérêt se sont remis à grimper et ils devraient encore monter en raison de la politique monétaire restrictive menée par les Banques centrales des deux côtés de l'Atlantique :

 

 

[ Source : Banque de France ]

 

Les taux d'intérêt des obligations d'État dépendront aussi de la résultante de la vente de titres par la BCE (quantitative tightening) et de la hausse des émissions par les États. Si la hausse qui en découle est trop forte, la zone euro se dirigera vers une crise obligataire comme le démontrent les faillites bancaires aux États-Unis.

 

Soutenabilité de la dette publique 

 

Pour l'instant, comme le taux d'inflation est bien plus élevé que les taux d'intérêt nominaux, les taux d'intérêt réels demeurent négatifs. Cette configuration est favorable à court terme aux pays débiteurs, mais en même temps elle peut devenir un pousse-au-crime... En France, le "bouclier tarifaire" s'adresse ainsi indistinctement aux plus modestes comme aux plus riches en France, avec un coût énorme pour le budget de l'État. 

 

Fondamentalement, la dynamique de la dette publique dépend de son niveau et du différentiel (taux d'intérêt réel - taux de croissance). Et c'est peu dire que les dernières années, les États ont pu profiter de la politique ultra-expansionniste menée par la BCE, qui s'était traduite par une baisse des taux d'intérêt à long terme sur la dette publique et en tout état de cause une croissance (même très faible) supérieure aux taux d'intérêt réels, rendant supportables même des niveaux d'endettements publics très élevés comme en Italie.

 

Mais un retournement de situation est désormais prévisible et, au vu de la situation économique de certains pays (voir mon billet sur l'Italie), tous n'assureront pas à terme leur solvabilité, en particulier la Grèce et l'Italie. Pour mémoire, la dette publique est réputée soutenable si le taux d’endettement public reste constant à défaut de diminuer. Il est cependant vrai qu'il n’existe, a priori, aucun seuil d’endettement maximum, la soutenabilité de la dette publique dépendant autant de facteurs économico-financiers (taux d’intérêt, taux de croissance, dépendance aux capitaux étrangers…) que de facteurs plus difficiles à appréhender (stabilité gouvernementale, effet d’annonce…).

La soutenabilité de la dette publique s'apparente par conséquent à de la chimie fine, dont on ne maîtrise pas forcément toutes les conséquences du mélange des réactifs. En particulier, l'endettement public s'accompagne inévitablement d'effets redistributifs trop souvent négligés dans le débat ou résumés de manière simpliste à des transferts entre générations. La crainte de ces effets mal maîtrisés ou parfois incontrôlables a ainsi conduit les États-Unis a fixer un plafond de dette publique, qui une fois atteint donne lieu à des palabres de marchands de tapis entre le gouvernement et le Congrès, sachant qu'historiquement c'est à ce dernier que la Constitution a accordé le pouvoir d’emprunter (et aussi de prélever l'impôt pour les dépenses publiques).

 

 

[ Source : Econofact.org ]

 

En ce qui concerne l'UE, elle est toujours à la recherche d'un modèle plus ou moins fédéraliste, qui lui permettrait de mutualiser réellement les dettes publiques des États membres et ainsi d'éviter une nouvelle crise de la dette (publique). Mais est-ce politiquement envisageable ? Telle est la question...

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