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Publié par Raphaël DIDIER




On m'interroge souvent sur l'évolution de l'emploi intérimaire. Il est vrai que les chiffres fournis par l'INSEE, et répétés à l'envi dans les médias, sont en général présentés hors intérim. Disons le donc tout de suite : les chiffres de l'emploi intérimaire sont catastrophiques depuis quelques mois !

Selon Pôle Emploi, un total de 469 800 personnes occupaient un emploi intérimaire en France en avril 2009 (en valeur corrigée des variations saisonnières), soit une chute de 31,9 % par rapport à avril 2008. La baisse mensuelle ayant quelque peu marqué le pas en avril (-0,3 % par rapport à mars 2009), certains y voient déjà un signe de reprise... ce qui est une erreur un excès de croyance dans les chiffres. En effet, n'oublions pas que certaines mesures et décisions conjoncturelles ont influencé - et vont encore influencer - les chiffres à très court terme : certaines aides vont ainsi relancer pendant quelques temps la demande et l'offre et donc avoir un impact sur l'emploi intérimaire. Je pense notamment à Renault qui va reprendre partiellement en France la production d'un modèle de Clio fabriqué en Slovénie, ou à Peugeot qui prévoit une demi-équipe de nuit comprenant 480 postes d'intérimaires à Mulhouse jusqu'en octobre. 

Ce n'est donc pas une suprise si seule l’industrie connaît une augmentation de son emploi intérimaire en avril (+0,4%)... Et encore, il faut nuancer ce chiffre. Car, si d'un côté la fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac connaît la hausse la plus conséquente (+2,7%), de l'autre, l’emploi intérimaire continue de reculer fortement en avril dans les activités de fabrication d'équipements électriques, électroniques, informatiques et fabrication de machines (-6,5%).

A contrario, les secteurs du tertiaire et de la construction perdent respectivement 0,3 % et 0,9 % de leurs intérimaires par rapport à fin mars 2009... Tous secteurs confondus, sur un an, les plus fortes diminutions concernent les emplois d’ouvriers, qui représentent environ 3/4 des emplois intérimaires (-31,9 % pour les ouvriers qualifiés et -37,3 % pour les ouvriers non qualifiés). En évolution annuelle, l’emploi intérimaire recule dans toutes les régions. La Franche-Comté affiche ainsi la baisse la plus forte (-49,1%), suivie de la région Champagne-Ardenne (-47,0%). Ma région, la Lorraine, se situe parmi les régions qui connaissent les baisses les plus fortes. Même les régions réputées "dynamiques" perdent de nombreux emplois dans l'intérim : Languedoc-Roussillon (-17,0%), PACA (-17,4%).

Le seul signe positif vu par Pôle Emploi est l'augmentation de l'emploi intérimaire dans 12 régions au mois d'avril par rapport à mars. Au vu des explications conjoncturelles énoncées ci-dessus, on ne peut absolument rien en inférer sur le moyen terme, ni même sur le court terme (trimestre...). Dit autrement, une baisse moins prononcée en avril (qui reste toujours une baisse !) ne présume pas des chiffres du mois de juillet, et encore moins de ceux de la rentrée !

Voici, pour finir, un graphique présentant l'évolution de l'emploi intérimaire depuis l'an 2000 en France (données CVS) :

                       [ Source : Pôle Emploi, communiqué de presse juin 2009 ]


Est-ce donc le signe d'une reprise ? Rien n'est moins sûr...

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J
Jusqu'à maintenant, l'emploi intérimaire a été pour l'économiste ce que la grenouille et les rhumatismes sont au métérologiste: cela sert de signe annonciateur avant même le moindre élément chiffré. <br /> Si l'emploi intérimaire augmente, c'est que les carnets de commande se gonflent et que l'on peut s'attendre à une progression de l'activité derrière. <br /> Mais il faut dire: et réciproquement! Alors la chute spectaculaire de l'emploi intérimaire a de quoi nous faire froid dans le dos, car elle précéde fort probablement une aussi forte chute (en proportion) de l'emploi salarié non précaire. N'oublions pas que la multitude de plans sociaux dont on nous a parlé jusqu'à maintenant ne sont pas encore entrés dans les faits! <br /> Et pour bien mesurer l'ampleur de ce qui nous arrive, la crise de 1929 a laissé sur le carreau en France environ (et sauf erreur de ma part)500 000 salariés qui sont donc devenus chômeurs, entre 1931 et 1936. Rien que sur 2009 on s'attend à une perte de l'emploi salarié autour de 800 000. Même en rapport de la population, qui a certes bien augmenté entre 1936 et 2009, ce chiffre reste tout simplement énorme.<br /> Autre signe inquiétant, les régions les plus touchées sont celles où l'industrie prédomine. Or l'industrie, cela reste le plus important pourvoyeur en matière d'emploi salarié et celui qui génére le plus d'emplois dérivés via la sous-traitance.<br /> Alors pourvu que pour une fois ces signes nous trompent et que nous ne soyons pas en train d'écrire la chronique d'une catastrophe annoncée!!!
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R
<br /> Vous avez raison de dire que l'emploi intérimaire est souvent vu comme un indicateur conjoncturel. Sa baisse ne laisse donc, a priori, rien présager de bon...<br /> D'autant plus que personne ne voit réellement comment relancer la machine économie à court terme en conciliant des objectifs parfois contradictoires (emploi, écologie,...) !<br /> <br /> <br />